“Le Corps social, même non mobilisé par un enjeu particulier, est sans cesse travaillé par des contradictions internes qui enfantent le changement tout en ménageant une part de conservatismes, propres à chaque spécificité sociétale. Lequel changement opère par plusieurs biais, plusieurs leviers. Aucune société n’est statique, le mouvement constitue une loi vitale. De même pour les Constitutions, filles du temps, non momies mais devant être révisées avec le CONSENSUS NÉCESSAIRE, car une Constitution doit tisser, unir et aider la société à mieux se “tenir debout”. L’Etat même a quelque chose à voir, du point de vue sémantique, avec les verbes “tenir” ou “stabiliser”.
Quant à l’actuelle révision constitutionnelle, la dynamique sociale demeure complexe autant que les enjeux et les acteurs “pluralisés”. Aux soupçons de “politisation” du droit constitutionnel se mêlent des inquiétudes liées aux perspectives politiques. Ainsi, entre bonne foi et soupçons fondés ou infondés, le jeu visible copule avec le jeu invisible. Ici, à l’œuvre la sociologie des circonstances et des leviers. Plusieurs agendas donc, mêlés et plusieurs enjeux entremêlés. Des citoyens convaincus mobilisés, sans aucun calcul politicien ; des citoyens mobilisés sans comprendre les enjeux ni même le contenu du projet constitutionnel ; des politiciens mobilisés mais mus par des calculs politiciens, des politiciens mobilisés mais sans agenda particulier, juste opposés au contenu du Texte sinon au contexte ; des experts spécialistes silencieux ; des experts spécialistes ayant pris position, certains pour le OUI, d’autres pour le NON pour plusieurs raisons (contenu du texte, nécessité de révision pour certains, moment non pertinent pour d’autres…), des “mentors politiques” silencieux mais non indifférents, œuvrant en coulisses et appuyant sur des “boutons”, des leaders religieux et personnalités symboliques soit œuvrant en discrétion ou indifférentes, sinon soucieuses de la paix sociale, et c’est tout ça qui fait ce qu’on appelle en SOCIOLOGIE, LA DYNAMIQUE SOCIALE. Cela n’a rien de particulier, la sociologie politique est familière de l’intelligibilité des forces et jeux qui traversent le corps social. Le sociologue Dobry appelle même une partie de cela les mobilisations multisectorielles. Ce n’est pas que malien, c’est tout simplement humain.
La mobilisation sociale cache souvent aussi une frange sociale déconnectée des enjeux et souvent ignorant même ce qui se passe. Tout comme dans les pays occidentaux où les citoyens sont informés et éveillés aux enjeux politiques, mais pour des raisons liées au discrédit politique ou inhérentes à l’efficacité du vote, préfèrent l’abstention, au Mali, c’est plutôt le MALI DE LA BROUSSE qui demeure plus occupée en ce moment par les travaux champêtres plutôt que le destin de la LOI FONDAMENTALE. La sociologie politique nomme cela aussi en tant que composante en marge du Débat public, en dépit de quelques descentes opportunistes des “professionnels de la politique” pour expliquer à la société d’en bas quelques enjeux.
En somme, quand parmi les hommes il est connu que des Saints n’existent pas sinon rarissimes, le soupçon et la méfiance étant des invariants humains, non forcément inutiles, “il convient de convenir” d’un minimum de consensus, discuter et palabrer fraternellement avec nous-mêmes, pour aider le Mali à mieux “se tenir”, à l’heure où le chant du fragile ne nous a guère quittés, nous si exposés, si vulnérables en plein cœur des ENJEUX SAHÉLIENS, épicentre géostratégique où se déploient des convoitises lointaines qui ne manqueront point de peser sur le destin des SAHÉLIENS que nous sommes.
Le Mali, même sérieusement frappé et secoué depuis 2012, a encore des ressorts dont l’hygiène de vie en société doit prendre soin des parts de solidités pour éviter la rupture. Inventeurs de notre propre destin, hier, aujourd’hui et demain.”