En Afrique, les bénédictions des ancêtres sont loin d’être des bluffs. En tout cas, les Maliens sont en droit d’y croire. Le pays est passé par-dessus du précipice de justesse. S’il n’était pas accroché aux lianes de ces bénédictions, il allait sombrer dans le fond du cratère. Heureusement, les dieux de la Cité veillent sur le Mali. Mais pendant combien de temps encore ? Difficile de répondre à cette question. C’est pourquoi, l’heure est venue pour IBK de clarifier ses relations politiques avec des amis qui ont brillé par leur absence dans le débat sur le projet de révision de la Constitution. Qui a eu l’avantage de taire les grandes rivalités politiques de la transition entre les animateurs de l’ex-COPAM et de l’ex-FDR. Qui aurait cru qu’Oumar Mariko, AmadounAmionGuindo et autres de l’ex-COPAM pouvaient se retrouver sur la même table de discussions avec SoumaïlaCissé, TièbiléDramé, Mme SyKadiatouSow et autres pour élaborer des stratégies destinées à obstruer le chemin au pouvoir d’IBK ? De surcroit, au siège de la CSTM. Seules les montagnes ne se rencontrent dit l’adage.
Et pourtant à Sikasso, comme à Ségou, lors de ses sorties à l’intérieur du pays l’année dernière, IBK n’a pas cessé d’indexer ‘’l’inaudibilité’’ de sa troupe. N’est-ce que les faits lui donnent raison ? En tout cas, la majorité présidentielle a manqué au rendez-vous du soutien au président dans cette épreuve qui apparaît à la fois comme le test d’avant 2018. Les adversaires, regroupés au sein de la Plateforme « Antè A bana » leur ont damé le pion par la profondeur de l’organisation et l’engagement dans la discipline des membres. En face de cette armada de stratèges politiques, la majorité confie son sort à un novice, un apprenti en politique : Mamadou N’diaye du’’ mouvement 100% IBK’’. Le jeune avait certes de la volonté, mais celle-ci ne suffit pas à vaincre cette pléiade de politiciens aguerris. Il n’avait pas la carrure, ni le verbe nécessaires pour les contrer encore moins la capacité de mobilisation pour se hisser à leur hauteur. Il a tout de même le mérite de l’audace qu’il faut lui reconnaître. Mais, lui aussi a pêché par son zèle en surestimant sa capacité intellectuelle à porter le débat à la hauteur d’un TièbiléDramé, qui n’est jamais à l’aise que dans l’adversité. Là, il est prolixe. Dans ces genres de situations, il ne fait que réfléchir à des stratégies, notamment destructives.
IBK seul contre tous
Qu’est-ce qui a donc manqué au président pour vaincre ? La grande expérience de ses amis ?
TièbiléDramé est certes dense en production d’idées et d’animation de débats politiques, mais le président des Tigres, Choguel K. Maïga, n’est pas moins dense non plus. Tous les observateurs de la scène politique se rappellent de lui dans les années 90, quand il défendait avec hargne et détermination, le bilan de l’ex-UDPM, l’ancêtre du MPR. Les négociateurs africains se rappellent également de lui, dans les discussions sur le Coton face à la puissante Amérique quand il a mené pendant de longs mois, des discussions à l’OMC. Mais, où était-il passé ? Et pourtant, il a non seulement le verbe nécessaire, mais il a le don de tenir la contradiction à la hauteur des TièbiléDramé et autres. Son talent d’orateur et d’excellent stratège politique est à la taille de Me MountagaTall. Qui avait même pris la plume pour inviter les acteurs politiques à la mesure après la grande marche du 17 juin dernier. Mais, depuis cette publication, l’ex-ministre s’est lui aussi muré dans un silence radio total. Pour quel motif ?
Mais, ce qui a surtout marqué les esprits, c’est la mollesse du parti présidentiel, sous la direction de BocaryTéréta. Une autre balaise de la majorité présidentielle. Sous certains cieux politiques maliens, le seul nom de BocaryTéréta suffit pour faire trembler certains cadres politiques. Son nom est assimilé à l’Organisation et à la Méthode dans la lutte politique au Mali. Mais, le Monsieur organisation de l’ancien parti au pouvoir, ADEMA-PASJ et du RPM a brillé par son absence dans ce débat politique. Sa timidité dans ce débat n’a laissé aucun acteur politique et des médias indifférents. D’aucuns murmuraient dans l’ombre que son silence donne des ailes à la Plateforme. Car, c’est le signe d’une fracture dans la famille présidentielle. Une brèche ouverte dont il fallait profiter à suffisance avant que le lion ne se lève. C’est dire que le manque d’engagement de ces ténors de la vie politique malienne et de surcroit, de la majorité présidentielle, a beaucoup contribué à isoler le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta. Qui s’est retrouvé seul face à des dinosaures qui ont failli broyer son régime n’eut été la baraka des dieux de la Cité. Qui l’ont bien inspiré pour sa sage décision après la médiation des leaders religieux et des autorités coutumières de la capitale.
Après le déluge, maintenant place à des explications, à des clarifications, à des ‘’réengagements’’, bref au renouvellement des baux d’alliances ou simplement à la rupture pure des contrats d’alliance. Car, le moment des choix stratégiques pour 2018, c’est maintenant. Aucune hésitation n’est permise à ce stade des choses. Sinon, ce serait trop tard. Est-il besoin de rappeler qu’IBK détient encore les rênes du pouvoir. En tout cas, jusqu’au 04 septembre 2018. Or, pour qui connaît l’histoire du Chêne et du Roseau, le pouvoir s’apparente à un roseau qui peut se plier sous le poids des évènements, mais qui se déracine difficilement comme le chêne. Donc, IBK détient encore toutes les cartes en main. L’initiative de les redistribuer lui revient toujours. Surtout qu’il sort de cette épreuve certes affaibli en apparence, mais grandi en réalité. Car, la crise lui aura permis de voir clair les choses et de déceler les vrais amis des faux. S’il n’avait pas de grille de lecture en 2013, année de sa victoire écrasante, maintenant ce n’est plus le cas. Il sait désormais qui est qui sur la scène politique.
La crise lui aura aussi permis de jauger les rapports de force, surtout de peser la densité et le degré d’engagement de chacun de ses amis et la capacité de mobilisation de ses adversaires. Mieux, elle lui a permis d’éclairer son tableau de bord pour lui permettre de prendre désormaisles meilleures décisions.
IBK doit ajuster son attelage gouvernemental pour se libérer des tonneaux vides, des hésitants et de ceux qui font semblant de le soutenir pendant qu’il est encore temps.