Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article
Société

Contribution : Le peuple a toujours raison
Publié le lundi 3 juillet 2017  |  L’Inter de Bamako
Comment


Aujourd’hui, ce n’est pas un combat des rebelles contre le Mali ou celui des terroristes-djihadistes, encore moins le complot d’une certaine communauté internationale, mais deux lignes en confrontation. Pour la gestion des affaires publiques, nous avons certes besoin de l’avis des experts, mais le peuple a aussi droit de donner le sien.
Que ce soit la question du rapport aux autorités intérimaires, que ce soit les polémiques autour de l’accord de paix, ou dans d’autres domaines de la gestion actuelle du Mali ; c’est plus que jamais le moment de dire la vérité et toute la vérité au peuple, car la diffusion de l’information vraie et plurielle avec des arguments exempts de toute démagogie qui éclairent le peuple est le socle de la démocratie.
Les représentants d’une partie importante de la société civile et de l’opposition républicaine ont enfin compris qu’il ne saurait y avoir de changement notable y compris en termes de droit démocratique sans un réel combat. Ils avaient compris depuis longtemps, mais cette fois-ci ils s’engagent enfin en sortant de l’hypocrisie qui consiste à dire qu’il faut faire confiance aux institutions, en la justice du pays même si l’on sait que celles-ci se penchent plutôt du côté des instructions du pouvoir exécutif et ses tenants.
En tant qu’observateur, acteur de terrain, je n’écris pas ces lignes pour dire ce que je pense, mais ce que je ressens par rapport à l’unité nationale rudement mise à mal par l’incurie généralisée des gouvernements successifs du président IBK, mais surtout par le projet de révision constitutionnelle qui divise profondément les Maliens dans leur ensemble.
Dans ce cas précis de référendum sur le projet de révision constitutionnelle, il est évident qu’il n’est pas possible d’organiser un scrutin dans plusieurs localités des régions de Tombouctou, Ménaka, Gao et Mopti pour la simple raison que les écoles dans lesquelles les opérations de vote se déroulent sont restées fermées pendant toute cette année scolaire 2017 pour cause d’insécurité.
Comment pourra-t-on organiser une élection dans ces zones de non-droit au-delà du cas spécifique de Kidal à propos duquel certains constitutionnalistes veulent nous faire croire que cette occupation de Kidal n’est pas l’œuvre d’une troupe étrangère, donc qu’elle ne remet aucunement pas en cause le fameux article 118 qui stipule l’impossibilité d’organiser un référendum tant qu’une partie du territoire national est occupé ?
En effet, l’opposition politique et la partie de société civile clairement opposées à la révision constitutionnelle, au sein de la plateforme dénommée AN TE A BANA, font tout pour éviter le piège qui consiste à dire naïvement qu’il faut manifester dans les urnes.
Au Mali, depuis 1997, avec les recours intempestifs auprès de la Cour constitutionnelle à l’issue des élections, les scrutins véritablement crédibles dans les faits sont extrêmement rares. En réalité, la démocratie bourgeoise s’est emparée des partis politiques, notamment ceux qui ont eu à gouverner, rendant l’alternance très difficile, voire impossible. Nous avons ainsi assisté à la clochardisation des hommes politiques de l’opposition.
Certaines personnalités comme Me Mountaga Tall, Dr Oumar Mariko, le feu Professeur Mamadou Lamine Traoré pour ne citer que ceux-là ont participé directement ou indirectement à différents gouvernements pour prendre leur part de gâteau histoire de renforcer leur formation, car ils se sont dit à un moment donné à quoi bon souffrir dans une opposition éternelle, sans victoire, ni dans les urnes, ni devant la Cour.
Cependant, nous n’avons jamais en mémoire en République du Mali, que la Cour constitutionnelle ait invalidé des voix ou une élection quelconque au détriment du parti présidentiel du moment. C’est pour insister sur le fait que jusqu’à quel point cette Cour constitutionnelle est presque la chasse gardée des princes du jour.
