Bamako, 18 juin 2017 (AFP) - Une attaque jihadiste contre un lieu de
villégiature proche de Bamako fréquenté par des étrangers a fait deux morts
dimanche, dont une Franco-Gabonaise, mais une trentaine d’otages ont été
libérés lors de ce premier attentat anti-occidental depuis 2016 dans la
capitale malienne.
Le ratissage se poursuivait dans la soirée dans les environs pour retrouver
les assaillants, dont le nombre n’a pas été précisé.
La cible, le campement Kangaba, un agréable "ecolodge" et site de détente
situé à la périphérie de Bamako prisé des expatriés, fondé par un Français,
évoque d’autres sites attaqués par les groupes jihadistes du Sahel ces
dernières années, notamment la station balnéaire ivoirienne de Grand-Bassam
(mars 2016, 19 morts, dont huit étrangers).
"C’est une attaque jihadiste. Les forces spéciales maliennes sont
intervenues", a déclaré à l’AFP le ministre malien de la Sécurité, Salif
Traoré. Elles ont été appuyées dans leur assaut par les militaires de
l’opération française antijihadiste Barkhane et de la mission de l’ONU
(Minusma).
Au moins "32 otages" ont été libérés, a annoncé l’armée malienne dans un
communiqué, faisant état d’"un assaillant blessé qui s’est débarrassé de son
arme pistolet-mitrailleur".
Il a également laissé derrière lui "des bouteilles contenant des substances
explosives", selon le ministère de la Sécurité.
Une cliente franco-gabonaise est décédée à l’hôpital, et une autre personne
en cours d’identification a été tuée, selon la même source.
Parmi les personnes évacuées, dont plusieurs se trouvaient en maillot de
bain, certaines ont affirmé que les assaillants avaient crié "Allah akbar"
(Dieu est le plus grand).
Un témoin interrogé par la télévision publique ORTM a dit avoir vu arriver
un homme à moto qui a ensuite "commencé à tirer sur la foule", puis "deux ou
trois personnes" venues avec un autre véhicule.
Après avoir ratissé l’établissement "chambre par chambre", les forces de
sécurité poursuivaient leur traque des assaillants, selon le ministre de la
Sécurité.
Des riverains ont dit à l’AFP avoir entendu dans l’après-midi des coups de
feu en provenance du lieu attaqué. Une fumée s’élevait au-dessus du site, a
constaté un journaliste de l’AFP.
- Consignes de sécurité -
Le chef de l’Etat français Emmanuel Macron, attendu à Bamako le 2 juillet
pour le prochain sommet du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger,
Tchad), "suit de très près l’évolution de la situation", selon la présidence
française.
La dernière attaque jihadiste visant des Occidentaux dans la capitale
malienne remonte à mars 2016, contre l’hôtel Nord-Sud abritant la mission de
l’Union européenne qui entraîne l’armée malienne (EUTMMali) et a participé à
l’opération de dimanche. Un assaillant avait été tué.
Le 9 juin, l’ambassade des Etats-Unis avait publié une consigne de sécurité
à l’intention des citoyens américains les informant d’une "menace d’attaques
accrue" à Bamako dans les lieux fréquentés par les Occidentaux.
Dans une tribune publiée en janvier lors du sommet Afrique-France à Bamako,
le propriétaire du campement Kangaba, Hervé Depardieu, s’était insurgé contre
les alertes de sécurité des chancelleries occidentales, dont il dénonçait les
incohérences.
"Les consignes de sécurité alarmantes émises par le consulat et les
+conseils aux voyageurs+ dissuasifs du site du ministère (français) des
Affaires étrangères entament sérieusement notre joie de vivre et nos
libertés", déplorait-il.
Le Mali est sous état d’urgence quasiment sans interruption depuis
l’attentat contre l’hôtel Radisson Blu de Bamako le 20 novembre 2015, qui
avait fait 20 morts, outre ses deux auteurs.
L’attentat avait été revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi),
en coordination avec le groupe jihadiste de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar,
Al-Mourabitoune, qui avait scellé à cette occasion son ralliement à Aqmi.
En mars 2015, une attaque contre le restaurant-bar La Terrasse avait fait
cinq morts, dont deux Occidentaux.
Le nord du Mali était tombé au printemps 2012 sous la coupe de groupes
jihadistes liés à Al-Qaïda. Les jihadistes ont été en grande partie chassés de
cette région par une intervention militaire internationale lancée en janvier
2013 à l’initiative de la France, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes et
étrangères, régulièrement visées par des attaques meurtrières malgré la
signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix, censé isoler définitivement
les jihadistes, dont l’application accumule les retards.
Depuis 2015, ces attaques se sont étendues dans le centre et dans le sud du
pays, et le phénomène gagne les pays voisins, en particulier le Burkina Faso
et le Niger.
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