Récemment, l’Autorité Malienne de Régulation des Télécommunications / TIC et des Postes (AMRTP) a mis à la disposition de l’armée 8, 9 milliards de nos francs, suite à l’appel lancé par le chef de l’Etat pour venir en aide à nos forces armées et de sécurité.
Ce pactole, prélevé sur le Fonds d’accès universel (FAU), mis en place par des prélèvements sur les deux opérateurs de téléphonie mobile (Sotelma et Orange) était destiné, à l’origine, à étendre les réseaux dans les zones non encore desservies. En raison de la situation exceptionnelle, l’Autorité de régulation, dirigée par le Dr Choguel Maïga, a consenti une dérogation pour remettre ce joli montant à l’armée, afin de l’équiper.
C’est dans ce cadre que le ministre des Finances, Tiénan Coulibaly, a demandé à la donatrice de monter un dossier pour l’acquisition de matériels roulants au profit de l’armée malienne. Des entretiens, des échanges de courriers ont été effectués entre le ministère des Finances, celui de la Défense et l’AMRTP.
Le chef d’Etat-major général des armées, le Général de Brigade Ibrahima Dahirou Dembelé, a même rédigé une correspondance pour exprimer les besoins ci-après: dix camions citernes (33 m3), dix camions citernes (18m3), dix ambulances Toyota Land Cruiser Standard, deux cent pick up. Les caractéristiques techniques de ces engins roulants ont été fournies par le biais de l’Etat major général, à travers le Colonel Moustapha Drabo.
Le ministère de la Défense a donc bel et bien été associé au montage du dossier. Un opérateur économique de la place a été désigné pour passer les commandes. Il a conclu à Amsterdam un marché avec ses partenaires, la meilleure offre jusque là obtenue par une structure de l’Etat, même auprès des concessionnaires automobiles confortablement installés à Bamako.
L’opérateur économique est allé au Pays Bas. Il a réglé tous les détails afin que la commande puisse arriver à Bamako dans un temps record. Il a même positionné un bateau. Mais, avant l’embarquement, de bonne foi qu’il est, il a demandé à l’Etat Major général des armées de désigner trois officiers spécialisés pour inspecter les véhicules avant leur embarcation.
Le même Général de Brigade Ibrahima Dahirou Dembelé a désigné trois officiers et l’a fait savoir à son supérieur hiérarchique, en l’occurrence le ministre de la Défense et des Anciens Combattants, à travers un courrier daté du 4 mars 2013.
Les officiers désignés étaient le Commandant Mamourou Togo (DFM/MDAC), le Capitaine Adama Maïga (DMHTA) et le Lieutenant Sidy Coulibaly (DMHTA). Quelques jours avant la mission en Amsterdam, le ministre de la Défense, le Général de Brigade Yamoussa Camara, a fait lire à la télévision un communiqué laconique. C’était le 22 mars dernier. Il disait «le ministère de la Défense et des Anciens Combattants porte à la connaissance de l’opinion publique nationale que des informations récurrentes font état d’une commande de véhicules à réaliser sur les fonds mis à disposition par les opérateurs de téléphonie mobile au profit des Forces armées. Des procédures administratives avaient été engagées, sans concertation avec le département de la Défense, qui est en attente d’un lot important de véhicules du même type. Les fonds en question sont utilisés pour acquérir d’autres moyens complémentaires et assurer le renforcement des capacités opérationnelles des troupes… ».
C’est une contrevérité flagrante. Comment l’armée peut-elle exprimer les besoins, fixer les caractéristiques techniques des véhicules, désigner des officiers pour l’inspection des engins à Amsterdam pour, au finish, mettre en avant des procédures auxquelles elle n’aurait pas été associée? Conséquences: le Premier ministre a annulé l’achat de ce matériel roulant pour nos militaires, qui peinent à patrouiller dans les environs de Gao, faute de moyens de locomotion. Pour la même raison, nos braves soldats n’arrivent pas à aller à Kidal.
Alors, qu’est ce qui peut expliquer l’attitude du ministre de la Défense? Veut-il être associé à l’octroi du marché à l’opérateur économique gagnant ou veut-il attribuer lui-même ce marché à un autre fournisseur? Dans l’un ou l’autre cas, le temps presse. Des militaires meurent chaque jour sur le terrain. Allons-nous continuer à nous tirailler sur le sujet de procédures administratives déjà respectées, quitte à contrarier le résultat recherché? Que cachent ces tiraillements inutiles? En tout cas, on sent de manière indubitable une forte odeur de magouille autour de ce dossier. A suivre.