Le jugement à la cour d’assises du commissaire de police du Mujao de Gao, Alioune Mahamane Touré, s’est tenu le vendredi 17 août à la cour d’Appel de Bamako. Il a été reconnu coupable pour 4 chefs d’accusation. Il est condamné à 10 ans de réclusion et à verser plus de 40 millions Fcfa à ses victimes.
Arrêté en décembre 2013, le commissaire de la police islamique du Mujao à Gao, Aliou Mahamane Touré, était derrière les barreaux il y a bientôt 4 ans. Aliou Mahamane Touré était la vitrine des islamistes de Gao lorsqu’ils occupaient la ville entre 2012 et 2013. Il portait alors le titre de commissaire de la police islamique.
Devant la cour d’Appel, le prévenu en plus des 4 chefs d’accusation -complicité de malfrats, coups et blessures graves, atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat et détention d’armes et de minutions de guerre- avait en face de lui 7 de ses victimes. Ces victimes sont entre autres trois jeunes amputés dont deux du bras et un autre du pied, une femme pour tentative de viol, un journaliste agressé dans l’exercice de sa fonction à Gao, un commerçant de cigarette et un enfant enrôlé par l’accusé.
À la suite des débats qui ont duré 12 heures de temps, il est ressorti des plaidoiries des avocats des victimes qu’au moment de l’occupation de la ville de Gao par le Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), le commissaire de la police islamique, aujourd’hui devant la justice, avait droit de vie et mort sur toute la population de Gao, d’où tous ces crimes à son actif.
L’une des victimes, Moctar Touré, amputé de la main droite et venu en tant que témoin, dit être victime du fait qu’il a refusé de rejoindre le Mujao lorsque son cousin direct Mahamane Touré le lui a proposé pour être payé à 100.000 Fcfa par mois. Son refus d’adhérer au Mujao a fait de lui l’ennemi juré de son cousin, donc du commissaire de la police islamique. Il est également apparu dans les témoignages qu’Aliou Mahamane Touré était le maillon fort du Mujao parce qu’il n’acceptait jamais que sa famille soit prise pour cible. Les avocats des victimes tout comme les victimes elles-mêmes ont reconnu qu’Aliou avait mis à la disposition des populations un numéro vert pour prévenir tout acte débordant dans les premières heures de l’occupation.
La défense de l’accusé, devant les faits accablants de son client, a répliqué en accusant directement l’Etat d’avoir abandonné les populations de Gao. Aux dires de la défense, certaines accusations ne tiennent pas. Comme la complicité de malfrats, laquelle, pour les avocats de la défense, était une façon de rester à Gao pour Aliou et de veiller sur les siens puisque l’Etat les avait abandonnés.
L’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat n’est pas fondée, «puisqu’il n’y avait plus d’Etat à Gao». Quant à la détention d’armes et de minutions de guerre, Me Oumar Bocar Sidibé a soutenu qu’à Gao, presque tout le monde a une armée chez lui. Il conclut en disant qu’Aliou est vu en héros à Gao parce qu’il avait su organiser la ville de Gao en l’absence de l’Etat, en mettant un numéro vert pour prévenir les actes criminels dans la ville.
Malgré la plaidoirie de ses avocats dénonçant la libération des codétenus d’Aliou Mahamane, qui sont en majorité des Touaregs et les circonstances attenantes reconnues par la cour, M. Touré a écopé d’une peine de 10 ans de réclusion et le paiement de la somme de 45 millions Fcfa à certaines de ses victimes.