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26 ans après la chute de Moussa Traoré : Que reste-t-il du 26-Mars ?
Publié le vendredi 31 mars 2017  |  L’Inter de Bamako
Moussa
© AFP par FRANCOIS ROJON
Moussa Traoré
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L’effondrement du régime inique, en 1991, incarné par le chef de la soldatesque du 19 novembre 1968, avait suscité un immense espoir chez les Maliens qui avaient enduré vingt-trois ans durant les dérives dictatoriales d’un pouvoir contesté à tous les échelons de la société malienne. Mais l’euphorie n’a duré que le temps d’une bulle de savon tant les démocrates sincères et patriotes convaincus se sont montrés pires dans la gestion des deniers publics que celui qu’ils avaient combattu.
Le 26- Mars restera une date inscrite en lettres d’or dans les annales de l’histoire contemporaine du Mali, malgré les nombreuses tentatives de la souiller, falsifier pour plaire à celui qui avait promis de tresser une couronne d’enfer sur la tête des Maliens. Ce jour, l’armée, conduite par le lieutenant colonel Amadou Toumani Touré (ATT), parachève l’œuvre patriote du peuple malien en mettant fin au règne d’un dictateur de la pire espèce, le général Moussa Traoré, entré par effraction dans l’histoire politique du Mali un 19 novembre 1968. Elle est intervenue après que le président eut tué des centaines de ses compatriotes qui manifestaient dans les rues pour réclamer un mieux être.
Avant, pendant et après les événements qui ont balayé l’un des régimes les plus cruels de l’Afrique post indépendance, les Maliens ne demandaient qu’une seule chose : le kokadjè (le changement). Ils étaient las de supporter les brimades qui ont jalonné les vingt- trois longues années de la gestion désastreuse du CMLN (dix ans) et de l’UDPM (treize ans), d’assassinat, de la misère, de la pauvreté, d’inégalités sociales et de retard de salaires. Quoi de plus normal pour aspirer au bonheur à la fin d’un tel régime qui avait basculé dans la tyrannie la plus totale !
Mais, très vite, l’espoir a cédé la place au déchantement. Les autorités issues des premières élections dites démocratiques et pluralistes organisées, en 1992, ont sérieusement plombé la marche patriotique du Mali enclenchée, le 22 septembre 1960, sous la houlette du président Modibo Keïta.
Les autorités de la IIIème République ont ainsi mis sous les boisseaux les idéaux du 26-Mars pour leur propre enrichissement en sophistiquant les pratiques mafieuses de l’ancien régime. Malheureusement pour le peuple malien, la grande majorité des dirigeants qui venaient de prendre les rênes du pouvoir, le 8 juin 1992, étaient presque tous des produits du général Moussa Traoré.
A commencer par le président Alpha Oumar Konaré. Il fut, entre 1978 et 1980, le ministre des Sports, des Arts, de la Jeunesse et de la Culture du dictateur Moussa. A ce titre, il a participé aux côtés du tyran à la destruction du Mali et est l’un des témoins clés des circonstances de la mort de Abdoul Karim Camara dit Cabral, leader estudiantin des années 1980.
La mort du secrétaire général de l’UNEEM est toujours frappée du sceau du mystère. Ce qui est sûr, on ne pouvait rien attendre de l’ancien ministre du président Moussa Traoré.
Le président Alpha Oumar Konaré n’était pas l’homme indiqué pour conduire le Mali au changement dont les Maliens n’ont cessé de réclamer tout au long des événements qui ont abouti à la chute du secrétaire général de l’ex-parti unique (UDPM). S’il était parvenu à se défaire des anciennes pratiques malhonnêtes du régime de Moussa dont il est comptable de la mauvaise gestion, on pouvait aisément dire qu’il a réussi à se mettre sur la même ligne que les Maliens qui demandaient le changement, en mars 1991.
L’ADEMA au pouvoir, bonjour les dégâts
Durant les dix (10) ans de règne du président Konaré, c’était la course effrénée à l’enrichissement illicite. Il ne se passait de jour sans qu’un scandale politico- financier n’éclate au Mali impliquant les gros bonnets de la République.
Les idéaux du 26-Mars ont été mis au placard du détournement des deniers publics, de la dilapidation des maigres ressources de l’Etat, de l’accaparement des terres des paysans, de la liquidation de l’école publique, de la dépravation de nos mœurs, du népotisme, du clientélisme, de la corruption, de la poursuite du processus de privatisation des sociétés et entreprises d’Etat, de la surfacturation. La liste est loin d’être exhaustive.
