Les autorités de la transition au Mali ont finalement annulé la licence d’exploitation pour un 3e opérateur mobile au Mali, accordée jadis au consortium Planor-Cessé Komé- Monaco Télécom, pour défaillance du groupement, pour l’attribuer par entente directe au consortium Planor-Monaco Télécom International SA. Dessous d’une affaire aux relents d’injustice commise aux dépens d’un opérateur économique national.
Déjà accordée en 2012 à Alpha Telecom Mali, un consortium composé de Planor-Cesse Kome (l’homme d’affaires malien) et Monaco Télécom, la 3e licence de téléphonie globale au Mali a finalement été réattribuée en 2013, par entente directe, au consortium Planor-Monaco Télécom International SA pour un montant de 84 millions d’euros, soit plus de 55 milliards de F CFA. La société de droit malien pour le consortium porte le nom d’Alpha Télécom Mali SA. Le Malien Cessé Komé, précédemment associé au groupement, en est désormais exclu.
L’affaire fait couler beaucoup d’encre et de salive dans les milieux des affaires du pays où l’incompréhension le dispute à l’indignation. On ne comprend pas pourquoi ces temps-ci, où beaucoup de pays luttent pour l’émergence de leurs opérateurs économiques et n’hésitent pas à nationaliser les sociétés et entreprises d’Etat, au Mali, malgré le discours mielleux à l’endroit du secteur privé, on en soit encore là à écarter des nationaux au profit des étrangers.
Comme argument justificatif, le gouvernement indiquait lors du conseil de ministre extraordinaire qui a pris la décision, lourde de conséquences, que « face à la défaillance du groupement, le gouvernement a décidé d’annuler la procédure et d’attribuer la licence à un investisseur crédible dans les meilleurs délais et dans les conditions prévues par les textes relatifs à la passation des marchés publics ».
D’aucuns ont parlé d’un conflit entre le Burkinabé Apollinaire Compaoré, propriétaire de Planor, et le Malien Cessé Komé, tous deux actionnaires de la co-entreprise déclarée vainqueur de la 3e licence télécom au Mali en 2012. « Incapable de s’entendre, dit-on, les deux protagonistes étaient mis en demeure par Bamako de tenir leurs engagements financiers. En vain. Cessé Komé ne parvenant visiblement pas à rassembler les fonds nécessaires ».
Mais, en vérité, les choses ne sont pas dites dans leur réalité. En vérité, l’échéancier des paiements définis au moment de l’attribution de la licence n’a pas été respecté par Monaco Télécom International. Qu’a-t-on aussi fait de la clause de solidarité et d’indissociabilité qui liait Cessé Komé à ce partenaire ? Tous ces faits ont été pourtant signalés en son temps à qui de droit par l’avocat de Cessé Komé.
Flairant le coup, l’avocat avait écrit au Premier ministre le 5 novembre 2012 pour l’informer que son client était « inquiet des manœuvres entreprises et des agissements solitaires en cours, pour le mettre hors-jeu et, poursuivre l’adjudication dans des conditions non convenues au moment de la concurrence, mais tout à fait contraires à la loi et à la pratique en la matière ».
Dans cette lettre, l’avocat rappelait que son client était bel et bien adjudicataire provisoire de la 3e licence, qu’il participait au groupement Planor/Cesse Kome/Monaco Telecom à hauteur de 44 %.
Selon une source proche du dossier, l’échéancier des paiements définis au moment de l’attribution de la licence était que Monaco Télécom International s’acquitte de son engagement financier d’abord. C’est après cet acquittement de ce partenaire que Cessé Komé devait verser à son tour sa quote-part du marché.
Il semble que Monaco Télécom International n’a jamais respecté cet engagement et a préféré faire du cinéma. D’où l’incompréhension qu’est celle de Cessé Komé de voir l’Etat malien annuler la procédure avec le consortium initial pour attribuer la licence par entente directe au même consortium avec exclusion de la partie malienne.
Comme on le voit, des zones d’ombre demeurent et nous allons devoir procéder à des investigations plus poussées auprès des autorités compétentes dans les jours à venir pour répondre à autant d’interrogations que les gens ne cessent de se poser depuis l’attribution de cette 3e licence à Planor-Monaco Télécom International.
Qu’est-ce qui justifie la passation du marché de la 3e licence de téléphonie globale par entente directe ? Est-ce que le domaine des télécommunications peut-il faire l’objet d’une entente directe sans que les règles du code des marchés publics ne soient violées et sans que les autorités de la transition ne s’exposent à des poursuites sur la base du délit de favoritisme ? Comment peut-on passer le marché de la 3e licence de téléphonie globale à un membre d’un groupement dont la défaillance a été constatée et sanctionnée par l’annulation de l’adjudication provisoire ?
Des autorités du régime ATT à celles de la transition, quelles sont les personnes civiles ou militaires qui ont été impliquées, mêlées ou qui se sont compromises dans ce dossier par une intervention directe ou indirecte moyennant espèces sonnantes et trébuchantes ?