La récurrente problématique de la ville de Kidal se dirige vraisemblablement vers un épilogue plus ou moins certain, après ses dernières évolutions consécutives aux divergences et enjeux communautaires ayant entouré l’installation du Moc et les modalités du retour de l’administration. Dans cette région malienne curieusement exceptée par la vague de reconquête de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de l’Etat, les derniers obstacles devant l’application de l’Accord devraient logiquement être levés avec la nette suprématie militaire de la CMA sur le GATIA.
Repoussée dans ses derniers retranchements,
La branche armée de la Plateforme loyaliste éprouve en tout cas grand peine à rebondir de ses revers à Annéfis et à Takellot, malgré des tentatives de le faire à partir de Tamborkt et avec l’aide hypothétique d’alliés arabes.
La déroute des troupes loyalistes, conséquence sans doute de leur lâchage par les autorités maliennes, ne sanctionne pas seulement la victoire militaire des adversaires jurés du général Gamou. Il consacre aussi le triomphe de leurs intérêts communautaires qui conditionnaient jusqu’ici l’avènement certaines étapes très déterminantes dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation : l’installation d’un dispositif sécuritaire et administratif régional sans le Gatia. Avec l’anéantissement de ce dernier, la CMA recouvre son statut de protagoniste principal (sinon exclusif) perdu dans les enjeux des pourparlers d’Alger ainsi que dans les manœuvres pour contrecarrer son monopole sur la problématique du Nord-Mali et noyer ses prétentions séparatistes dans la multiplication des parties. Autant d’artifices ayant contribué à ouvrir une brèche dans laquelle se sont engouffrés les calculs d’intérêts prébendiers et communautaires les plus insoupçonnés et imprévisibles. Il en est ainsi des visées inavoués d’une communauté Imghad de Kidal qui, au détour de la guerre de procuration, pour le compte de l’Etat, a subrepticement engagé un combat d’auto-détermination communautaire où l’affirmation citoyenne et la revanche historique se confondent aux ambitions politiques individuelles.
C’est par les mêmes moyens détournés, selon toute évidence, que derrière les services guerriers de la branche arabe de la Plateforme se sont dissimulés des règlements de comptes mafieux avec la CMA sur fond de mainmise sur la criminalité et les trafics illicites dans le désert.
C’est ce jeu de cachecache qui a longtemps caractérisé les rapports entre les différentes composantes de la Plateforme – unis par la communauté d’adversaires mais très différents par leurs objectifs – et les autorités maliennes plutôt mal à l’aise dans la posture qui consiste à régler une question si complexe en jouant sur le dangereux terrain des confrontations d’intérêts intercommunautaires.
Il n’est pas non plus exclu que ce même malaise soit à l’origine de la rupture de contrat avec les milices pro-étatiques, dont le Gatia victimes vraisemblablement d’un besoin de démarcation pour les yeux des garants internationaux de l’Accord pour la paix.