En un laps de temps, les responsables de l’ADEMA et leurs alliés politiques se sont enrichis de façon ostentatoire, arrogante et méprisante sur le dos du peuple qui attendait beaucoup de leur arrivée au pouvoir. Ils ont mis leurs intérêts égoïstes et sordides au dessus de l’intérêt supérieur de la nation.
Dans leur tentative de faire mains basses sur les ressources de l’Etat, ils ont cassé tous les soubassements de l’Etat au nom de la privatisation et de la libéralisation des secteurs de souveraineté qui à leurs yeux sont les seuls moyens pour que le pays puisse amorcer un développement durable. Mais c’était de la poudre aux yeux des Maliens. S’ils n’ont pas racheté les anciennes sociétés et entreprises d’Etat, ils en sont tous devenus actionnaires majoritaires.
Les EDIM, les banques, les salles de l’ex-OCINAM, HUICOMA sont passées par là. Idem pour les bâtiments de l’Etat. L’école n’a pas échappé à leur enrichissement illicite. Les ministres nommés à la tête du département de l’Education ont introduit dans notre système éducatif des programmes sans lendemain.
On est passé de la Nouvelle école fondamentale (NEF), à la Nouvelle école malienne (NEM), de la pédagogie convergente au curriculum. Ces programmes ont dangereusement contribué à la baisse du niveau des élèves et étudiants du Mali, mais par contre, ils ont enrichis les responsables de l’ADEMA. Ils étaient financés à coût de milliards. C’est avec cet argent sale qu’ils ont financé les études de leurs enfants en Occident.
La gestion de l’armée est la plus choquante. Alpha et ses hommes ont démantelé notre système de défense et de sécurité. Ils ont mis le feu à la poudrière de Kati en 1996. Au nom de la Flamme de la paix organisée, le 27 avril 1996, une paix qui n’est jamais revenue dans notre pays, ils ont mis le feu à nos armes à Tombouctou. La destruction ne s’est pas arrêtée à ce niveau. Les ressources humaines les plus valeureuses de notre armée ont été décimées.
La mort du commandant Siaka Koné et de ses compagnons, en septembre 1993, demeure un mystère. Un crash d’avion à Salonique (en Grèce) a coûté la vie à quatorze officiers d’une très grande valeur. Derrière ce crash, se cache un sabotage de l’avion qui était parti en réparation en Russie. Ensuite, ils ont fait de notre armée un dépotoir.
Les recrutements ne répondaient plus à aucun critère de sélection. Conséquence : une armée dépourvue de moyens adéquats et d’hommes capables de défendre la patrie. Comme si cela ne suffisait pas, ils ont bouffé les budgets votés chaque année par l’Assemblée nationale pour assurer notre sécurité. Dieu faisant bien les choses, leur gestion chaotique du pays a été mise à nu par la perte de notre souveraineté sur les deux-tiers de notre territoire, en 2012.
Ces pratiques mafieuses et déloyales font qu’aujourd’hui, ils ont pris le pays en otage. Ils sont présents dans tous les secteurs économiques du pays à travers des sociétés- écrans dirigées par leurs enfants. Elles raflent tous les marchés des départements ministériels dans lesquels ils ont mis en place un système de corruption huilé.
Ces gens qui se cachaient derrière la démocratie ont fait pire que les anciens dirigeants du parti unique dans le gaspillage des ressources de l’Etat. Ils ont presque hypothéqué l’avenir du Mali en faisant croire aux femmes et aux hommes qu’on peut réussir sans travailler. Ils ont laissé ruines et désolation. Ce qui reste des idéaux galvaudés du 26-Mars n’est autre que le mensonge, un citoyen dépouillé des forces nécessaires pour défendre sa patrie et qui ne croit qu’à l’argent roi.
Du président Alpha à IBK, en passant par ATT, ils ont tous, chacun à sa façon réhabilité Moussa Traoré, le bourreau du peuple malien. Cela se comprend aisément dans la mesure où ils sont tous le produit du système du général dictateur. A quelques mois de la fin de son dernier mandat (2002) à la tête du Mali, Alpha le gracie et lui accorde tous les avantages dus à un ancien président de la République. Le général ATT pour se réconcilier avec son mentor a garanti celui-ci tout. Enfin, le président IBK le qualifie de «grand républicain» lors de sa cérémonie de prestation de serment, le 4 septembre 2013.
Avec tout ce crime contre le peuple malien, s’ils pensent qu’ils sont à l’abri d’une poursuite, ils se trompent énormément. Ils vont répondre un jour devant le tribunal de l’histoire. Et ce jour n’est pas loin.
Yoro SOW
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