Les autorités intérimaires sont enfin installées dans les différentes régions du Nord du Mali (Kidal, Ménaka, Gao, Tombouctou et Taoudénit). L’installation de ces autorités transitoires est une avancée notoire dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali 22 mois après sa signature, même si le processus de paix reste confronté à d’innombrable problèmes dont la recrudescence de l’insécurité sur l’ensemble du territoire malien, les conflits intercommunautaires dans le Centre et la percée djihadiste qui continue dans le pays.
Avancée notoire ? Après quatre reports, l’installation des autorités intérimaires de Tombouctou et de Taoudénit ont finalement eu lieu le 20 avril 2017. Boubacar Ould Hamadi, le président de l’autorité intérimaire de Tombouctou et celui de Taoudénit Hamoudi Ould Sidy Ahamed, ont été ainsi investis devant une forte délégation venue de Bamako. Le Congrès pour la Justice dans l’Azawad(CJA), un groupe politico-militaire, qui empêchait l’installation de ces autorités sans son implication dans le processus de paix, s’est finalement résigné. Ainsi, même si cela n’a pas été facile, toutes les régions du Nord du Mali sont, aujourd’hui, pourvues d’autorités intérimaires.
Un important pas vient donc d’être franchit dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali 22 mois après sa signature. Cependant, estime un membre du Comité du Suivi de l’Accord(CSA) sous le couvert de l’anonymat, « l’arbre ne doit pas cacher la forêt ». « D’abord voyons comment tout cela va être gérer. N’oubliez pas que malgré l’installation du président de l’autorité intérimaire de Kidal, le gouverneur de Kidal est toujours personne non grata dans la ville qu’il est supposé pourtant gouverné. Il y a encore beaucoup de choses qui coincent dans le fonctionnement de ces autorités », indique-t-il. Selon lui, « certes une étape cruciale vient d’être franchit, mais il ne faut pas crier tôt victoire tant que les groupes armés et le gouvernement n’auront pas fait preuve de bonne foi dans l’application de l’Accord ».
L’équation jihadiste demeure insoluble
Le gouvernement malien vient de proroger l’état d’urgence sur tout le territoire national et ce pour une durée de dix jours. « La situation sécuritaire au Mali et dans la sous-région reste caractérisée par la persistance de la menace terroriste ainsi que des risques d’atteinte grave à la sécurité des personnes et de leurs biens », a expliqué, le mercredi dernier, dans un communiqué, le gouvernement malien.
Cela fait presqu’une année et demi que le Mali vit sous état d’urgence, plus précisément depuis l’attaque jjihadiste contre l’hôtel Radisson Blu le 20 novembre 2015. Malgré que l’option de négocier avec les jihadistes maliens recommandée par Tiébilé Dramé, l’ex ministre malien des Affaires étrangères et Mahmoud Dicko, le président du Haut Conseil Islamique(HCI), soit entérinée par les conclusions de la Conférence d’Entente Nationale tenue à Bamako du 27 mars au 2 avril 2017, les attaques jihadistes continuent de plus belle au Mali.
Faut-il prendre très rapidement langue avec les jihadistes maliens ? Le gouvernement malien et la communauté internationale excluent encore cette éventualité. En entendant, les jihadistes continuent de harceler les militaires maliens, les casques bleus déployés au Mali et l’Opération française Barkhane. Pas plus tard que le mardi 18 avril 2016, le camp militaire de Gourma Rarhous, ville située à 130 kilomètres de Tombouctou, a été attaqué très tôt le matin. L’attaque revendiquée par Nusrat Al Islam Wal Islam, l’Alliance de groupes terroristes dirigée par Iyad Ag Ghaly a occasionné, selon le gouvernement malien, la mort de 5 soldats et une dizaine de blessés.
Le Centre du Mali n’est pas mieux loti. Dans son dernier rapport sur le Mali, Antonio Guterres, le secrétaire Général des Nations Unies indique : « les conditions de sécurité sont restées instables dans le nord et le centre du Mali, où les parties signataires ont continué d’être prises pour cible par les groupes terroristes et extrémistes violents. »
« Comme par le passé, les attaques contre les militaires français et les forces de la MINUSMA se sont poursuivies. Au total, le nombre d’attaques revendiquées par des groupes extrémistes violents a pratiquement triplé, passant de 28 en 2015 à 85 en 2016. L’insécurité s’est encore étendue dans les régions du centre, mettant en danger les civils. L’insécurité a provoqué le déplacement d’au moins 9 000 civils dans les régions de Mopti et de Ségou », déplore le secrétaire général des Nations Unies. OCHA, l'Agence des Nations Unies chargée de coordonner les actions humanitaires signale, aussi, que 10 000 personnes ont fuit les violences dans le Centre. En plus de la percée des jihadistes, on y assiste à des conflits récurrents entre les éleveurs Peuls et les cultivateurs Bambaras.
Madiassa Kaba Diakité