Avant la colonisation, le culte des idoles et des anciens, morts ou vivants, avait une importance particulière dans la société. Les classes d’âge donnaient les repères. L’âge donnait la légitimité. On choisissait le dirigeant en fonction de l’âge, le plus âgé étant celui qui se rapprochait le plus des anciens. Le pouvoir se transmettait de frère à frère par ordre de naissance. Une assemblée d’adultes formalisait le choix. Elle pouvait décider de faire régner un frère plus jeune si l’aîné, pour une raison ou une autre (maladie, débilité, incapacité évidente), n’était pas en mesure d’assumer la charge. Le choix des dirigeants était trop important dans ces sociétés, pour que tout le monde y participe. Il était réservé à une élite gérontocratique minutieusement sélectionnée. N’importe quel vieux ne pouvait accéder au pouvoir. Il devait appartenir à l’élite qui tient sa légitimité soit de la conquête, soit de l’appartenance à la descendance des dirigeants. Le pouvoir restait toujours dans la même famille et le même clan. Toute velléité de changement provoquait une crise.
La traite des Noirs et le commerce transatlantique ont profondément modifié la gouvernance dans les pays côtiers d’Afrique. Ils sont à l’origine des États esclavagistes dans le golfe du Bénin. Leur impact sur les États sahélo-sahariens est beaucoup plus faible à cause de leur éloignement de la côte et d’une tradition millénaire de commerce avec le monde musulman à travers le désert du Sahara et la mer méditerranée. L’élément extérieur qui va profondément influer la gouvernance dans cette partie de l’Afrique de l’ouest est l’islam.
L’arrivée de l’islam influe sur tous les secteurs de la vie, y compris le secteur politique. Le pouvoir ne se transmet plus exclusivement par voie collatérale, mais de père en fils. Ce changement de légitimité et de légalité a été à l’origine de crises de succession dans les États qui ont adopté la nouvelle religion, avant que la transmission du pouvoir de père en fils ne s’impose à tous, avec son enracinement. Dans les empires du Mali et du Songhaï, l’islam a marqué, de façon indélébile le fonctionnement politique, social, économique et culturel de l’État.