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Tribune: aimons et servons le Mali
Publié le mercredi 26 juillet 2017  |  Info Matin
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© Autre presse
Carte du mali
Le pays fait partie de la Communauté économique des États de l`Afrique de l`Ouest (CEDEAO) et de l`Union africaine
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Le débat sur le referendum constitutionnel a mis au grand jour la méconnaissance par la plupart des responsables politiques et associatifs des dispositions pertinentes de notre Constitution.

Si la défense de la république est un devoir pour tout citoyen, peut-on assurer sainement cette mission sans l’engagement ferme de la majorité et sans le respect par l’opposition des principales valeurs qui fondent la république?

COMPRENDRE LE FONCTIONNEMENT DES INSTITUTIONS EST UN DEVOIR CITOYEN
Vingt-cinq ans après l’entrée du Mali dans l’ère démocratique, les citoyens devaient en principe maîtriser les dispositions essentielles de notre Constitution, ce qui ne semble pas être le cas. C’est à se demander de quoi sont faits les programmes scolaires, les activités de la pléthore de partis politiques et des centaines d’organisations de la société civile. Les déclarations publiques de ces dernières semaines étonnent, notamment au sein de la société civile dont quelques leaders, faisant fi du sens de la mesure qu’exige l’appartenance à une association apolitique, ont tout simplement choisi de prêter leur voix et leur concours à des politiciens essoufflés et peu crédibles, allant jusqu’à partager avec eux et sans aucune réserve des appels à l’incivisme. Le Mali a choisi en 1992 le régime démocratique de type présidentiel qui consacre la prééminence du pouvoir exécutif sur les autres, plaçant le président de la république au centre de la vie institutionnelle du pays. Le régime présidentiel est différent du régime parlementaire au sein duquel la primauté est accordée au Parlement sur l’Exécutif. Certaines revendications paraissent fantaisistes parce qu’elles méconnaissent totalement cette réalité pourtant élémentaire.
Il n’est pas superflu de rappeler quelques principes fondamentaux édictés par la Constitution de 1992. « La souveraineté nationale appartient au peuple tout entier qui l’exerce par ses représentants ou par voie de referendum. Aucune fraction du peuple, ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice » (De l’Etat et de la Souveraineté, Titre II – Art.26). Ainsi, les députés votent les lois au nom du peuple malien qui peut lui-même intervenir directement par voie de referendum. Personne ni aucun groupe ne peut s’y opposer parce que « Tout citoyen, toute personne habitant le territoire malien, a le devoir de respecter en toutes circonstances la Constitution. » (Des Droits et Devoirs de la Personne Humaine, Titre I – Art.24). Dans notre système institutionnel, les rôles sont bien répartis et les conflits pouvant naître de l’application de la loi sont soumis au Juge. Une fois que celui-ci a tranché et que la décision est devenue définitive, elle est revêtue de l’autorité de la chose jugée et s’impose à tous. Ce processus également doit être bien compris. On a entendu des leaders de partis politiques et d’associations appeler à la contestation de la décision de la Cour Constitutionnelle. Ignorance ou esprit d’anarchie ? C’est une situation gravissime et peut-on confier la direction du pays à de tels leaders ? Mieux, pourquoi l’Etat consentirait-il à verser 500 Millions de nos francs par an à une opposition qui appelle ouvertement à une rébellion contre les institutions de la république?

AIMER ET DÉFENDRE LE MALI, C’EST SE COMPORTER DE FAÇON RESPONSABLE
Le Mali a besoin de s’engager dans la voie d’une formation citoyenne de qualité, avec le concours d’une presse professionnelle et de l’ensemble des organisations de la société civile, sous la conduite du gouvernement et des institutions assurant la représentation nationale. La rumeur ne prend le dessus et ne prospère que lorsque la communication officielle a failli par son absence ou son manque de consistance et de crédibilité. Du Comité d’Experts à la Commission Lois de l’Assemblée Nationale, que n’a-t-on entendu sur le projet de révision de la Constitution mais surtout, qu’a-t-on fait pour porter la bonne information aux citoyens ? Ce qui frappe dans le camp présidentiel, c’est le manque d’un schéma de communication cohérent avec une répartition claire des rôles. On est dans la réaction et le rattrapage au lieu d’être dans l’anticipation. Les citoyens réagissent à cette impréparation et aux hésitations par un doute légitime que l’opposition est en train d’exploiter. Rien n’est acquis d’avance et il faut éviter d’avoir un comportement de coupable lorsqu’on a la loi de son côté. Les valeurs cardinales de liberté, de laïcité, d’égalité des citoyens devant la loi, de respect des institutions et de ceux qui les incarnent légitimement ne peuvent être impunément foulées aux pieds. Malheureusement, il ne semble exister aucun mécanisme juridique pour protéger les institutions et les particuliers contre des attaques gratuites et malveillantes. Les attitudes de défiance à l’autorité sont nombreuses et elles restent impunies, confirmant le dévoiement de notre démocratie.
Les tensions politiques et sociales s’expliquent essentiellement par le manque de confiance et de crédibilité. Qu’ils soient des politiques, des administratifs ou de la société civile, ceux qui communiquent sur les questions d’intérêt national doivent être des personnes crédibles pour que le message porte. Il faut quitter les habitudes souvent sclérosantes pour innover et s’adapter car, désormais et de plus en plus, la crédibilité des acteurs et la bonne communication seront au cœur du débat citoyen. Dans cette affaire de referendum, les contestataires cherchent à déplacer le centre de la contradiction en provoquant des incidents majeurs pour ensuite exiger la démission du président de la république car, après la décision et les recommandations de la Cour Constitutionnelle, la cause est entendue. La révision de la Constitution de 1992 est prévue par l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale, accord qui permet au Mali de sortir d’une crise grave dans laquelle l’ont plongé des politiciens incompétents et irresponsables. Comme certains parlent du sang des martyrs de 1991 comme norme de référence pour justifier leur refus de réviser la Constitution de 1992, il suffit de leur rappeler qu’il y a eu beaucoup plus de sang versé depuis 2012, plus de déplacés et d’exilés qui doivent revenir chez eux et réapprendre à vivre normalement. Défendre la république et ses valeurs, c’est défendre les institutions que le peuple malien s’est librement données, ainsi que ceux qui les incarnent légitimement. La déstabilisation du régime ne saurait donc être une option acceptable.
Les élections restent le meilleur moyen pour régler les désaccords politiques dans une démocratie. En conséquence, choisir la violence au détriment du suffrage universel reviendrait à s’engager sur la voie d’un crime imprescriptible contre le peuple malien, avec toutes les conséquences de droit qui pourraient en découler.

Mahamadou Camara
Email : camara.mc.camara@gmail.com
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