En dépit des multiples preuves tangibles de bourrages d’urnes, de fraudes et d’irrégularités flagrantes, les requêtes contre le parti présidentiel au Mali ont été toujours rejetées par la Cour Constitutionnelle. Par conséquent, nous déduisons que ce n’est pas à la faveur d’un référendum autour d’un texte bâclé à dessein que le droit sera dit au finish.
Le gouvernement s’est déjà rendu coupable d’une corruption flagrante en augmentant les primes des membres de la Cour Constitutionnelle sans qu’ils ne le réclament dans un contexte de contestation autour du projet de révision de la constitution validée par cette même cour.
Avant cette faute morale doublée du délit de corruption, il y a eu la violation flagrante de la loi sur le genre, avec une représentation des femmes au gouvernement en dessous de la norme édictée par la loi. Que peut-on espérer d’un chef d’État et de son gouvernement qui violent une loi votée par l’Assemblée nationale et qui se dédisent en permanence ?

Espoir et désespoir
Finalement, c’est le réveil du peuple après des années de léthargie et de méchanceté inutiles qui ont mis à mal la démocratie avec la parenthèse malheureuse du président ATT, même si ce dernier a énormément œuvré pour le pays en termes d’infrastructures et d’initiatives salutaires comme la mise en œuvre de l’Assurance Maladie obligatoire (AMO), l’introduction d’une identification numérisée de la population à travers le Recensement administratif à vocation d’état civil (Ravec), la construction du pôle universitaire de Kabala, la construction de nombreuses autres infrastructures routières, etc.
C’étaient quelques juristes moins regardants quant au devenir du Mali qui n’ont pas voulu dissuader le général ATT de rester en dehors du jeu politique comme une forme d’épée de Damoclès pour les gouvernants qui tenteraient de trahir le peuple en ne respectant pas les engagements démocratiques.
Au contraire, il a été encouragé par ces juristes à s’engager dans la politique et d’entrer en précampagne avant même de prendre sa retraite anticipée en tant que militaire.
Ainsi, ce militaire recyclé en homme politique deviendra président de la République dans des conditions troubles à l’issue d’une élection présidentielle fortement contestée. Il va ainsi lobotomiser les partis politiques de l’époque pour mettre à genoux démocratie dans une forme de consensus généralisé contre le peuple. La démocratie étant par principe la confrontation des idées et des idéologies le plus souvent antagonistes pour donner une orientation pratique à la gestion du pays une fois au pouvoir.
Quant au consensus, il est sans nul doute l’ennemi de la démocratie, car il est le terreau de l’hypocrisie, de la corruption et de la concussion généralisée, car tout le monde est d’accord avec tout le monde.
Aujourd’hui, les magistrats qui sont les fonctionnaires de l’État, certes payés par l’impôt du contribuable ont montré que l’on peut espérer d’eux. Ils l’ont d’ailleurs démontré par leur désapprobation du projet de la nouvelle constitution : le problème du Mali n’est pas que le droit ne soit pas dit, mais au contraire la question que l’on se pose, c’est quelle possibilité reste dans la mesure où les premiers défenseurs du droit brillent par leur absence dans les prétoires.
C’est énigmatique de voir qu’avec quatre (04) avocats dans le gouvernement dont 2 d’entre eux sont des instigateurs ou porte-flambeau de ce projet de révision, qu’une telle absurdité peut être proposée au référendum.
En plus, c’est vraiment inquiétant de voir le barreau malien sans réaction ferme et claire, comme s’il ne restait que des avocats d’affaires dans ce barreau censé être le chantre de la défense du peuple contre toute forme de dérive autocratique comme c’est le cas aujourd’hui.
