1- Il se peut que le report soit plus dû aux injonctions du Secrétaire Général des Nations Unis, sachant que sans la communauté internationale, pas de financement du référendum. Aussi, le gouvernement fait d’une pierre deux coups : il amadoue la communauté internationale par des concertations dont les résultats sont orientés, et laisse le temps aux mouvements contestataires de s’essouffler.
2- Le report signifie que le Président de la République nous a entendu et désavoue le gouvernement et l’Assemblée Nationale. Auquel cas, si la rumeur d’ajouts d’articles est fondée, plutôt que de demander la démission des ministres, la logique voudrait qu’il dissolve l’Assemblée qui serait responsable de voter la privation de nos libertés (article 143 nouveau) et la tenue d’un référendum anticonstitutionnel au regard de l’article 118 à son insu et au détriment du peuple.
3- Dans les deux cas, se réjouir trop vite conduirait à une victoire à la Pyrrhus, car le danger plane tant que le retrait n’est pas définitif. Aussi faut-il rester en alerte jusqu’à la date butoir. Pour l’heure, savourons modérément ce premier échec avant le mat final qui démontrera que le peuple uni est plus fort qu’une faction, tout en saluant la lucidité dont a fait montre le Chef de l’État, en espérant que cela soit le signe d’une réelle écoute et non d’une tactique.
En tout état de cause, puisque le projet n’est pas retiré, la mobilisation ne doit pas faiblir. Et paradoxalement, peut-être que ce projet contribuera à l’union puisque les Maliens de Kayes à Kidal sont unanimes pour dire qu’ils n’en veulent pas. Dieu veille.
Madani TALL
La première question de fond est : Pourquoi il y a un article 118 qui interdit une révision quand il y a perte de l’intégrité nationale ?
Cet article est prévu pour nous protéger contre la haute trahison, de notre propre lâcheté, de la lâcheté de nos dirigeants face à un adversaire qui après avoir conquis une partie du territoire voudrait imposer une révision qui ne relève pas de la volonté du peuple, mais de la crainte. Son but est donc de protéger les bases fondamentales du système étatique quand nous serons prêts à tout pour satisfaire ceux qui nous ont dominés, qu’ils soient de l’intérieur ou de l’extérieur.
Or, c’est le cas aujourd’hui, puisque la révision n’est pas justifiée par la volonté du peuple, mais par «la volonté de la communauté internationale et celle de l’Accord d’Alger» sans que même la population du nord en tire un bénéfice réel. Cet article est donc lié au cœur de la souveraineté nationale, car si l’intégrité du territoire n’est pas respectée au moment où la proposition de révision de la constitution est faite, il devient évident que les pressions exercées sur les assemblées parlementaires, sur le peuple, les institutions et le Président les empêchent d’exprimer librement leur volonté. Ce qui est le cas aujourd’hui. Et la première conséquence de la violation de cette condition est l’invalidité complète de la loi de révision constitutionnelle. Alors balayer l’article 118 d’un revers signifie justement que nos institutions ne contrôlent plus la situation. Sinon pourquoi, alors que l’on se dit patriote, dévaloriser un article qui justement protège la patrie ? L’article 118 est un pilier de la République, le minimiser est grave de conséquences. Dieu veille.