SociétéLettre ouverte des Parents de Cabral au Président de la République et au peuple malien « Nous doutons de tous, de Moussa Traoré, Alpha Omar Konaré, IBK et ATT »
« Aujourd’hui comme hier nous doutons de tous, de Moussa Traoré, Alpha Omar Konaré, Ibrahim Boubacar Keïta en passant par Amadou Toumani Touré le protagoniste et, surtout ses fameux compagnons qui n'ont cessé de nous tympaniser 37 ans durant…. Notre jeune démocratie dont se glorifiait l'Afrique entière, même si le peuple malien lui-même a commencé à en douter depuis fort longtemps, vient de connaître son plus mauvais sort, sinon son assassinat….. Cabral et tous les martyrs tombés pour l'avènement de cette démocratie se seraient-ils sacrifiés pour rien ? Nous pensons que non ! Peuple malien et patriotes convaincus et sincères, levons-nous comme un seul homme pour redonner à notre cher pays ce que le père de l'indépendance, Feu Président Modibo Keïta et ses compagnons lui souhaitaient ». Voilà un extrait de la lettre ouverte de la famille de Feu Siné Camara au Président de la République et au peuple malien.
Mardi 16 mars, journal de 20 h, mes frères et moi assistions interloqués à un acte incompréhensible des anciens compagnons de mon défunt frère Abdoul Karim Camara Cabral. En effet, dans la journée du 16 mars, veille de l'anniversaire de son assassinat, ses compagnons ont décidé de décorer le Président de la République. Quelle en est la raison ?
Une alternative pour accéder au délice du pouvoir en utilisant à leur tour, leur compagnon, en empruntant son cadavre comme un escalier. Depuis fort longtemps, on se doutait de cet opportunisme mais on refusait d'y croire. Néanmoins, je les accusais vertement le 17 mars 2016 d'être « les chercheurs d'aiguilles dont les pieds cachent ce qu’ils cherchent ». Ils s'en offusquèrent. La famille décida comme par pressentiment qu'on ne participerait plus à aucun folklore tant que nous ne saurons pas où est enterré Abdou. Telle fut la dernière décision de la famille Camara.
En effet, revisitant le passé de ce triste évènement qui n'aura été que surprises sur surprises pour la famille, le commanditaire de ce crime ou tout au moins, celui à qui cela aurait pu profiter, c'est-à-dire Moussa Traoré, Président de la République à l'époque des faits, n'aurait eu comme seule réaction que de poser la question à ceux venus l'informer de la mort de Cabral, de savoir qui leur a demandé d'en arriver là.
Malgré cette désapprobation de façade, il n'a jamais pu prendre ses responsabilités pour gérer cet épineux dossier dans l'intérêt même du pays. Cependant il n'a pas hésité un seul instant, à l'occasion du retentissant procès crime de sang, tenu après le renversement de son régime par Amadou Toumani Touré en 1991, de demander à la cour la relaxe pure et simple de tous ses compagnons de ses tristes années de pouvoir.
Cet acte ignoble, c'est-à-dire l'assassinat de Cabral, désapprouvé par l'ensemble du peuple malien, ne profite-t-il pas aujourd'hui à Moussa Traoré, celui-là même qui fut qualifié de « ce grand républicain » par Ibrahim Boubacar Keïta, l'actuel Président de la République ?
Allahou Akbar ! Cabral et tous les patriotes convaincus et engagés morts pour l'avènement d'une véritable démocratie au Mali, doivent aujourd'hui se retourner dans leurs tombes.
Quelle ne fut notre surprise, quand fraichement installé dans ses bureaux à la Maison du peuple, après le coup d'Etat du 26 mars 1991, le Président du CTSP Amadou Toumani Touré, nous a convoqués (la famille), pour nous informer que le corps du jeune frère reposait au cimetière de Lafiabougou, en faisant jurer sur l'honneur, de pauvres soldats de sa compagnie ! Cette affirmation mensongère n'a pu résister à l’épreuve des faits.
C'est ainsi que depuis, les cérémonies commémoratives ont lieu au monument érigé, semble-t-il, en sa mémoire. Comme pour bien vider son sac, le même Président du CTSP nous a encore reçus, la veille du passage de témoin à Alpha Omar Konaré, 1er Président démocratiquement élu de la République et nous a promis de passer à celui-ci le dossier Cabral.
Cabral qui fut, faut-il le rappeler, un élève du Professeur Alpha Omar Konaré à l'ENSUP. Quelle ne fut encore notre surprise de voir Alpha nous déclarer avec un calme olympien, quand il a reçu la famille en audience au palais de Koulouba, n'avoir pas reçu ce dossier de son prédécesseur.
Aucun pouvoir depuis cette triste journée du 17 mars 1980, jusqu’à ce jour n'a daigné poser aucun acte de nature à soulager la famille Cabral, pour lui permettre de faire son deuil.
Enfin, aujourd'hui comme hier nous doutons de tous, de Moussa Traoré, Alpha Omar Konaré, Ibrahim Boubacar Keïta en passant par Amadou Toumani Touré le protagoniste et, surtout ses fameux compagnons qui n'ont cessé de nous tympaniser 37 ans durant.
Notre jeune démocratie dont se glorifiait l'Afrique entière, même si le peuple malien lui-même a commencé à en douter depuis fort longtemps, vient de connaître son plus mauvais sort, sinon son assassinat.
Cabral et tous les martyrs tombés pour l'avènement de cette démocratie se seraient-ils sacrifiés pour rien ? Nous pensons que non !
Peuple malien et patriotes convaincus et sincères, levons-nous comme un seul homme pour redonner à notre cher pays ce que le père de l'indépendance, Feu Président Modibo Keïta et ses compagnons lui souhaitaient.
ALLAH KA TINIE DEME
Bamako le 17 mars 2017
Le Représentant de la famille
Mohamed Bassirou Camara
Chevalier de l’ordre national du Mali
Qui était donc Cabral ?
Abdoul Karim Camara, dit Cabral, né le 2 juillet 1955 et mort assassiné sous la torture le 17 mars 1980 à Bamako, est un leader étudiant malien.
Étudiant en philo-pédagogie à l’Ecole normale supérieure (ENSUP), Abdoul Karim Camara est élu le 17 février 1980 président de l’Union des élèves et étudiants du Mali (UNEEM) lors du congrès qui se tient dans la clandestinité de cette organisation récemment dissoute par le régime autoritaire de Moussa Traoré. Le congrès lance un mot d’ordre de grève pour réclamer la libération de lycéens arrêtés lors de manifestation à Ségou. Des manifestations étudiantes sont violemment réprimées.
Abdoul Karim Camara est arrêté le 16 mars 1980 alors qu'il se trouvait dans un camion en direction de la Guinée. Il est amené au commissariat du 2e arrondissement de Bamako où on le torture et le force à enregistrer un appel de fin de la grève qui est diffusé sur la radio nationale. Il est ensuite emmené et torturé au camp para de Djikoroni à Bamako, où il meurt de ses blessures le lendemain.
Le 16 mars 2014, Almahamoud Sidibé, commissaire de police à la retraite, témoigne lors d'une conférence de sa présence lors des sévices infligés à Cabral par la police, et reconnait avoir amené le corps du jeune garçon à l'hôpital où un médecin a confirmé sa mort.
Depuis la chute de Moussa Traoré et la mise en place de la démocratie au Mali, l’assassinat d’Abdoul Karim Camara est commémoré chaque année le 17 mars. Un monument en son souvenir a été érigé à Bamako et le lycée de Ségou porte son nom.
Source : Wilkipédia