Nous célébrons la presse cette semaine. En lieu et place de ce festin, la colère se lit sur les visages et les écrits des confrères. La presse au Mali, il n’en existe pas. Chacun se trace un chemin car les membres de la famille n’ont pas les mêmes objectifs. Au moment où certains se battent pour la corporation, pour l’unité, d’autres, principalement des décideurs, adoptent le célèbre principe : ‘’diviser pour mieux régner’’. Ils ont monnayé la profession. Ils sont à la solde des politiques et n’ont qu’un seul objectif : se faire de l’argent. Oui l’argent est le nerf de la guerre, mais la profession de journaliste doit répondre à certaines normes qui privilégient le choix du juste, du vrai quel qu’en soit le prix à payer. A travers le monde, des journalistes meurent pour le respect de ces valeurs.
Malheureusement au Mali, nous assistons à une nouvelle race de journalistes appelée le journalisme alimentaire. Des patrons de presse qui doivent revendiquer au nom de la presse, ont pris le goût de l’argent. Ils sont devenus des opérateurs économiques, des hommes d’affaires. Ils ne défendent plus la cause de la profession. Ils détournent les aides destinées à l’amélioration des conditions de vie de la presse. Ils se soucient peu de la sécurité des journalistes qui sont exposés à toutes sortes de danger : Des interpellations, des agressions parfois des disparitions. Ces dernières années, le tableau est sombre au Mali. Au-delà des agressions physiques, des journalistes reçoivent des menaces pour la simple raison qu’ils dénoncent des pratiques mafieuses devenues le quotidien de nos gouvernants. Leurs contrats sont résiliés avec des structures étatiques, les ondes des radios sont brouillées… et depuis plus d’une année, nous subissons un fait devenu insoutenable. Il s’agit de la disparition de notre confrère Birama Touré du journal ‘’Le Sphinx’’. Le régime n’a consenti aucun effort remarquable pour que nous puissions avoir de ses nouvelles. Au niveau de la presse, ce qui se passe est inadmissible. Pas de solidarité autour de la question. A part quelques journaux de la place qui évoquent le sujet, la grande majorité a oublié Birama. Nos responsables particulièrement les chefs des associations faitières sont passifs. Aucune décision forte afin de pousser le régime à nous dire où se trouve notre confrère. Alors que dans des circonstances pareilles, la première des choses devrait être une journée sans presse comme nous avons l’habitude de le faire pour soutenir des grands patrons de la presse agressés à un moment donné.
La presse quand on la choisit, c’est par amour. Mais cette vocation s’éteint à petit feu au Mali. La profession est devenue finalement passagère. Ceux qui accèdent une fois conscients des réalités précaires du milieu n’hésitent pas à partir lorsqu’une proposition plus meilleure se présente. Dans la famille de la presse, les journalistes et par-delà certains patrons de presse ne le cachent pas. ‘’ La presse malienne n’a pas de lendemain meilleur. Les décideurs, les chefs des associations faitières, ne défendent pas la cause de la profession et ils sont prêts à tout pour affaiblir la presse au profit de leurs intérêts égocentriques. Et tant qu’ils seront là, la presse mourra de sa belle mort tout doucement’’.
Malgré cette situation, certains journalistes tiennent. Ils se battent avec les moyens de bord pour sauver les missions régaliennes, essence du journalisme. Ils critiquent, proposent. Ce devoir républicain a fait d’eux, aux yeux de certains politiques et leurs fans aveuglés, des apatrides qu’il faut asphyxier à tout prix.
Nous subissons, mais nous résistons. Car la vie c’est un choix. La plume, elle est notre raison d’être et rien ne pourra nous dévier de ce chemin de carrière dans la profession. La plume ou rien. Cette façon de voir les choses nous renforce davantage tous les jours. Et nous mourrons plume dans la main tout en étant fidèles aux principes qui régissent la profession.