Au Mali, le code électoral est fait de sorte que le président de la République est déjà une sorte de potentat qui manipule indirectement tous les rouages comme bon lui semble. En plus de la loi électorale, notre système est hyper présidentiel dans la mesure où le chef d’État concentre trop de pouvoir en étant à la fois le chef suprême de la magistrature et le chef suprême des armées. Alors, quel autre moyen pour le contrôler ou d’équilibrer son super pouvoir si ce n’est l’Assemblée nationale ?
L’Assemblée nationale, qui peut-être le contrepoids, a été au Mali depuis toujours majoritairement du camp présidentiel et toujours à sa solde. Cela s’explique par le fait que les députés de l’Assemblée nationale du Mali dans leur majorité sont élus, soit parce qu’ils bénéficient des grâces du président de la République, soit grâce à leur argent.
Rares sont les députés élus grâce à leur popularité ou leur ancrage politique sur le terrain auprès des populations ce qui explique qu’ils sont beaucoup plus enclins à répondre aux injonctions du président de la République qu’aux appels et souffrances de leurs électeurs.
Que dire alors d’un futur sénat dont un tiers des membres sera nommé par le président de la République ; qui aura théoriquement deux tiers (2/3) de ses membres acquis d’office au président de la République dans le pire des cas, sinon 80 à 90% en cas d’une alliance du parti présidentiel avec ses alliés partis politiques de la majorité présidentielle ?
Le clientélisme faisant qu’au Mali depuis l’avènement de la démocratie, le parti au pouvoir se retrouve systématique en tête de l’élection municipale en termes de nombre de conseillers élus au niveau national, avec le tiers de sénateurs nommés par le président de la République, l’on assistera à une situation avec chambre monocolore de représentants sans débat contradictoire sérieux. La fiction étant souvent plus difficile à réaliser que la réalité elle-même, le président de République n’hésiterait pas à piocher dans les couches de la société civile comme il l’a lui-même déjà annoncé avec l’exemple des chefs coutumiers-traditionnels, pour s’assurer d’un vivier électoral.
Faut-il rappeler que le socle d’une démocratie dépend de la force de la société civile si elle joue son rôle comme cela été toujours le cas aux États-Unis avec une société civile très forte et vigilante. Si les religieux, les agriculteurs, les commerçants et artisans, la jeunesse non partisane, les chefs coutumiers, les associations féminines non partisanes, certains milieux intellectuels indépendants, certains journalistes de la presse libre, etc., sont tous coptés par le président de la République pour constituer son Sénat, quel sera le pouvoir intermédiaire, celui de la rue, le contre-pouvoir non politisé du pays ?
En réalité, tout cela découle aussi de la clochardisation des travailleurs qui avec des salaires très précaires depuis des lustres dans une inflation galopante au service des seuls gouvernants et des élites et une certaine élite en connivence.
Au Mali, le cauchemar des cadres travaillant au sein de l’appareil d’état est le chômage, ils sont presque incapables de trouver un nouvel emploi en dehors de l’État. Ce qui fait changer de veste est monnaie courante, ou regarder dans la même direction que le pouvoir en place le plus souvent contre son gré.
Les États-Unis sont souvent cités comme étant l’une des nations n’ayant jamais changé de Constitution tout le simplement parce que le sacro-saint équilibre des pouvoirs a été respecté, depuis mars 1789, jusqu’à nos jours. Ce caractère inamovible de la constitution américaine témoigne du sérieux et de la puissance méritée de ce pays ainsi que de la solidité de ses institutions.
Les exemples les plus récents de cet équilibre entre les pouvoirs aux États-Unis sont entre autres le fait que le décret anti immigration du président Trump soit retoqué par un juge ou encore qu’un directeur national tienne tête au président, en l’occurrence celui du FBI. Cette force des États-Unis réside dans leur capacité d’organisation et leur cohérence quant aux choix économiques faits pour les citoyens, par exemple le marché du travail américain est aussi flexible que la constitution, ce qui permet un équilibre solide dans la vie quotidienne de la population.

Qui paye pour les élections ?
