Non respect du Code des marchés publics, violation des dispositions relatives aux transferts et virements des crédits, attributions des avantages indus aux Vérificateur général à ses gardes du corps, paiement de dix factures non acquittées… Voilà, entre autres, des irrégularités révélées par la section des comptes de la Cour suprême sur la gestion financière du Bureau du Vérificateur général pour la période 2004-2010. Ces cas de mauvaise gestion sont consignés dans le troisième rapport de la section des comptes de la Cour suprême remis en début de semaine au président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta.
La section des comptes de la Cour suprême, dans son dernier rapport, a épinglé plusieurs structures pour des cas de mauvaise gestion. Parmi celle-ci, on peut citer le Bureau du vérificateur général, une structure chargée de contrôler la régularité et la sincérité des opérations de recettes et de dépenses effectuées par les institutions de la République, les administrateurs d’Etat, les collectivités territoriales ou tout autre organisme bénéficiant du concours financier de l’Etat. Curieusement, au regard de ce rapport, il ressort que la structure censée montrer la conduite à tenir quant à la bonne gestion des ressources financières n’est pas elle-même exempte de reproches.
Des avantages pécuniaires injustifiés de plus de 300 millions Fcfa accordés au personnel de sécurité
Dans le présent rapport, il a été révélé que le Bureau du Vérificateur général a procédé au virement de crédits de plusieurs millions de Fcfa du chapitre études et recherches sur le chapitre appui au comité de pilotage, sans en avoir la qualité. Il a été aussi découvert le paiement de 10 factures non acquittées d’un montant de 14 588 850 Fcfa en violation des dispositions de la loi N° 96-061 du 4 novembre 1996 portant principes fondamentaux de la comptabilité publique. Ce n’est pas tout. Plus de 26 millions de Fcfa de Tva ont été récoltés en 2006 par le Bureau du Vérificateur général, mais qui n’ont jamais été reversés aux impôts.
Autre violation constatée par la section des comptes de la Cour suprême, c’est la façon dont le Vérificateur lui-même et son adjoint ont bénéficié des soins à l’extérieur du pays. Il ressort que le contrôle médical du Vérificateur Sidi Sosso Diarra en 2008, dans un hôpital français, a été chiffré à plus de 15 millions Fcfa. Et le rapport poursuit que le “Vérificateur a violé les dispositions l’article 5 du décret du 29 mai 1969 qui réglemente les évacuations sanitaires lors de ce contrôle médical”.
Autre irrégularité constatée, c’est la violation du code des marchés publics à travers l’octroi d’un marché de près de 30 millions Fcfa au Cabinet GMI pour recenser le patrimoine foncier des sociétés de promotion immobilière et des promoteurs immobiliers pour la période de 1992 à 2005. “Ce marché a été attribué sur la base d’un simple contrat daté du 22 novembre 2004, sans appel à concurrence d’au moins de trois factures proforma” souligne le rapport.
Ce n’est pas tout. Le Vérificateur général aurait attribué à lui-même et à six de ces gardes du corps des indemnités faramineuses. Pour la petite histoire, le personnel de sécurité “a bénéficié d’indemnités forfaitaires d’un montant de total de 307 567 326 Fcfa. Dont 44 millions Fcfa de 2005 à 2006, 262 737 732 Fcfa de 2007 à 2010 par décision du Vérificateur général. Or ces indemnités ne sont pas conformes aux dispositions de l’ordonnance N°44 /Cmln du 11 août 1975 fixant les principes généraux des primes et indemnités allouées aux fonctionnaires et agents de l’Etat. Ces indemnités ont été aussi versées contrairement aux dispositions du décret N°O4-020/P-RM du 27 janvier 2004 “ rappelle le rapport.
Des marchés de près de 400 millions fractionnés
Dans ce rapport de 130 pages, il ressort aussi que des dépenses d’un montant de 385 567 799 FCFA ont été effectuées par le Vérificateur général sur la base de factures successives concernant les mêmes sociétés pour les mêmes objets. Dans ce registre, c’est le nom de Afric search, un cabinet de recrutement basé à Paris, qui est le plus souvent cité pour avoir bénéficié des marchés dépassant 120 millions Fcfa. Des dépenses jugées inopportunes par la section des comptes de la Cour suprême qui estime que la procédure réglementaire prévoyait explicitement l’intervention de la commission de recrutement.
Frais de téléphone
Il faut rappeler que malgré que le Vérificateur général bénéficie, entre autres, de primes et indemnités forfaitaires d’entretien mensuel de 400 000 Fcfa au titre de la consommation d’eau, d’électricité et de téléphone, le rapport révèle que Sidi Sosso Diarra a pris en charge sur les ressources du Bureau pour régler les frais de sa résidence privée de janvier à septembre 2008, pour un montant de 972 905 Fcfa.
En tout cas, pour la section des comptes de la Cour suprême, le Bureau du Vérificateur général ne peut se soustraire de la tenue de la comptabilité matière sous le sceau “d’autorité indépendante” et de “création récente” car il s’agit de fonds publics. C’est pourquoi, la section des comptes a recommandé le respect strict des dispositions des textes en vigueur en matière de tenue de la comptabilité matières.
Il faut rappeler que la section des comptes de la Cour suprême est la juridiction des comptes et la juridiction supérieure de contrôle des finances publiques. A cet égard, elle est compétente pour juger les comptes des comptables publics de l’Etat, des collectivités territoriales, des entreprises publiques à caractère administratif. Ce n’est pas tout. Elle vérifie la gestion financière des agents de l’ordre administratif chargé de l’exécution du budget national et des autres budgets. La Cour contrôle aussi les comptes de matière des comptables publics et examine la gestion financière et comptable des organismes dotés de la personnalité civile et de l’autonomie financière. Et dans lesquels, l’Etat ou les autres collectivités publiques ont un intérêt financier. Ce troisième rapport, élaboré en 2014 sous la conduite du président de la section des comptes de la Cour suprême, Kloussama Goïta, sous la supervision du président de la Cour suprême, Nouhoum Tapily, intervient après ceux de 2012 et 2013.