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IBK rattrapé par sa parole : « Un Chef d’Etat n’est pas un Chef de chantier »
Publié le jeudi 11 mai 2017  |  L’aube
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© aBamako.com par A.S
Lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita
Bamako, le 11 juin 2015, le CICB a abrité la cérémonie de lancement des festivités du centenaire du Président Modibo Keita, c`était sous la Haute présidence de SEM, Ibrahim Boubacar KEITA
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«Vous le voyez ; quel que soit le domaine que vous prenez, vous trouverez matière à préoccupation. L’emploi n’est pas assuré et, malgré toutes les campagnes médiatiques, il ne se crée pratiquement pas d’emplois dignes de ce nom. Les jeunes en sont revenus.
La sécurité n’est plus convenablement assurée : les braquages en plein jour, la criminalité, le banditisme sont devenus des motifs réels de préoccupation. La sécurité au sens général fait l’objet d’une quête permanente…». C’est là le constat (sombre) que l’on relève dans une grande interview accordée par IBK au journal «Construire l’Afrique», bimensuel de l’Afrique de l’ouest et du centre dans un numéro daté du 15 mars au 30 avril 2007. De la crise du nord à l’Accord d’Alger 2006, en passant par le cas de Kidal, la gouvernance, les nominations, les logements sociaux, les infrastructures sociales de base, les grandes réalisations, l’éducation, la santé, l’emploi, l’immigration clandestine, les tracteurs, l’opposition, la sécurité etc. IBK peint tout en noir en promettant de tout rendre rose, s’il est élu président de la République.

Ibrahim Boubacar Keïta se disait être le messie que les Maliens attendent, se fourvoyant d’un programme de société dans lequel il promet monts et merveilles à ses concitoyens. La réalité est là !



Construire l’Afrique : Que proposez-vous aux Maliens ?

Ibrahim Boubacar Keïta : La vérité ; regarder les choses en face, car il y a des problèmes et l’avenir du Mali est menacé.

L’Etat est désorganisé ; l’Administration est inefficace ; la plupart des Agents ne travaillent plus, car le mérite et la compétence ne sont pas reconnus ; il y a du désordre un peu partout. De ce fait, l’Etat est paralysé par des lourdeurs bureautiques.

Le secteur privé en prend, forcément, un coup et les résultats du pays, tout entier, sont en deçà de ce qu’ils auraient dû et pu être. C’est pourquoi, il faut réhabiliter le travail et faire de la compétence et du mérite, les principaux critères de nomination aux différents postes.
Nous voulons créer de nouvelles habitudes de travail et faire, du mérite et de la compétence, de nouveaux credo. Le népotisme qui a cours, actuellement, doit laisser la place à une nouvelle méthode d’accès à l’Administration et aux postes de responsabilités. Redresser l’Etat, lui rendre son crédit, son autorité et asseoir un véritable Etat de droit sont devenus indispensables.
Mais, j’ai, aujourd’hui, une préoccupation qui me tient à cœur : c’est l’Ecole. Car, vous ne pouvez pas parler aux cadres maliens, surtout de la génération actuelle, sans être effaré par leurs types d’expression ; l’écrit est encore pire ! Je vous assure que c’est grave.
Ce pays qui a fourni les meilleures élites à la sous-région, est à la traîne. Or, tout pays qui n’aura pas su soigner la qualité de ses ressources humaines ne sera pas convié au banquet de l’avenir.
Mes amis et moi, sommes conscients des grands enjeux et des grands défis à relever dans ce secteur.
Pour que l’enseignement soit meilleur, nous devons savoir apporter des réponses à la qualité du système éducatif ; à la pertinence des programmes ; à la revalorisation de la profession d’enseignant.
Au cours des cinq prochaines années, mon programme sera axé, si je suis élu, autour de la préoccupation majeure de l’éducation, car, c’est elle qui déterminera tout.
Le progrès et l’avenir du Mali reposent sur la réhabilitation de l’éducation; une bonne formation de nos enfants nous permettra de disposer de cadres compétents, qui auront l’avantage d’être formés sur place, dans notre environnement.

