À quelques heures du 20 juillet 2017, les espoirs fondés sur le chronogramme établi, de commun accord le 23 juin, entre les parties maliennes, s’amenuisent. Comme le rendez-vous du 20 juin dernier, les maîtres de Kidal n’ont pas encore raté l’occasion et les moyens de rouler les autres parties de l’accord dans la farine. Jusqu’à quand les groupes armés réussiront-ils à entretenir ce chaos ?
Depuis le 6 juillet dernier, les groupes armés du nord ont commencé les manœuvres pour renvoyer aux calendes grecques, le nouveau chronogramme établi de commun accord avec le gouvernement pour le retour de l’administration à Kidal à partir du 20 juillet, soit dans 24 heures. C’est à travers des violents affrontements en violation du cessez-le-feu que ce chaos a été savamment orchestré par les groupes armés pour proroger le statuquo qui règne dans cette ville.
À la veille de la 19e session du Comité de suivi de l’Accord pour la paix (CSA), la CMA et la Plateforme ont repris les hostilités faisant au moins 15 morts.
« Il y a eu trois morts du côté Plateforme et 12 du côté CMA. Des blessés graves ont également été enregistrés », signalent des sources locales.
Selon des sources concordantes, les affrontements ont commencé par l’attaque d’un convoi de la Plateforme, qui était en patrouille dans les alentours de Kidal.
Dans un communiqué signé de Moulaye Ahmed Ould Moulaye, la Plateforme reproche à la CMA, d’avoir violé l’accord de principe du 28 juin 217 qui interdisait aux deux parties de lancer un assaut contre l’un contre les positions de l’autre.
La CMA, de son côté, accusait la Plateforme d’être responsable de ces événements.
« La CMA informe l’opinion nationale et internationale d’une attaque menée tôt ce matin du 06 juillet 2017 contre une de ses positions basées à une dizaine de Kilomètres à l’ouest d’Intachdayt, par une colonne du GATIA venue d’Anefif sous la conduite d’un certain Akhmadou Ag ASRIW », indique son communiqué.
La MINUSMA en partenaire du processus de paix conclu à Kidal ne pouvait qu’appeler les dirigeants des deux groupes à faire preuve de sagesse et d’agir avec responsabilité.
La 19e session du Comité de suivi de l’accord, tenu dans cette confusion, le 11 juillet dernier, n’a finalement planché que sur un seul point: la présentation par le gouvernement d’un chronogramme actualisé, suite aux discussions entre les parties maliennes pendant l’intersession. Ce chronogramme vise à accélérer le retour de l’administration, l’opérationnalisation des patrouilles mixtes à Kidal ainsi que la mise en œuvre effective de certaines dispositions de l’accord.
Le Comité a pris note des avancées enregistrées par les parties maliennes dans leurs discussions en cours et les encourage à parachever le dialogue autour des derniers points de divergences.
Le Comité a condamné fermement les violations récurrentes du cessez-le-feu par les mouvements signataires, notamment dans la région de Kidal avant d’exhorter l’ensemble des acteurs impliqués dans le processus à œuvrer pour une cessation immédiate et inconditionnelle des hostilités.
Cependant, aucun mot, aucune référence au respect du chronogramme par les parties de la part du CSA.
Pis, à la date d’aujourd’hui, ni la MINUSMA, encore moins la médiation internationale ne pipe également mot : le suspense reste total.
Selon le chronogramme établi, le 23 juin dernier lors de la Journée d’évaluation de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, à l’initiative du Premier ministre, Abdoulaye Idrissa Maïga, le Mécanisme opérationnel de coordination, plus connu sous son acronyme MOC, symbole de la présence de l’État malien et de la sécurité, devrait effectivement être présent à Kidal, la seule des trois régions jusqu’ici réfractaires à son installation, devrait être installé à Kidal à partir de demain, 20 juillet.
Cette journée était d’autant plus importante qu’elle a rassemblé autour du PM, outre les deux groupes armés, la Plateforme et la CMA, cinq organisations nationales impliquées dans la mise en œuvre de l’Accord (le Haut Représentant du Président de la République, le Président de la Commission-vérité, justice et réconciliation, le Président de la Commission DDR (Démobilisation, Désarmement et Réinsertion), le Président de la Commission intégration, le Commissaire à la réforme du secteur de la sécurité), les représentants de deux associations de la société civile (le Groupe d’action pour la réconciliation et le Conseil national de la société civile).
La nouvelle feuille de route, aux conditions impératives, unanimement cautionnée par tous les protagonistes, suivant laquelle, au 31 juillet prochain, la ville de Kidal, outre le MOC, allait accueillir son gouverneur, Sidi Mohamed Ag Ichrach, résidant actuellement à Gao, depuis sa nomination, et les autorités intérimaires.
À la suite de Kidal, le gouverneur de Taoudenit, le Général Abderrahmane Ould Meydou, ainsi que les autorités intérimaires de cette nouvelle capitale régionale seront installés.
À la veille de ce rendez-vous crucial, aucun point du chronogramme n’est sur le point d’être mise en œuvre, au contraire, on semble être plus préoccupé à apaiser le climat social qu’à mettre en œuvre le chronogramme renégocié de commun accord et à l’unanimité des parties.
Cette situation interpelle aujourd’hui la communauté internationale garante de la mise en œuvre de l’accord pour la paix. Elle qui est souvent prompte à acculer le gouvernement pour aller vite dans la mise en œuvre de l’accord, est la seule qui dispose aujourd’hui des moyens pour imposer la paix tant souhaitée par les populations. Plus de deux ans après la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale, les groupes armés et particulièrement la CMA, endossent une responsabilité importante dans le retard accusé, à travers ses violations répétées du cessez-le-feu et de ses propres engagements. Sans une réaction appropriée et proportionnelle de la communauté internationale, il est évident, dans ce contexte, que le bout du tunnel reste loin.