De son arrivée à la tête de la transition malienne, le 12 avril 2012, à nos jours, Dioncounda Traoré a commis beaucoup d’erreurs et d’impairs dont votre bi hebdo s’est suffisamment fait l’écho. Mais, le président de la République par intérim n’avait jamais franchi le Rubicon de bâillonner ouvertement les libertés individuelles, telles que la liberté de la presse. Eh bien, c’est fait depuis le 6 mars, avec l’interpellation et l’incarcération du directeur de publication du journal « Le Républicain », Boukary Daou. En s’attaquant aux journalistes, Dioncounda se trompe-t-il d’adversaires ? Ou bien, fait-il preuve d’ingratitude avérée ? Nous disons, non seulement qu’il ignore à qui il a à faire.
Dioncounda Traoré a officiellement pris à son propre compte l’interpellation de notre confrère, sa détention dans les locaux de la Sécurité d’Etat et de la Brigade d’investigation judiciaire et ; éventuellement, son séjour en prison.
Dans le journal télévisé de l’Ortm du mercredi 13 mars, il a dit clairement : « …Nous voulons en savoir plus. S’il parle et qu’il n’y a rien derrière, il sera relaxé. Mais, si quelque chose se cache derrière, il sera mis à la disposition de la justice ».
Apparemment, c’est ce dernier cas qui se dessine, car la SE a transféré Daou à la Bij qui l’a entendu et retenu dans ses locaux. Comme attendu, la Bij l’a présenté, hier, devant le procureur de la commune IV.
Dioncounda aurait-il la mémoire courte en voulant coûte que coûte salir la dignité d’un journaliste, dans l’exercice de ses fonctions ?
Jamais, un président malien, plus que Dioncounda Traoré, n’a reçu autant de soutien et de sympathie de la part de la presse malienne. Du combat aux côtés de la Cedeao pour sa légitimation comme président par intérim à son agression dans ses bureaux jusqu’à son retour de Paris après sa guérison ; bref tout au long du processus de transition. Pour qu’il sorte la tête de l’eau, la presse malienne a constamment rappelé au président par intérim ses faiblesses et son manque de détermination vis-à-vis du capitaine de l’ex junte et de l’ancien Premier ministre Cheick Modibo Diarra afin qu’il se réveille pour reprendre les rênes du pays qui lui échappaient petit à petit.
Plus récemment encore, la presse malienne a salué, à sa juste valeur, l’intervention française au Mali et accompagne toujours les autorités militaires dans la diffusion (propagande ?) de l’information militaire. Que faire de plus ? Actuellement, il ne manque plus que le sang d’un journaliste malien pour la défense des intérêts de la patrie. Pour Dioncounda Traoré, voulons-nous dire.
Ce capital de sympathie des journalistes maliens pour leur président va désormais à l’eau, entraînant aussi la rupture d’avec tout ce qui rime avec pouvoir et institutions. Mais, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Dioncounda peut se ressaisir. Et il sait comment, quand et où tirer les cordes de cette seconde chance.