Après une grande marche pacifique de protestation organisée le 17 juin dernier, la Plateforme « An tè, A bana : Touche pas à ma constitution ! » qui regroupe plus de 100 associations de la société civile, des organisations syndicales et une quarantaine de partis politiques, a organisé le samedi 1er juillet 2017, un grand meeting à la place du cinquantenaire de Bamako, sis à Hamdallaye ACI 2000 pour exiger le retrait pur et simple du texte en sa forme actuelle afin de pouvoir procéder à l’ouverture d’une large concertation des Forces Vives de la Nation en vue d’aboutir à l’adoption d’un texte consensuel.
Vêtus en rouge et en blanc, des milliers de personnes ont pris part à ce grand meeting organisé par la Plateforme « An tè, A bana : Touche pas à ma constitution ! ». Pratiquement tous les barons de l’opposition, les membres de la société civile, les leaders religieux, les syndicalistes, les organisations féminines, les organisations de jeunes ont répondu présents.
On peut en citer quelques-uns, entre autres, le chef de file de l’opposition, l’honorable Soumaïla Cissé non moins président de l’Urd, le président du Parti pour la renaissance nationale (Parena), Tiébilé Dramé, les anciens Premiers ministres du Mali, Soumana Sako et Modibo Sidibé, la présidente de la Plateforme « An tè, A bana : Touche pas à ma constitution ! », Mme Sy Kadiatou Sow, l’honorable Mody N’Diaye de l’Urd, Nouhoum Togo du Pdes, Souleymane Koné des Fare An Ka wuli, Me Amidou Diabaté, Djiguiba Keïta alias PPR du Parena, les honorables Amadou Thiam, Oumar Mariko du groupe parlementaire Adp-Maliba/ Sadi, l’imam Chouala Bayaya Haïdara, le secrétaire général de la CSTM, Hammadou Amion Guindo, le chroniqueur Ras Bath, des responsables de partis politiques comme Madani Tall, Daba Diawara, Hammadoun Dicko, les leaders du Mouvement « Trop c’est trop » dont Amara Sidibé et bien d’autres.
C’est un peu plus de 10h que les travaux ont commencé avec l’exécution de l’hymne national du Mali. On pouvait lire sur les banderoles : « An tè, A bana : Touche pas à ma constitution ! », « Non à l’arrogance, aux mépris », « IBK, ne confondez pas la monarchie et la République», «IBK, carton rouge ».
L’honorable Soumaïla Cissé, chef de file de l’opposition, exige des concertations entre les Forces Vives de la Nation avant toute révision constitutionnelle. « Durant 4 ans, le président IBK n’a pas pu se rendre à Kidal ni à Tombouctou. A cause de l’insécurité, le référendum ne peut pas se tenir partout au Mali. Malgré l’accord d’Alger, l’installation des Autorités intérimaire, la tenue de la conférence d’entente nationale, il n’y a pas eu de paix. On dit que cette révision constitutionnelle est faite pour la paix, ce n’est pas sûr. Il y a eu 4 ans de mensonge. On ne construit pas le pays sur la base du mensonge », a martelé le chef de file de l’opposition.
Pour le président du Parti pour la renaissance nationale (Parena), Tiébilé Dramé, la Plateforme ne veut pas le report, ni une deuxième relecture du texte par l’Assemblée nationale mais que la constitution du 25 février 1992 reste intacte. « Cette mobilisation prouve que les Maliens sont contre cette révision constitutionnelle. On veut le retrait pur et simple du texte », a-t-il déclaré.
« Ils veulent institués une monarchie héréditaire de droit supra constitutionnel à durée indéterminée », dira pour sa part l’ancien Premier ministre Soumana Sako, qui appelle au retrait pur et simple du texte qui, selon lui, a été refait à plus d’un million d’euro en France.
Le chroniqueur Ras Bath, a davantage enfoncé le clou en disant que le projet ouvrira le code du mariage et la porte à l’homosexualité. Pour boucler la boucle, la présidente de la Plateforme « An tè, A bana : Touche pas à ma constitution ! », Mme Sy Kadiatou Sow a remercié tout le monde pour la forte mobilisation.
Mais à ces cris de cœur de ses concitoyens, le Président IBK semble sourd, lorsqu’il déclare : «Si je retire le projet de révision constitutionnelle, je trahirais mon pays…. ». Pour lui, il faut respecter la mise en œuvre de l’Accord signé par le Mali. La question est : de quel peuple IBK prétend trahir en abandonnant son projet de révision constitutionnelle ?
Réactions des manifestants au meeting contre la révision constitutionnelle
Djiguiba Keita dit PPR, PARENA : « La Plateforme va rester vigilante »
« Ma présence c’est pour répondre à l’appel du Mali, l’appel du peuple du 26 mars, l’appel des martyrs qui, du fond de leurs tombes, sont inquiets de la révision monarchique qu’on veut imposer à leur Constitution. C’est pourquoi je suis là pour demander au président de la République le retrait pur et simple de la loi de révision constitutionnelle. La Plateforme va rester vigilante jusqu’à ce que le président de la République retire la loi de révision constitutionnelle ».
