Dans un communiqué dont nous avons reçu copie, la plateforme « An tè, A Bana » s’inquiète de la détérioration constante des droits de l’Homme dans le pays. Aussi, cette plateforme, qui s’oppose à la révision constitutionnelle, interpelle les associations de défense des droits de l’Homme et l’opinion internationale. Voici le communiqué.
La Plateforme « Antè A Bana, Touche pas à ma Constitution ! » informe l’opinion nationale et internationale des risques accrus de violations des Droits de l’Homme en République du Mali. En effet, depuis la constitution de notre regroupement d’associations, de syndicats, de leaders d’opinion et de partis politiques, consécutif à l’adoption par les députés de la Majorité du Président Ibrahim Boubacar Keita de la loi référendaire, les intimidations et les menaces se multiplient pour empêcher nos membres d’exprimer librement leur opinion sur le projet de révision constitutionnelle.
Depuis l’adoption de ce texte par les députés de la Majorité Présidentielle, les atteintes aux libertés fondamentales se sont multipliées. En l’occurrence, elles ont débuté le Jeudi 8 Juin 2017 avec la répression de la marche organisée par le Mouvement « Trop c’est trop » devant la Bourse du Travail. A la suite de cette répression, le Samedi 10 Juin, les maliens ont constaté l’interruption inexpliquée des réseaux sociaux (Facebook et Twitter) qui coïncidait avec les appels à la mobilisation lancés par nos membres pour une marche pacifique le Samedi 17 Juin contre la révision de la Constitution du Mali.
A l’heure actuelle, malgré les explications confuses des autorités tendant à nier toute responsabilité dans l’interruption des réseaux sociaux, nous continuons à croire qu’il s’agit bien d’une manœuvre orchestrée pour museler les maliens. En effet, ni Facebook, ni Twitter, ni les opérateurs internet n’ont reconnu de perturbation relevant de leur responsabilité au Mali. Face à cette première violation par les autorités du droit à l’information, de la liberté d’association et de réunion, les maliens se sont organisés comme ils le pouvaient pour contourner le blocage.
A la veille de la marche du Samedi 17 Juin, nous avions commis trois (3) de nos porte-parole pour animer une émission sur les ondes de la radio –renouveau FM- sur le sujet de la révision constitutionnelle. A nouveau, de manière inexpliquée, alors que cela ne s’était jamais produit auparavant, les ondes ont été brouillées à plusieurs reprises. Or, lorsque les partisans de la révision s’exprime sur les radios ou à la télévision nationale, aucun brouillage ne se produit.
De la même manière, le Vendredi 23 Juin, sur le plateau du Journal de 20h de la télévision d’Etat (ORTM), le Ministre de la Réforme de l’Etat s’est lancé dans une longue diatribe à l’encontre de nos membres, qualifiant notamment la marche du 17 juin «d’antipatriotique, antidémocratique, antirépublicaine ». A ces propos, la Plateforme a demandé un droit de réponse qui lui a été refusé par la direction de l’ORTM. Plus encore, la télévision nationale a refusé catégoriquement de recevoir le communiqué que nous avions rédigé.
A présent, la répression, les intimidations et les menaces ont atteint un niveau supplémentaire avec des tentatives d’agression et l’entrave à la libre-circulation par des groupes d’individus, assimilables à des milices, à l’entrée de villes ou nos représentants souhaitent se rendre pour animer des conférences sur le projet de révision constitutionnelle.
En effet, le Mercredi 28 Juin, une délégation de la Plateforme se rendant à Fana a été victime d’intimidations de la part des autorités préfectorales. De la même manière, le vendredi 30 juin, une autre délégation de la Plateforme se rendant à Banamba, conduite par un autre porte-parole, s’est vu refuser la tenue d’une conférence sur la révision de la Constitution par les autorités locales.
Le commandant de la brigade de gendarmerie de la localité a suivi la délégation dans chacune de ses visites de courtoisie aux autorités traditionnelles et coutumières, insultant chaque membre de la délégation et les menaçant d’arrestation. Le Préfet a ensuite rédigé une correspondance confidentielle à la Mairie de Banamba interdisant la tenue de la conférence en invoquant le motif de l’état d’urgence alors qu’une conférence similaire a été organisée par les députés de la Majorité Présidentielle dans les mêmes conditions.
Plus récemment, le Dimanche 2 Juillet, une délégation de la Plateforme se rendant à Bougouni, conduite par l’un de nos porte-parole, a dû rebrousser chemin sous la menace de groupes d’individus armés d’armes blanches. Ces « miliciens » se réclamaient du « camp » de plusieurs hommes politiques de la Majorité Présidentielle. Ces « miliciens », au mépris des forces de l’ordre, ont tenu le poste de contrôle de la ville et procédé à des fouilles des véhicules pour « débusquer » nos représentants.
La Plateforme prend à témoin l’ensemble des organisations de défense des Droits de l’Homme et la Communauté Internationale sur la situation inquiétante du pays à l’approche d’une tentative de révision constitutionnelle largement contestée.
La Plateforme réaffirme sa détermination à poursuivre ses efforts en vue d’obtenir le retrait de ce projet controversé de révision constitutionnelle. Par ailleurs, la Plateforme refuse de se faire priver des droits et libertés fondamentales consacrées dans la Constitution de Février 1992.
Bamako, le Mardi 4 Juillet 2017
Pour la Plateforme,
P/O La Présidente
Mme SY Kadiatou SOW