PolitiqueSoumaïla Cissé a la commission loi de l’assemblée nationale : «Nous sommes pour la révision constitutionnelle, mais le contexte n’est pas approprié»
Dans le cadre du projet de révision constitutionnelle, la Commission loi de l’Assemblée nationale a reçu le chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, le 20 avril pour recueillir son avis sur la question. A cette occasion, il s’est montré ouvert à l’évolution des textes avant de faire des réserves. Nous vous proposons les réponses qu’il a données à la Commission.
Après l’audition du chef de file de l’opposition sur le projet de révision constitutionnelle le 20 avril 2017 par la Commission loi de l’Assemblée nationale, nous avons contacté le Cabinet de l’opposition. Au cours de notre entretien, les conseillers techniques dudit Cabinet ont donné, dans les détails, cette rencontre.
En réponse à la question de l’appréciation qu’il fait de la révision de la Constitution du 25 février 1992, Soumaïla Cissé a affirmé que le monde évolue, les sociétés aussi. A ce titre, les textes doivent évoluer en fonction du temps. Une Constitution datant d’un quart de siècle doit être révisée, surtout dans le contexte actuel du Mali. Toutefois, souligne le patron de l’opposition politique, si cette révision est nécessaire, c’est le moment qui ne s’y prête pas.
Car, argumente-t-il, dans l’article 118 de la Constitution dispose que lorsqu’une partie du territoire est occupée, là où les symboles de l’Etat ne sont pas représentés, là où la sécurité n’est pas garantie, il n’est pas possible de convoquer une révision constitutionnelle. Et c’est le cas aujourd’hui au Mali. En proposant une révision constitutionnelle dans le contexte actuel, c’est une violation flagrante de la Constitution elle-même. Parce qu’elle va à l’encontre de la disposition susmentionnée. «Si la révision est nécessaire, demandée et souhaitée, le moment n’est pas propice parce que les conditions pour qu’elle soit adoptée en référendum ne sont pas réunies», a déclaré Soumaïla Cissé, selon ses conseillers.
S’agissant de la question de savoir si un candidat aux fonctions du Président de la République doit-il être de nationalité malienne d’origine ou simplement de nationalité malienne, Soumaïla Cissé a indiqué que la question est complexe. Mais, de son avis, dès que le candidat est malien d’origine, de facto il peut prétendre aux fonctions de Président de la République.
En ce qui concerne la prestation de serment du Président de la République devant la Cour constitutionnelle avant son entrée en fonction, M. Cissé a été on ne peut plus clair : «selon la hiérarchisation de nos institutions, la Cour suprême est au dessus de la Cour constitutionnelle. A ce niveau, le Président de la République doit continuer à prêter serment devant la Cour suprême».
Au sujet de la conduite de la politique de la nation par le Président de la République, Soumaïla Cissé a répondu favorablement. Estimant que c’est lui qui est élu sur la base de son projet de société. Sur cette base, la mise en route de sa politique, il l’a confie au Premier ministre pour l’exercer, mais en réalité c’est lui le responsable de cette République.
Quant à la suppression de la Haute cour de justice comme institution de la République, Soumaïla Cissé a jugé cette question sensible. Pour lui, cela nécessite un examen minutieux. Car, la Haute cour de la justice est une institution comme les autres. Il faudra voir son contenu, l’étendue de son pouvoir et sa formation.
L’autre sujet phare dans le projet de la nouvelle Constitution qui a fait aussi l’objet de critique du chef de file de l’opposition est la création d’un sénat. Dans son intervention, il a précisé que « l’institution d’un parlement bicaméral dans le contexte actuel du Mali n’est pas nécessaire. Parce que quant on prend le projet de Constitution lui-même, il donne des pouvoirs exorbitants au chef de l’Etat. Car c’est lui qui nomme le président de la Cour constitutionnelle, le Président de la Cour suprême, le Président du Sénat. Et puis, le Président de l’Assemblée nationale, comme on le sait, vient toujours de la majorité présidentielle. Donc, il a un ascendant sur toutes ces institutions.
Cela donne l’impression qu’on revenait à une monarchie. Parce qu’il n’y aura aucune institution qui pourra destituer le Président de la République. Ce n’est pas normal. Il faudrait qu’il y ait quelque part une institution qui puisse sanctionner le Président lorsque l’Assemblée aurait reconnu que le Président a commis des fautes lourdes…». Pour lui, il vaut mieux renforcer les capacités de l’Assemblée nationale. Car le nombre de députés est insuffisant, les dossiers sont trop importants. Aujourd’hui, il y a plus de 380 dossiers qui attendent d’être examinés. Au lieu de créer une deuxième chambre qui va surplomber l’Assemblée nationale, il serait mieux de donner plus de moyen à cette dernière. Et envisager la suppléance afin d’éviter les élections partielles à répétition.
Pour la mission d’évaluation de la politique publique du parlement, M. Cissé dira que cela cadre parfaitement avec le cadre organique du fonctionnement de l’Assemblée. Parce que le Président est tenu de venir justifier sa politique devant le parlement. Afin qu’il puisse être évalué.