Avec la persistance de la menace terroriste, l’état d’urgence a été plusieurs fois prorogé sans pour autant perturber le quotidien du citoyen lambda.
Depuis fin novembre 2015, nos compatriotes vivent dans l’état d’urgence. Comme l’avait déjà expliqué dans les colonnes de l’Essor le spécialiste de droit public, le professeur Fousseyni Samaké, l’état d’urgence est un Etat d’exception ou Etat de crise dont la proclamation a pour effet de renforcer les pouvoirs de police des autorités administratives et de restreindre les libertés publiques, en vue de faire face à un danger exceptionnel qui menace l’existence de la Nation. Il s’agit, en somme, de donner à l’Etat les moyens juridiques destinés à assurer sa sauvegarde voire sa survie. En période d’état d’urgence, les forces de sécurité peuvent, par exemple, procéder aux perquisitions et aux arrestations en dehors de la procédure normale. Il peut y avoir l’assignation à résidence de toute personne dont l’activité s’avère dangereuse pour la sécurité et l’ordre public. Tout comme, certaines manifestations publiques à caractère revendicatif peuvent être interdites par les autorités municipales ou administratives, la fermeture provisoire de lieux publics tels que les salles de spectacle, les salles de réunion et de culte, la possibilité de procéder à la recherche et à l’enlèvement des armes et munitions ainsi que des explosifs et tous engins meurtriers ou incendiaires. Depuis l’attaque terroriste contre l’hôtel Radisson, le 20 novembre 2015, ayant fait plusieurs morts et blessés, l’état d’urgence a été instauré sur le territoire national pour une période de dix jours qui a été ensuite prorogé de trois mois à la faveur d’un conseil des ministres extraordinaire. L’état d’urgence a été, à nouveau, déclaré par le décret du 20 juillet 2016 et prorogé de six mois par la loi du 30 juillet 2016. Expiré le 29 mars 2017, l’état d’urgence a été prorogé pour une durée de 10 jours à compter du vendredi 31 mars 2017 à minuit sur toute l’étendue du territoire national. La décision a été prise en conseil des ministres du 30 mars 2017. Les autorités ont justifié cette prorogation par le fait qu’«en dépit des efforts fournis et des mesures arrêtées, l’évaluation de la situation sécuritaire révèle la persistance de la menace terroriste au Mali et dans la sous-région ainsi que des risques d’atteinte à la sécurité des personnes et de leurs biens… La déclaration de l’état d’urgence permettra aux autorités compétentes de poursuivre les efforts de prévention et de lutte contre les menaces terroristes et toutes les formes d’atteinte à la sécurité des personnes et de leurs biens». «Sa prorogation interviendra si l’évaluation de la situation sécuritaire le justifie», précise le communiqué. La persistance de la menace terroriste est donc la principale raison évoquée par les autorités pour justifier les prolongations répétées de l’état d’urgence. La menace est réelle puisqu’il ne se passe pas une semaine sans qu’une attaque sanglante ne soit signalée sur une partie du territoire. Du Nord au Sud, en passant par le Centre, aucune localité du pays n’est aujourd’hui à l’abri d’une attaque terroriste ou de bandits armés. Une situation qui donne du fil à retordre à nos forces de sécurité et de défense. Harcelées de toutes parts, celles-ci restent constamment sur le qui-vive. De 2015 à nos jours, les populations ont appris à vivre avec l’état d’urgence sans que cela ne soit un vrai obstacle à leurs activités. Le paisible commerçant qui ouvre son magasin, quotidiennement, le fonctionnaire qui se rend a son bureau, le banquier qui va à son travail, le chauffeur de taxi, le menuisier… toutes ces personnes ordinaires vaquent tranquillement à leurs occupations en période de l’état d’urgence. L’état d’urgence est plutôt l’affaire des forces de sécurité qui travaillent jour et nuit sans relâche. Elles abattent un énorme travail dans l’ombre. On s’en est rendu compte lorsque le directeur général de la police, Moussa Ag Infahi, a invité la presse pour faire le bilan des trois premiers mois de l’état d’urgence. Les statistiques font état de : 1465 descentes et 678 perquisitions effectuées par la police, 4785 personnes interpellées dont 1671 déférés, 2834 personnes fichées, 42 armes, 211 véhicules, 1737 motos également saisis. Il y a aussi la saisie de drogues, de 2 tonnes et 370 kilos de produits pharmaceutiques illicites ainsi que 33 interventions sur des scènes de crime.