C’est ainsi que nous résoudrons donc le problème de la formation de nos enfants à l’étranger; ils n’auront plus de raison de s’y rendre. Une bonne éducation, prodiguée au Mali, permettra, également, de régler le problème de l’émigration ; car elle fera des Maliens, des créateurs de richesses, chez eux; ils seront plus aptes à entreprendre, ici, au Mali.

L’éducation nous permettra de résoudre, par ailleurs, les problèmes de la santé et de la jeunesse, notamment.

Elle sera donc la base de l’action du Gouvernement, pour refaire du Mali un centre d’excellence, en matière de savoir, comme il l’était avant l’indépendance. Bamako abritait, en effet, l’un des lycées les plus prestigieux de l’Afrique de l’Ouest, le lycée Terrasson de Fougères et la plus prestigieuse grande école, l’Ecole Fédérale des Travaux Publics de Bamako. En l’espace de cinq ans, le Mali, peut et doit devenir un centre de savoir de premier plan en Afrique de l’Ouest.

Nous ne voulons plus de ces situations, où les élèves ou les étudiants refusent d’aller à l’Université ; il faut qu’ils soient dans de meilleures conditions pour leurs études et leur travail. Nous ne voulons plus de cette situation, où les enseignants ne dispensent pas leurs cours, pour les mêmes raisons. Nous ne voulons plus de cette situation, où le sang coule à l’Université, et que justice ne soit pas rendue. Il ne s’agit pas de rendre l’école muette, de décréter la paix scolaire, pour se donner l’illusion d’avoir, désormais, une formation de qualité. Loin s’en faut !

Et c’est une véritable tragédie que notre pays vivra, si de véritables et profonds changements ne s’opèrent pas pour faire de l’école un véritable outil de préparation à la vie active et citoyenne ; l’école doit préparer les enfants à la rude et impitoyable compétition de la vie.
Pour cela, nous nous appuierons sur toutes les structures dont nous disposons et, aussi, sur les Medersas qui accueillent un nombre important d’élèves. Nous populariserons l’utilisation des nouvelles technologies et prendrons le raccourci grâce à l’ordinateur, à Internet et à la télé-Education.
Les mesures douanières et fiscales appropriées seront prises pour favoriser l’acquisition des ordinateurs et l’accès à Internet, par un plus grand nombre de Maliens : enfants, jeunes, comme adultes.

Si l’école malienne retrouve ses lettres de noblesses, nos enfants auront plaisir à étudier chez eux et à rester chez eux, au Mali.

Et la santé, l’emploi, ce sont, aussi, des priorités pour vous ?

Tout à fait et, à ce propos, je regrette que, par rapport aux pays de la sous-région, nous soyons bien en retard.

Il y a eu nombre de slogans comme “Santé pour tous”, gratuité de la césarienne, des ARV, entre autres. Avec l’aide internationale reçue, je crois qu’il était possible de faire plus et mieux.
Je me propose donc de lancer une grande bataille contre les grandes maladies. C’est un accompagnement indispensable à la promotion de l’éducation, c’est une priorité absolue.
Quand vous voyez que les jeunes qui n’ont commis aucun crime, sauf celui d’être dans un pays mal géré, parce que le Mali n’est pas un pays pauvre, mais pauvrement géré, ces jeunes de la rue s’adonnent à l’alcool pour oublier la faim et la misère.

Nous nous souvenons, encore, de la manière avec laquelle, Bamako a été saccagée, en une nuit, après un match de football, lorsque le Mali fut battu par le Togo. Quand vous voyez nos jeunes, nos neveux, nos fils, aller s’empaler aux grilles de Ceuta et Melilla au Maroc, tout homme digne de ce nom doit avoir mal à lui-même.

Vous le voyez ; quel que soit le domaine que vous prenez, vous trouverez matière à préoccupation. L’emploi n’est pas assuré et, malgré toutes les campagnes médiatiques, il ne se crée pratiquement pas d’emplois dignes de ce nom. Les jeunes en sont revenus.
La sécurité n’est plus convenablement assurée : les braquages en plein jour, la criminalité, le banditisme sont devenus des motifs réels de préoccupation. La sécurité au sens général fait l’objet d’une quête permanente. Sécurité des personnes et de leurs biens, sécurité alimentaire, sécurité routière. Des mesures spécifiques devront être prises pour endiguer le banditisme et l’incivisme florissants.

