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Vote du projet de loi constitutionnelle à l’AN: le choc des arguments
Publié le lundi 5 juin 2017  |  Info Matin
Séance
© aBamako.com par A S
Séance Plénière à l`Assemblée Nationale du Mali
Séance plénière à l`Assemblée Nationale du Mali le 18 Mai 2017 pour l`adoption de la loi sur le statut Général des militaires.
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En fin de semaine dernière, l’actualité, dans notre pays, a été dominée par le vote du projet de loi portant révision constitutionnelle. Sur une vingtaine d’amendements ayant fait l’objet de débats à la plénière de l’Assemblée nationale, les deux fronts (l’opposition et la majorité présidentielle) n’ont pu s’accorder les violons sur un seul point. Au cours des débats, les deux camps ont fait prévaloir la force de leurs arguments avant le vote de la plénière sur lesdits amendements.

Parmi les 75 amendements de la commission des lois de l’Assemblée nationale, environ une vingtaine ont fait l’objet de débats contradictoires entre les députés de l’AN. Ces amendements se rapportaient à l’intérim du président de la république, à la nationalité du président de la république, à la destitution du président de la république en cas de manquement grave à des devoirs, à la préséance des institutions de la république, à la désignation du président de la Cour constitutionnelle, à la révision constitutionnelle, à la destitution du président de la république, entre autres.
Sur chacun de ces points, il y a une division profonde entre l’opposition et la majorité parlementaire.
De la vacance du pouvoir
Sur l’intérim du président de la république, l’opposition, à travers l’honorable Mody N’DIAYE, a proposé que ce soit le président du Senat qui assure l’intérim, en cas de vacance de pouvoir constatée par la Cour constitutionnelle. L’opposition soutient cet amendement aux motifs, d’une part, que les sénateurs sont l’émanation des collectivités territoriales et, d’autre part, que le Senat ne peut être dissout par le président de la république. Alors, soutient l’opposition, il n’est plus nécessaire de retenir le président de l’Assemblée nationale comme l’intérimaire du président de la république.
Un avis qui n’a pas du tout été partagé par la majorité présidentielle qui pense qu’il y a le risque qu’une personne sans légitimité devienne le président de la république par intérim. En effet, explique l’honorable Moussa TIMBINE, parmi les sénateurs, 1/3 seront désignés par le président de la république. Donc, schématise-t-il, à l’hypothèse qu’une personne désignée par le président soit à la tête du Senat. Ainsi, en cas de vacance de pouvoir c’est ce dernier qui risque de se retrouver président de la république sans aucune légitimité populaire.
Arguments contre arguments
« Nous voulons que l’intérimaire de la présidence soit une légitime. C’est pourquoi nous souhaitons qu’il faille rester dans la formule en vigueur en autorisant le président de l’Assemblée nationale à assurer l’intérim du président de la république du Mali », insiste-t-il. Cette proposition de l’opposition a été rejetée par la plénière.
Un autre point de divergence qui a fait l’objet d’amendement de la part de l’opposition a concerné la désignation du président de la Cour constitutionnelle. Parce qu’elle n’était pas d’avis que le président de la Cour constitutionnelle soit désigné par le président de la république. Elle estime que cela ne garantirait pas l’indépendance de cette institution vis-à-vis de la présidence. Pour cette raison, l’opposition souhaite que l’on reste dans le cadre de la constitution du 25 févier 1992 qui permet aux membres de la Cour constitutionnelle d’élire en leur sein un président.
Sur ce point, la majorité présidentielle pense au contraire qu’il faut revoir ces dispositions pour renforcer la cohésion, la complicité et la confiance entre les 9 sages de la Cour constitutionnelle. Selon l’honorable Zoumana N’Tji DOUMBIA, la pratique a montré que la désignation du président de la Cour constitutionnelle a presque toujours posé des problèmes entre les membres de ladite Cour. Des fois, cette désignation se fait sous haute tension, informe le président de la commission des lois. C’est pour éviter cette situation, argue-t-il, qu’il convient donner la latitude au président de la république de désigner le président de la Cour constitutionnelle. Sur ce point aussi l’opposition a été mise en minorité.
