PARIS - Ils sont sur le papier deux jihadistes français
présumés interceptés au Mali. Mais dans les faits, leur situation est bien
différente: l'un a été arrêté et expulsé par les autorités maliennes, l'autre
fait prisonnier par l'armée française en guerre. Quel est leur statut
judiciaire?
Pour Ibrahim Aziz Ouattara, les choses sont simples.
Il avait été arrêté dans le centre du Mali en novembre -bien avant que ne
débute l'intervention militaire française- par les autorités maliennes qui le
soupçonnaient de vouloir rallier les groupes jihadistes dans le nord.
Cet homme de 25 ans originaire d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) a été
détenu par les autorités maliennes jusqu'à son expulsion vers la France, où il
est arrivé mardi matin.
Placé en garde à vue dans les locaux de la Direction centrale du
renseignement intérieur (DCRI), il a été déféré vendredi au parquet de Paris,
selon la source judiciaire.
Suite logique de ce parcours judiciaire, il devait dans la journée être
présenté à un juge d'instruction, qui pourrait le mettre en examen pour
"association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste".
Il devra notamment expliquer sa présence au Mali en novembre alors qu'une
mesure de contrôle judiciaire décidée dans une autre affaire antiterroriste
lui interdisait théoriquement de quitter la France.
"La France n'a pas déclaré la guerre"
Le sort du second jihadiste intercepté au Mali demeurait vendredi beaucoup
plus incertain.
En visite à Bamako, Jean-Yves Le Drian a confirmé dans la matinée sur
Europe 1 que cet homme avait été fait prisonnier avec une "demi-dizaine"
d'autres jihadistes à l'issue des combats violents qui ont opposé ces derniers
jours les forces françaises et tchadiennes aux islamistes dans le massif de
l'Adra des Ifoghas (nord).
Selon le ministre, l'individu devait être "extradé vers la France dans les
moments qui viennent".
Aucune précision n'a été donnée sur l'habillage juridique du rapatriement
de ce prisonnier en France. L'extradition est une procédure judiciaire
généralement longue, qui implique théoriquement l'examen d'une requête
officielle par un tribunal compétent.
En tout état de cause, ce combattant présumé ne sera pas traité comme un
prisonnier de guerre, mais comme un détenu de droit commun, selon
Jean-François Daguzan, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche
stratégique.
"Il n'y aura pas de prisonnier de guerre car la France n'a pas déclaré de
guerre et elle ne combat pas un État", a-t-il dit.
Pour justifier son intervention au Mali, Paris avait mis en avant l'article
51 de la charte de l'ONU qui mentionne "le droit de légitime défense,
individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations unies est
l'objet d'une agression armée".
"La communication du gouvernement et du président a été d'une grande clarté
en disant qu'on avait affaire à des terroristes, ce qui implique que leur
éventuelle arrestation tombe sous le coup du droit français, du droit malien
et du droit international", a-t-il dit à l'AFP.
Les combattants capturés au Mali ne relèveraient donc pas de la Convention
de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre
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