Ces mesures s’appuieront sur une bonne justice, gage de l’ancrage effectif de l’Etat de droit et de la démocratie dans notre pays.

Politiquement, le pays vit les travers d’un opportunisme et d’un affairisme jamais égalés; au point que toute liberté d’esprit, toute critique sérieuse, pour aider le régime à rectifier ces travers, soient devenues des crimes de lèse-majesté. L’indifférence des pouvoirs publics et le népotisme ambiant sont érigés en méthodes de gestion du pouvoir d’Etat.
Revenons à l’Accord d’Alger ; Qu’auriez-vous fait à la place du Président de la République ?
J’ai été Chef du Gouvernement, au plus fort de la crise du Nord ; je me suis immédiatement rendu sur le terrain, dans le Nord, au moment où le sang était encore frais ; j’ai vécu et partagé, sur place, la douleur des familles qui ont perdu un des leurs.

J’ai rencontré les insurgés et leur ai dit que, seul l’Etat avait le droit d’user de la force et, cela, dans des cas bien spécifiques ; que tout soulèvement d’éléments des Forces armées et de l’ordre était, pour moi, illégal et illicite. J’ai marqué ma détermination à combattre toute revendication faite en usant de la force et j’ai enjoint aux rebelles de déposer les armes.

Dans le cas présent de la récente mutinerie de Kidal, il n’était point nécessaire d’aller chercher la médiation d’un pays ami, de l’impliquer dans ce dossier et d’en faire une partie prenante, au point que le Comité de gestion et de suivi mis en place comprenne, outre les Représentants de l’Etat malien, ceux des mutins et du Médiateur étranger. En tant que Malien, drapé dans sa dignité, je me sens mal dans ma peau.

Nous avons tous constaté que nos dirigeants ont fait preuve de faiblesse et de manque de courage dans cette affaire ; ils n’ont pas réalisé que c’était là, l’occasion pour eux, de se mettre à la hauteur de leur mission historique, de garantir l’intégrité territoriale du pays et de mettre la Région de Kidal au même niveau de préoccupations que toutes les autres Régions du Mali.
En réalité, il y avait une crise de confiance entre les mutins du Nord et le pouvoir central ; les mutins n’ont pas cru à la volonté d’ATT de respecter sa parole ; à la veille de leur soulèvement, ils venaient, en effet, de quitter le Président de la République…

Le Mali a cette chance d’être une Nation depuis des temps très anciens ; c’est une Nation, historiquement fondée sur les bases d’une communauté de territoire, de langues, de vie économique et d’organisation sociale communes, qui se fondent dans une communauté de culture, de traditions et de partage.

Grand et vieux pays de l’Afrique Occidentale, carrefour de civilisations fondatrices d’entités prestigieuses, le Mali est constitué en Etat depuis le 11ème siècle, date de la création du premier Etat fondé et géré par des Africains. Ce fut l’empire du Ghana ; ce premier Etat africain et noir a émerveillé les historiens, par son haut degré d’organisation et sa place rapidement acquise dans le monde d’alors.

Ce sont, là, des atouts exceptionnels que nous devons savoir conserver, préserver et transmettre, de génération en génération.

C’est ce qui nous permet, chaque fois, de rebondir et de faire en sorte que tout problème soit pris en charge par les Maliens, en puisant dans nos valeurs communes.

Au Mali, nous devons donc arriver à résoudre nos problèmes et nos différends, dans le cadre d’un dialogue confiant ; ce qui a manqué entre les rebelles et ATT.

Dans cette affaire de Kidal, oui, je crois, que nos dirigeants ont fui leur responsabilité. Car, leur comportement remet en cause les fondements constitutionnels de la République, de même que les bases de l’équité et de l’équilibre entre les Régions.