Révision constitutionnelle sans référendum
Alors que la majorité présidentielle soutenait la possibilité d’une révision constitutionnelle sans passer par le référendum, l’opposition tentait de faire valoir son désaccord en vain à ce principe qui retire au peuple sa souveraineté, selon Mody N’DIAYE.
Pour l’honorable Zoumana N’Tji DOUMBIA, l’objectif d’une telle approche soutenu par la majorité est de permettre à notre pays de faire des économies en temps et en argent quand il s’agit d’une simple révision constitutionnelle.
« Le Mali a l’une des constitutions les plus rigides. Elle a pour conséquence qu’on ne peut pas opérer même une simple modification dans le texte sans aller à un référendum. Or, l’organisation d’un référendum est très coûteuse et s’il faut, à chaque modification, faire recourir au référendum, ce sera trop en termes de dépenses pour notre pays. Je vous informe aussi que notre pays n’avait pas pu intégrer certaines exigences communautaires dans sa constitution, à cause de ce principe. Je prends pour exemple, la création de la Cour des comptes qui est une exigence de l’UEMOA. Aujourd’hui, le Mali est le dernier pays qui va intégrer les dispositions de la création de cette Cour dans sa constitution. Toutefois, je rassure l’opposition que les motifs de révision sans référendum sont encadrés. En effet, ils ne concerneront que certains points de la constitution », détaille-t-il.
De la destitution du président de la république
La destitution du président de la république a également été évoquée par l’opposition qui estime que le nouveau texte de la constitution doit intégrer des dispositions à partir desquelles, on peut démettre le président de la république en cas de manquements graves à ses devoirs.
« On ne doit pas laisser le temps à un chef de l’État malien de continuer sa mandature quand il commet des fautes de gouvernance et manque à ses devoirs », a déclaré l’honorable Mody N’DIAYE.
De son côté, la majorité dit ne pas partager cette proposition. Selon son porte-parole, l’honorable Zoumana N’Tji DOUMBIA, en prenant en compte cette dimension dans notre constitution, il s’agit de fragiliser le président de la république dans l’exercice de ses fonctions. La fonction de la présidence doit être mise au-dessus de la mêlée, estime-t-il, avant de déclarer : « en intégrant cette disposition dans la constitution, nous allons ouvrir la boîte à pandore ».
« Le Mali n’est pas le Brésil. Dans un pays où on dépose des motions de censure en toute circonstance, il n’est pas prudent d’autoriser la destitution du président de la république en exercice pour faute », a ridiculisé le président de la commission des lois qui précise par ailleurs que le président de la république, après ses fonctions présidentielles, est poursuivable en justice pour tout manquement à ses devoirs.

Violation de la loi du 25 février 1992 ?
Sur un autre registre, l’opposition toujours, à travers le député Mody N’DIAYE, a estimé que la révision en cours violait l’article 118 de la constitution du 25 février 1992 qui « interdit toute révision constitutionnelle lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire ». En effet, argumente-t-il, depuis quelque temps, il y a certaines localités qui échappent au contrôle du pouvoir central. Ce qui est la preuve, à son avis, que l’intégrité du territoire national est menacée.
Au nom de la majorité parlementaire, Zoumana N’Tji DOUMBIA rétorque : « il faut que Mody N’DIAYE fasse la part des choses entre la difficulté d’assurer la sécurité et l’atteinte à l’intégrité territoriale. À ce que je sache, le Mali n’est pas divisé. Il n’y a pas deux drapeaux sur le territoire national. Par ailleurs, je suis d’accord que nous avons des difficultés sécuritaires à résoudre, mais il n’y a pas une atteinte à l’intégrité de notre territoire ».
Les différents amendements, du moins ceux proposés par la majorité présidentielle, ont été approuvés et adoptés, à l’issue débats houleux. Toutefois, des propositions de l’opposition ayant fait l’objet de débats ont été rejetées par la plénière.

Par Sikou BAH
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