Le deuxième quinquennat d'Abdelaziz Bouteflika débuta en avril 2004, et fut caractérisé par une série de méga projets, d'une ampleur incroyablement ambitieuse. Deux des objectifs fixés pour la fin de son mandat en 2009, ont été la construction d'un million de logements et la création d'un million de nouveaux emplois.
Les experts économiques, tout en reconnaissant l'urgence de la situation du logement en Algérie, pensèrent que le temps pour le programme de construction était très court et n'atteindrait même pas 50% de réussite. Selon un contact à la Banque mondiale, un million de logements était tout simplement hors de portée car la bureaucratie freinait l'utilisation et le développement des terres. Puis le changement répété des entrepreneurs avait considérablement retardé le programme.
Le nombre réel d'unités de logement nouvellement construites était même inférieur à 43% de la prédiction du gouvernement.
Dans le secteur de l'eau, Bouteflika lança ce que le ministre des Ressources en eau, Abdelmalek Sellal, appela le «plus grand projet d'eau dans le monde». En février 2008, Bouteflika inaugura une grande usine de dessalement à Alger, et dix autres usines de ce type devraient suivre d'ici 2011.
Un autre grand projet d'eau était le complexe hydraulique de Beni Haroun dans la province de Mila. Composé de cinq barrages, le complexe devrait fournir de l'eau à quatre millions de personnes dans cinq provinces. Entamé en 1968, Beni Haroun fut finalement achevé en 2007 à «l'insistance personnelle du président».
Le projet de Beni Haroun comprenait aussi l'aéroport international d'Alger, où la construction commença dans les années 1980 et n'a repris qu’en 2005 lorsque le président Bouteflika visita le site. Il fut finalement inauguré en 2006. Pendant ce temps, un autre projet grandiose, le métro d'Alger était énormément en retard. Avec l’aide des entreprises françaises, le gouvernement projetait que la première étape du métro serait opérationnelle d'ici la fin de 2009.
Malgré le désir de Bouteflika d'être considéré comme un président-constructeur, les Algériens ordinaires étaient étonnés non seulement par la taille des projets, mais aussi par les milliards dépensés pendant qu’ils ont du mal à joindre les deux bouts. Hocine Benissad de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) déclara que l'Algérie avait commis une grave erreur en investissant uniquement dans les infrastructures et non dans les ressources humaines.
Selon un représentant de Transparency International, le problème avec le plan quinquennal d'infrastructure de Bouteflika était que "plus le projet est grand, plus il engendre la corruption". Puis, l’inflation rendait la vie quotidienne des Algériens difficile. El-Kadi Ihsane, journaliste d'El Watan, déclara qu’ "il est très difficile pour quelqu'un qui gagne 12 000 dinars par mois de voir des milliards et des milliards de dollars consacrés à tout sauf à eux".
En plus du cynisme avec lequel de nombreux grands projets de Bouteflika ont été reçus, d'autres projets tels que la Grande Mosquée d'Alger ont déclenché des controverses et des fissures internes au sein du gouvernement.
Le projet de mosquée à plusieurs milliards de dollars a été critiqué dans la presse comme « pharaonique ». Le deuxième mandat du président Bouteflika devrait être marqué par « l'autoroute du siècle ». La route Est-Ouest de 1216 km, estimée à 11 milliards de dollars et employant près de 75 000 travailleurs, relierait les frontières marocaine et tunisienne dans le nord de l'Algérie. L'autoroute devrait aider à remplir l'ambition maghrébine de Bouteflika. Cela complèterait sa vision pour être «le plus africain des présidents arabes».
En 2001, Bouteflika fut l'un des fondateurs du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD). Le but était de créer une grande stratégie «pour promouvoir et protéger le continent africain».
Dans le cadre du NEPAD, le projet de la Trans-Sahara Highway devrait lier Alger et Lagos, au Nigeria, alors que l'immense gazoduc Trans-Sahara (TSGP) transporterait directement du gaz naturel du Nigeria vers les marchés européens. Mohamed Meziane, ancien PDG de Sonatrach, a déclaré lors d'une interview que le TSGP était personnellement surveillé par le président. L'ampleur des projets d'infrastructures de Bouteflika laisse peu de doute qu'il est un homme de grande vision. Mais, l'absence d'emploi et une réforme économique tangible suggère également qu'il est coupé de la réalité du citoyen moyen.
L'économie algérienne est restée largement stagnante en dehors du secteur des hydrocarbures, entravée par des priorités mal placées, la corruption et l'inefficacité systémique. Un chercheur du Centre d'études stratégiques et internationales a noté que l'une des principales raisons pour lesquelles les grands projets n'avaient pas d'impact significatif sur l'économie était parce qu'ils ont donné des dizaines de milliers d'emplois à des travailleurs étrangers, dont beaucoup de chinois, dans le but d'économiser de l'argent et finir vite.
Avec 72% de la population âgée de moins de 30 ans et le taux de chômage chez les jeunes estimé à 50% dans certaines régions du pays, les problèmes socio-économiques profonds restent malgré la volonté de Bouteflika de solidifier son héritage personnel.