La problématique de l’utilisation des ressources minières en Afrique a été au cœur d’un atelier de formation à l’intention des journalistes de 6 pays africains organisé par l’Institut de recherche et de promotion des alternatives en développement (Irpad) en partenariat avec Osiwa (Open society institute for west africa). L’atelier, qui s’est tenu les 26 et 27 avril, à Bamako, met les projecteurs sur les défis de l’information et de la formation à relever en Afrique. Le Mali, pays de tradition minière, a été donné en exemple. Il a réussi à collecter 1.099 milliards de FCfa des compagnies extractives entre 2011 et 2016, soit 20 % des ressources collectées par les sociétés minières.
A l’heure où le débat sur la nécessité de revoir les termes des contrats qui lient les multinationales aux pays africains est remis sur la table, le Mali, présenté comme le 3e producteur d’or en Afrique, derrière l’Afrique du sud et le Ghana, est en train de réfléchir sur les voies et moyens qui lui permettent une meilleure gestion de ses ressources naturelles en vue d’une amélioration durable des conditions de vie de ses populations. L’atelier de formation destiné aux médias de 6 pays africains a permis de s’imprégner des réalités au Mali qui a enregistré, ces dernières années, une contribution appréciable des compagnies minières, selon Mouhamed Lamine Samake, conseiller technique du ministre de l’Économie et des Finances du Mali, même si cela ne représente que 20 % des revenus miniers. La contribution des sociétés de télécommunication du Mali est plus importante que celle des sociétés extractives. Entre 2011 et 2016, les recettes collectées au profit du budget de l’État malien ont été estimées à 1.099 milliards de FCfa, avec des remboursements de crédits, des taxes sur la valeur ajoutée estimées à environ 400 milliards de FCfa pour la même période. Mouhamed Lamine Samake ajoute que ces prélèvements de l’ordre 1.499 milliards de FCfa représentent 18,63 % des prélèvements budgétaires sur la période, soit une moyenne annuelle de 22,95 %.
Les compagnies extractives ont également injecté, durant la même période, 18,898 milliards de FCfa aux collectivités locales. Divers fonds spéciaux dont le Fonds national de logement, le fonds d’appui à la formation professionnelle et à l’apprentissage ont bénéficié des retombées des industries minières. Pour Mouhamed Lamine Samake comme pour d’autres acteurs, il y a lieu d’accentuer les efforts en vue d’accroître les parts qui doivent revenir au gouvernement malien. Il a encouragé le gouvernement malien à dérouler, de nouveau, une batterie de mesures qui reposent sur une approche inclusive. Il a encouragé également les différentes structures intervenant dans le secteur à mutualiser leurs efforts, en vue de mettre en place un cadre institutionnel plus performant. Il s’y ajoute que le Mali souffre, à l’image de nombreux pays africains, d’un déficit de ressources humaines outillées techniquement, selon M. Samake. Ce manque de ressources humaines hautement qualifiées risque de s’accentuer avec les ingénieurs des mines qui sont admis à faire valoir leurs droits à la retraite d’ici à 2020. D’où, à ses yeux, l’impératif de renforcer les compétences techniques. Le conseiller technique du ministère de la communication, Gamard Diko a abondé dans le même sens.
Dans ce lot de contraintes, figurent également l’absence de motivation des acteurs tels les agents en service dans l’administration minière, la faible industrie locale de substitution aux importations de plusieurs intrants principaux, la faible capacité de la collecte et du traitement et de la diffusion de l’information. En dehors de l’insuffisance des infrastructures énergétiques de qualité, le Mali est également appelé à améliorer son cadre juridique et fiscal qui doit s’adapter aux mutations en cours.
Consolider le rôle des acteurs de la société civile
Mamadou Goita, le directeur exécutif de l’Irpad, initiateur de ce séminaire, a insisté sur le fait que la société civile qui s’est engagée dans une dynamique de construction des nations africaines, entend se donner à fond pour mettre les gouvernants sur la bonne trajectoire. Des initiatives seront multipliées pour les encourager à atteindre les objectifs de développement contenus dans l’agenda 2063 de l’Union africaine, mobiliser les ressources nécessaires qui aideront l’Afrique à s’appuyer sur ses fonds propres pour accélérer sa croissance économique et son développement.
Pour lui, la mise en œuvre de la vision minière africaine en vigueur depuis 2009, la publication du rapport Thabo Mbeki qui dénonce la fuite des capitaux vers l’étranger de l’ordre de 50 milliards de FCfa doivent inciter les États à donner de nouvelles orientations à leurs politiques nationales. En partenariat avec Osiwa et Trust Africa, l’Irpad, acteur de la société civile, est en train de développer des stratégies pour mobiliser les différents acteurs dans ce combat. Ils ont produit des études sur les flux financiers illicites en provenance de l’Afrique. Des études sur les cadres réglementaires et institutionnels de la gestion des ressources minières au Burkina Faso, en République de Guinée, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Sénégal ont également été réalisées. En tant que membre de l’initiative africaine sur les mines, l’environnement et la Société, les membres de l’Irpad cherchent, à travers des débats de fond, à sensibiliser les décideurs et les médias, à opérer des ruptures en consolidant le rôle et la place des acteurs de la société civile. Le partage équitable des ressources minières figure également dans leurs priorités.