La polémique reste vive autour de la grève de 216 heures, déclenchée, depuis le début de la semaine, par plusieurs syndicats d’enseignants qui se cramponnent au statut autonome et ne veulent rien entendre parler. Pourtant, au cours des premières négociations, ces derniers avaient convenu d’abandonner ce fameux qualificatif avant de faire brutalement marche-arrière pour en faire une exigence pour leur participation aux discussions.
L’Etat, qui est déterminé à poursuivre le dialogue pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants, estime que le statut autonome, tel qu’il est réclamé par les syndicats d’enseignants, viole la constitution du pays.
Rien ne sert de courir, il faut partir à point, dit-on. Dans le énième bras-de fer que les six syndicats ; dits signataires du 15 octobre 2016, de l’enseignants viennent d’ouvrir avec le gouvernement, et qui provoque aujourd’hui une grande paralysie de l’école malienne, on pouvait éviter l’escalade si, comme cela avait été convenu entre les parties, les grévistes s’étaient tenus aux accords de départ.
En fait, depuis le premier préavis de grève déposé le 22 décembre 2016, sous l’égide du ministère du travail, une commission de conciliation a été mise en place, comprenant des responsables syndicaux, des représentants du gouvernement et des médiateurs.
A l’issue de ces discussions, des résultats probants ont été enregistrés et consignés dans un procès-verbal de conciliation, signé par toutes les parties, en date du 8 janvier dernier. Parmi ces résultats, on notait des points d’accords précis, comme par exemple, le fait pour le gouvernement de s’engager à donner un statut aux enseignants.
En fait, cet engagement du gouvernement, qui a fait l’objet d’accord entre les deux parties, est bel et bien consigné dans le PV de conciliation, en date du 8 janvier dernier, qui en fait expressément mention.Il est donc clair que l’Etat ne s’est jamais engagé à donner un statut autonome aux enseignants, contrairement à ce qui se dit dans les milieux syndicaux. D’ailleurs, entre les deux parties, pour ne pas achopper les négociations, il avait été décidé d’abandonner le fameux qualificatif « statut autonome » et de se référer ainsi aux conclusions des travaux du cadre de concertation. D’où la signature de ce procès-verbal de conciliation, signé entre les deux parties, sous la bienveillance de l’équipe des médiateurs.
Nul ne sait en réalité pourquoi les syndicats ont fait un remake sur ce « statut autonome » qui devait être simplement abandonné dans les discussions. Ce qui est sûr, c’est que la partie gouvernementale, toujours déterminée à s’engager dans la voie du dialogue pour la nécessaire amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants, a estimé que l’adoption d’un statut autonome, tel qu’il est réclamé par les grévistes, viole la constitution du pays. Ce qui dans le cadre d’un Etat de droitn’est pas envisageable, ne serait-ce même que pour assurer la primauté de la légalité institutionnelle.
Et ce n’est pas tout : s’agissant des enseignants, les négociateurs gouvernementaux, lors des discussions avec les syndicats, ont fait valoir le contexte de la décentralisation pour expliquer le « statut autonome », comme réclamé par les grévistes, ne saurait prospérer. Et cela, en application de la politique de la décentralisation, dont la mise en œuvre fait apparaitre, concernant l’enseignement, une nette différenciation selon les différents niveaux de gestion et de compétence.
En termes plus clairs, le détail des compétences transférées de l’Etat aux collectivités, en matière d’éducation, fait ressortir le schéma suivant : l’enseignement fondamental est du domaine de la commune, l’enseignement secondaire général relève du conseil de cercle et les enseignements technique, professionnel et normal reviennent au conseil régional.
Si nous ne voulons pas caricaturer la politique de décentralisation, en cous dans notre pays, nous ne pouvons pas s’engager, en matière d’éducation, à aller à un « statut autonome » au risque de chambouler toute cette architecture politique et institutionnelle.
Certes, les syndicats grévistes ne le comprennent pas de cette oreille, et veulent coûte que coûte mettre la pression, pour le faire passer, mais, à l’image du gouvernement ; qui est bien décidé à apporter plus d’amélioration à la situation des enseignants, d’autres syndicats d’enseignants, non-grévistes, ont déjà saisi les pouvoirs publics, en demandant, dans leurs revendications, la relecture et l’amélioration des statuts particuliers existants, comme d’ailleurs la partie gouvernementale le demande aux grévistes.
A l’évidence, face à la bonne volonté manifeste des représentants gouvernementaux, qui ont jusqu’ici privilégié le nécessaire dialogue, en vue de décrisper l’atmosphère, l’intransigeance syndicale, aussi implacable et démesurée, en raison du contexte général actuel du pays, notamment le cas de l’école, n’avait pas droit de cité.
De fait, autour de ce mouvement de débrayage de 216 heures, l’opinion publique est perplexe quant à sa légalité formelle du fait que les grévistes n’ont pas mis un point d’honneur à respecter les dispositions relatives à l’exercice du droit de grève dans les services publics. Selon plusieurs sources proches des milieux scolaires, le préavis de grève de 216 heures n’a pas respecté le délai obligatoire en la matière, les syndicats estimant qu’il est intervenu à la suite d’une suspension. Une violation de la loi qui ne fait qu’alourdir la controverse sur ce mouvement de débrayage qui n’a pas encore fini de parler de lui.
Youma