ATT a quand même réussi la modernisation de l’agriculture …

Je l’ai dit ; on peut couvrir le pays de tracteurs, vous pouvez, en réalité, causer plus de dégâts que de bien ; car, quelque part, cela peut accélérer l’appauvrissement de la terre. C’est vrai ; la motorisation de l’agriculture a du bien, mais, il ne faut pas oublier qu’elle a ses règles; elle ne doit pas être lancée, tant que la phase de mécanisation n’est pas totalement maîtrisée par les paysans.
Quand vous remontez le cours de l’histoire récente du Mali et des pays voisins, vous vous rendrez compte que les défunts Présidents malien, Modibo Keïta et guinéen, Ahmed Sékou Touré, avaient, déjà, tenté cette expérience. L’utilisation des tracteurs a des avantages, mais aussi des coûts : la formation des paysans, l’achat du carburant, des pièces de rechange ; l’entretien de la machine ; et puis, il faut savoir conduire !

Le plus important pour moi, c’est de mesurer, aujourd’hui, à quel point le Mali est en train de devenir un désert ; la sécheresse sévit, partout.

Il suffit de survoler la zone de la boucle du Niger, pour s’en rendre compte. Le fleuve Niger est en train d’être envahi par le sable.

A l’époque, lorsque j’étais Premier ministre, j’avais tout fait pour freiner l’ensablement du fleuve Niger. Et, c’est la mort du fleuve qui est annoncée si rien n’est fait.

ATT a-t-il échoué?

ATT n’est manifestement pas un démocrate ; il ne peut pas consolider la démocratie malienne; c’est une erreur de le croire.

Il ne s’est, malheureusement, pas montré à la hauteur de la mission que nous attendions de lui.
ATT s’est contenté de faire comme disent les Américains du “One man show”. Il est seul et partout ! Il n’est que de regarder notre télévision nationale, pour se demander sous quels cieux nous nous trouvons.

Quelque part, cela peut se comprendre, puisqu’il n’a pas de parti politique qui puisse lui servir de relais ; son combat politique ne s’inscrit dans aucun cadre. C’est aussi, une défiance et un manque de confiance envers ses camarades ; alors, il fait tout, lui-même ; il va partout, lui-même!

Vous pouvez donc aligner le nombre de kilomètres de routes que vous voulez ; encore que vous n’avez pas inventé le fil à couper le beurre, car le PST, le Programme Sectoriel du Transport a tout prévu, dans ce domaine. Je dois, humblement, rappeler que mon Gouvernement avait négocié le PST avec la Banque mondiale.

Toutes les infrastructures réalisées s’inscrivent dans le cadre d’un programme préétabli, qui suit son cours normal ; les financements de certains projets sont mis en place depuis des années. Parlons des logements sociaux ; il y en a eu sous l’ère Konaré, mais il n’y a jamais eu de “Konarébougou” !

Or, là aussi, quand on fait croire, de manière patrimonialiste, que c’est dû à la générosité du Chef de l’Etat, ce qui est faux… on trompe, simplement, le peuple, ou, pire, on se trompe soi-même !

Vous savez, quand je vois tout le matraquage médiatique fait autour de ce projet de logements, je m’inquiète ; car ces logements ne sont tout juste bons que pour un ménage qui débute. Après 2 ou 3 enfants et la famille qui s’agrandit avec les proches parents (car nous sommes au Mali), il va falloir déménager et trouver plus grand encore, alors qu’on n’a même pas fini de rembourser la maison acquise. A mon sens, un Chef d’Etat n’est pas un Chef de chantier, comme nous le voyons aujourd’hui au Mali. Faire donc croire que les infrastructures actuellement réalisées (routes, ponts, barrages) ont été initiées depuis 2002, est simplement abuser des Maliens ; qu’on ne s’y trompe pas ; ceux-ci savent bien, que tous ces projets avaient été conçus sous le précédent régime. Ceci étant, je ne ferai pas un procès d’intention contre le pouvoir actuel, qui a su poursuivre la réalisation des chantiers ; le bilan doit, cependant, être partagé avec les initiateurs.

La Rédaction
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