’histoire de cet homme, âgé de 70 ans semble irréelle. Très riche depuis le jeune âge, Bacary* a réussi à atteindre ses ambitions de devenir le crésus de sa contrée, faisant la fierté de son village mais aussi de ses parents. Cependant, plus il vieilli, plus il regrette l’origine de sa richesse. Aujourd’hui, si c’était à refaire, Bacary préfèrerait mourir dans la pauvreté. Il a peur pour ses enfants. Récit
«Je suis un homme très riche, mais aujourd’hui, je ne vois pas l’importance de cette richesse, tous ce que je veux, c’est le pardon des uns et des autres. Je n’ai
jamais regardé autre chose dans ma vie que l’argent, la gloire… J’ai toujours voulu être l’homme le plus populaire de mon village, mais à présent que je vieilli, l’amertume, les regrets et les remords me rongent. J’ai envie de parler pour être en paix avec ma conscience, même si cela est impossible.
En racontant mon histoire, je suis persuadé de pouvoir sauver des gens qui seraient tentés d’être riches, quelle que soit l’origine de leurs biens. Lorsque j’avais 19 ans, j’avais été mis en relation avec un féticheur. Ce dernier venait de la sous-région.
Il était doté d’un pouvoir mystique d’aider les gens à réaliser leurs rêves. Etant jeune et cupide, je lui avais demandé de m’aider à devenir riche, peu importait le prix à payer. Il a accepté mais en me prévenant toutefois que le prix serait fixé par son ‘‘djinn’’. Puisque j’entendais des gens dire que l’on pouvait avoir la richesse grâce aux djinns, j’ai accepté.
Ainsi, le féticheur m’a-t-il demandé de faire des offrandes et des sacrifices à n’en plus finir. A cette époque, ce n’était pas difficile pour moi car ma famille n’était pas pauvre. Je réussissais à faire les offrandes. Mais pour ce qui est des sacrifices, c’était très difficile.
Je devais donner la vie de bébés en nombre impair (3, 5, 7…), ainsi que le sang d’un jeune handicapé, pour satisfaire le djinn. Je ne sais pas ce qui m’a poussé à accepter un tel deal, c’est comme si j’étais habité par Satan. Le principe était simple : le féticheur m’avait donné un gris-gris que je portais sur moi.
A cause de ce gris-gris, toute femme enceinte que je croisais à une certaine heure de la soirée, donnait forcément naissance à un enfant mort-né au moment de l’accouchement. Même si je rendais visite à une accouchée récente, son enfant pouvait tomber malade et en mourir.
En fin de compte, j’avais réussi à atteindre le nombre de bébés nécessaire (7), mais aussi, le sang du handicapé. Ma part du marché conclu, le résultat ne s’est pas fait attendre. Tous ce que je touchais se faisait fructifier. Pour camoufler mon deal, je me suis mis au commerce de céréale. J’étais devenu immensément riche. J’étais devenu l’enfant que tout le monde voulais avoir, que tout un village appréciait. J’avais trois femmes à 25 ans.
Aujourd’hui, j’ai 70 ans. Je regrette beaucoup. Je ne dors plus. J’ai peur pour mes enfants. Ils ne savent pas ce que j’ai fait. Quand je me mets à pleurer tout seul dans mon coin, ils me demandent ce qui m’arrive. Je ne peux pas leur avouer que leur père est un démon. Cette richesse dont ils se réjouissent provient du sang de plusieurs personnes.
J’ai peur pour eux encore une fois. Je sais que Dieu ne me pardonnera jamais mes actes, surtout la mort de ces bébés. Je suis allé faire le pèlerinage à la Mecque, mais rien, je suis toujours hanté par des pleurs la nuit.
J’implore les gens à gagner leur fortune à la sueur de leur front, sinon ils seront, comme moi, on enfer ici-bas».