Nouhoum Togo, PDES : « Nous tenons jusqu’à présent notre position »
«Il y a eu le report, parce que nos hommes ont fait un travail impeccable. Il s’agit de nos députés au niveau de l’Assemblée nationale. Ils ont déposé un recours au niveau de la Cour constitutionnelle et en même temps nous avons marché. Ces deux scénarios nous poussaient à travailler pour que le président de la République accepte de retirer simplement la révision constitutionnelle mais il ne l’a pas fait. Le président de la République est sorti à la télé, il a dit à l’opinion nationale que s’ils ont un peu reculé, c’est dû à ce dépôt au niveau de la Cour constitutionnelle.
Alors nous avons dit comme il y a eu d’autres circonstances qui sont entrées en jeu, il s’agit de l’arrivée de Macron qui est l’un des préalables au niveau de la gestion de la crise du nord du Mali. La bande sahélo-saharienne, comme vous le savez, est en proie à l’insécurité, avec l’arrivée de Macron qui se rend à Bamako avec l’histoire du G5 Sahel pour parler de l’insécurité du Mali ou de la bande sahélo-saharienne pour essayer de mettre un scénario qui arrive à gérer et imposer le combat contre le terrorisme au nord du Mali… Alors compte tenu de ces préoccupations, nous avons voulu délocaliser et annuler la marche et la transformer en meeting.
Le meeting devait se tenir à la Bourse du travail mais nous avons fait déplacer le meeting jusqu’à nous cloitrer dans l’ACI pour éviter des désagréments. Le patriotisme, l’engagement, le nationalisme nous ont poussés à faire ce travail de fond, mais soudain le gouverneur nous a appelés hier (Ndlr, vendredi 30 juin 2017) pour demander de reporter la marche. On nous a envoyé au visage deux arguments, premièrement en nous disant qu’il y a l’Etat d’urgence et qu’eux ils ne peuvent pas sécuriser. Nous avons dit que nous-mêmes nous allons sécuriser le meeting.
Ils sont partis plus loin, ils ont même fait des communiqués à l’ORTM à notre nom. Nous tenons jusqu’à présent notre position parce qu’en 1991 il y a eu un consensus pour aller vers la Constitution du 25 février 1992. Il y a eu des morts d’homme. Aujourd’hui, la révision constitutionnelle de Ibrahim Boubacar Keita est en train de diviser même les « Grin », les familles, tout le monde. IBK n’a pas la capacité de faire en sorte que la paix soit au Mali, mais s’il continue de diviser nous nous battrons contre ce principe là ».
Ousmane Amion Guindo, CSTM : « Ce n’est pas un projet du Mali »
«Le nombre de personnes qui se sont mobilisées pour venir ici ce matin montre que le meeting est une réussite. Au regard des dispositions prises par le gouvernement pour que nous ne puissions pas venir ici, qu’il y ait ce monde, à mon avis ce que nous avons fait est un grand évènement. Ce que je veux dire au nom de la CSTM, c’est que nous avons lu le projet de Constitution. Ce projet n’est pas bon pour le Mali.
Nous avons dit à nos représentants dans toutes les régions et dans tous les cercles du Mali de ne pas accepter que ce référendum soit tenu au Mali parce qu’il va détruire le Mali. Nous avons aussi écrit au président de la République pour qu’il retire son projet. Ce n’est pas un projet du Mali. Il doit aussi savoir qu’il est le président, le gardien de la Constitution. On ne lui a pas dit qu’il peut faire de la Constitution ce qu’il veut. Nous devons nous engager partout au Mali pour qu’il n’y ait même pas un vote sur ce projet de constitution ».
Soumaila Cissé, Chef de file de l’opposition : «Jeunes du Mali, nous sommes fiers de vous »
« Jeunes du Mali, qu’est ce qu’une Constitution? La Constitution est un héritage, tout le monde doit être consulté. Ce que IBK et ses camarades veulent, c’est que la Constitution puisse être changée par le parlement seulement. Le référendum ne pourra pas se tenir partout sur le territoire national. Le Mali ne saurait être construit sur la base du mensonge. On a dit que les jeunes du Mali ne sont pas à la hauteur, qu’ils ne peuvent pas faire ce qui a été fait au Burkina et au Sénégal. Jeunes du Mali, nous sommes fiers de vous»
Tiébilé Dramé, président du PARENA : « Restons mobilisés tant qu’ils ne renoncent pas »
« Si nous nous couchons, si nous restons les bras croisés, nous allons mourir. Si nous restons immobiles, ils vont complètement détruire ce pays. La mobilisation d’aujourd’hui montre que les Maliens ne veulent pas que certains détruisent le Mali en étant spectateurs. Fabriquer une Constitution en France pour l’imposer aux Maliens, on ne veut pas de cela. Qu’ils retournent avec la Constitution à l’endroit où ils sont allés la chercher. Retrait pur et simple ; pas de deuxième lecture, pas de report. Restons mobilisés tant qu’ils ne renoncent pas ».
Ras Bath, chroniqueur : « Si ce projet passe, il ouvrira le code du mariage… »
« Je tiens publiquement à dire ceci. La Constitution concoctée par Ladji Bourama, la Constitution de Dianfa Manassa, la Constitution de Kassoum Tipo Tipo…Au préambule, il est écrit que le peuple malien proclame qu’il accepte de travailler avec les instruments juridiques internationaux dont les instruments de la charte africaine des droits de l’homme. La résolution 275 prise en 2014 stipule que tous les Etats africains s’engagent à défendre les personnes contre les violences pour leur identité ou leur orientation sexuelle réelle ou supposée. Si ce projet passe, il ouvrira le code de mariage à deux personnes et non l’homme et la femme ».