Amadoun Koufa, le chef des islamistes qui sèment la terreur dans le centre du Mali, a été spécifiquement cité comme incontournable dans le processus de paix au Mali par les participants à la Conférence d’entente nationale. Ainsi, l’ouverture d’un dialogue avec ce terroriste a été recommandée par les Maliens qui sont pourtant attachés au caractère laïc et républicain du pays.
Dans la synthèse du rapport général de la Conférence d’entente nationale, il est clairement recommandé de négocier avec les terroristes maliens. Même si ces derniers ne sont parties prenantes à l’accord d’Alger, aux yeux de certains participants, ils restent des enfants du pays qui doivent être écoutés dans le cadre de la recherche de la stabilité.
L’annonce d’un possible dialogue avec Iyad Ag Ghali, le fondateur du groupe terroriste Ansar Dine, a été saluée par un applaudissement nourri de la part de certains délégués. Beaucoup de participants caressent l’espoir de pouvoir mettre un terme à l’action armée dans les régions du Nord en ouvrant le dialogue avec Iyad.
Les attaques répétées dans le Nord du pays contre les casques bleus, les FAMAs et quelques fois des civils sont le plus souvent revendiquées par le groupe d’Iyad Ag Ghali. Des délégués de Kidal ainsi que des représentants d’organisations religieuses ont été parmi les plus grands défenseurs de l’ouverture du dialogue avec Iyad.
Amadoun Koufa, qui met peu à peu le centre du Mali dans la violence, prolonge l’action de son mentor Iyad Ag Ghali dans le centre et le sud. Les délégués du centre ont été surtout les défenseurs de l’implication de ce dernier dans le processus de paix. Cela est une urgence selon des délégués de la région de Mopti, les actes criminels ayant pris une dimension pouvant mettre en cause la cohabitation entre les communautés de la localité.
Néanmoins, pour les participants à la Conférence d’entente nationale, il y a une ligne rouge à ne pas franchir en ouvrant le dialogue avec les islamistes. Il s’agit du caractère laïc et républicain de l’Etat du Mali. En attendant, l’on se demande bien comment les islamistes qui ne jurent que par la remise en cause du modèle démocratique arriveront à renoncer à leur idéal.
Tiebilé Dramé enfin entendu
Dans un proche passé, des leaders maliens avaient demandé d’ouvrir des négociations avec les djihadistes maliens. Contre presque tous (la communauté internationale, le pouvoir et ses fervents défenseurs) Tiébilé Dramé, l’ancien ministre des affaires étrangères du Mali, le négociateur de l’Accord de Ouagadougou et président du Parena, défend, depuis trois ans, le projet de négocier avec les djihadistes maliens.
« Il convient d’explorer la possibilité de parler avec les jihadistes maliens avant qu’il ne soit trop tard… il ne sert à rien de nous cacher derrière notre petit doigt, regardons plutôt la vérité en face. Nous avons aujourd’hui des Coulibaly, des Mamadou, des Tounkara, des Konaté dans les groupes jihadistes : ce sont nos frères maliens. Nous devons parler avec eux … Iyad Ag Ghali, Amadou Kouffa et les autres sont nos frères. C’est avec eux que nous devons discuter dans le cadre des assises nationales qui aborderont tous les problèmes du Mali.», a-t-il expliqué, en novembre 2016, à notre confrère le Monde.
Lors de la journée d’échanges que le Parena a tenu, le 19 février 2017 à la Maison des Ainés de Bamako, sur l’insécurité qui prévaut dans la région de Mopti et dans les cercles de Ké-Macina et de Niono, dans la région de Ségou, l’une des recommandations tourne autour du dialogue, notamment avec les chefs djihadistes locaux, en l’occurrence avec Ahmadou Kouffa, présumé leader du Front de Libération du Macina (FLM). Les recommandations de cette rencontre indiquent que « face à la rébellion, il y a deux postures possibles : la force et le dialogue. Eu égard aux coûts humains et matériels de l’usage de la force, il faut aller au dialogue : dialoguer avec les chefs djihadistes locaux; dialoguer avec Ahmadou Kouffa ».
Soumaila T. Diarra