Jeunesse du Mali, votre engagement à défendre vos droits est plus que respectable, il le devient davantage lorsque on se poser la question de savoir qui paye. La communauté internationale prête de l’argent au Mali pour l’organisation de différents scrutins, ce qui fait que nous devenons de plus en plus dépendants de cette communauté internationale et feignons d’ignorer des pans entiers de notre souveraineté nationale en arguant que ce sont des injonctions de la communauté internationale.
Au cas le gouvernement accepterait de reculer en concédant les amendements essentiels, pourquoi ne pas coupler ce référendum aux régionales annoncées pour le dernier trimestre, ce qui allégera substantiellement la facture qui sera payée par la jeunesse active aujourd’hui et demain bien que ces dettes souvent injustes soient contractées par nos dirigeants actuels véreux avec une communauté internationale incommode.
C’est pourquoi cette jeunesse engagée du Mali va se battre sans discontinuer ni attendre de recevoir d’ordre de qui que ce soit pour le défendre l’unité nationale et par ricochet sa constitution.
Comment sauver ce qui reste de l’unité nationale ?
L’unité nationale au lieu d’unir tous les Maliens est aujourd’hui synonyme de la division aux yeux de certains concitoyens qui ont toujours travaillé dur sans vivre décemment du fruit de leur labeur: l’intégration de certains dans le gouvernement ou d’autres postes de la fonction publique qui est précédée par une rébellion, l’actuelle organisation de nos sociétés en communautés fondées sur les branches d’une religion, certains responsables qui tiennent des propos qui mettent à mal la laïcité dans son esprit, etc.
L’appel à l’unité nationale est plus que nécessaire pour sauvegarder la paix civile face aux menaces de déchirure, notamment dans le contexte d’une poussée des attaques et agressions spontanées souvent d’origine ethnico-politico-religieuse. Elle doit exprimer l’existence d’un peuple malien.
L’unité nationale reste le ferment d’une stabilité surtout pour éclaircir l’horizon d’un avenir proche assez assombri par les événements qui se suivent. Elle est en elle-même mobilisatrice, elle évoque la paix, l’efficacité, la force d’un pays qui veut se mettre en ordre de bataille pour se développer. Tout cela le président de la République doit entendre et comprendre se saisir avant qu’il ne soit trop tard pour lui et pour le Mali.
L’unité nationale n’a de sens que si elle trouve une traduction dans la réalité avec des actes visibles par le peuple. Elle doit être accompagnée de décisions réelles, d’une politique qui répond à l’attente de la nation dans son ensemble. En vérité, les Maliens, dans leur grande majorité, ont toujours été unis sur les grandes priorités du pays.
L’union nationale doit s’exprimer par une politique qui transforme la vie des Maliens en leur donnant accès au minimum vital, en protégeant les citoyens dans tous les sens. Il est toujours intéressant d’évoquer l’histoire, car elle nous permet de réfléchir sur la nécessité de regarder en arrière et de nous ressaisir. Car l’appel à l’union nationale ne doit pas rester dans des discours et des symboles, elle doit se traduire dans les actes.
Pour que l’unité nationale soit réelle dans les faits, il doit y avoir une politique concrète mobilisant tout le pays, plus particulièrement sa jeunesse qui est la couche la plus active au sens propre comme au figuré. Il est vrai que, quand le pays se trouve dans une situation de désarroi et d’impuissance face aux agressions et incertitudes comme c’est le cas aujourd’hui, quand les crises s’amplifient, l’unité nationale devient plus que jamais nécessaire pour sauver le pays.
Elle ne peut se limiter à une posture politique, elle ne doit pas être mise à mal, en refusant d’adopter une politique d’émancipation économique claire, de décisions qui vont dans le sens du progrès d’un Mali prospère et libéré.
Sidylamine BAGAYOKO
Université des lettres et des sciences humaines de Bamako
Commentaires

Sondage
Nous suivre
Nos réseaux sociaux

Comment