L'insécurité "résiduelle" dans la commune de Diafarabé, cercle de Tenenkou (région de Mopti), est en passe de faire des pauvres populations de véritables esclaves sur leur propre terroir. Hormis la ville de Tenenkou, chef-lieu du cercle, aucune des neuf autres communes du cercle ne peut signaler dans ses murs la présence d'un symbole, si minime soit-il, de l'Administration.
Depuis bientôt deux ans, les populations sont comme abandonnées à leur triste sort. Les djihado-terroristes s'y pavanent en maîtres absolus et imposent leurs desideratas grâce aux armes qu'ils portent sur eux. Sous le couvert de la religion, ils font subir aux innocentes populations toute sorte de sévices.
Récemment, dans la commune de Toguere koumbe, lors de la fête de l'Aid El Fitr, suite à des menaces et des altercations avec la population, le jour même de la fête, ils sont revenus le lendemain en nombre impressionnant et ont enlevé le chef de village. En représailles, la population a pris en otage les familles de leurs complices qui vivent avec elle. Voyant la vie de leurs proches menacée, les complices ont été obligés d'aller négocier avec leurs amis la libération du chef de village de Toguere koumbe.
Aujourd'hui lundi, jour de foire à Diafarabé, vers 9h, les djihado-terroristes ont arrêté en cours de chemin une trentaine d'habitants du village de Mamba (à 7km de Diafarabé). Ces hommes et femmes qui se rendaient à la foire hebdomadaire pour chercher leur pitance sont désormais des otages aux mains de ces bandits qui exigent la présence du chef de village de Mamba.
Lorsque nous avons eu l'information, nous avons appelé le village pour mieux comprendre. Il a confirmé et nous a dit que la veille, ces gens (les djihadistes) étaient venus dans le village avec l'intention de chicoter les femmes qui n'obéissaient pas à leurs instructions vestimentaires. Face à la riposte et la résistance des hommes du village, déterminés à défendre leurs épouses, les bandits ont remboursé chemin.
Cette prise d'otages est certainement leur réponse. Ils en veulent au chef de village pensant que ce dernier a droit de vie et de mort sur ses administrés. Le chef de village nous a confirmé qu'il était prêt à aller répondre à leur convocation, si cela devrait sauver ses administrés, mais il est confronté à une opposition de tout son village et ses propres parents. Nous lui avons fortement déconseillé de se rendre chez les bandits, car leur intention est de lui faire du mal et attenter à sa vie.
Au moment où nous publions ces informations, les femmes et les enfants qui étaient parmi les otages ont été libérés, mais il y aurait encore une vingtaine de chefs de famille entre les mains des ravisseurs.
Face à ce terrorisme résiduel, les populations du cercle de Tenenkou, particulièrement celles de Diafarabé, Toguere koumbe, etc. sont désemparées, tristes, meurtries. Elles se sentent oubliées et abandonnées par l'Etat, coupées de leurs frères et sœurs, cadres ressortissants du cercle qui ne peuvent plus venir se ressourcer dans leur terroir.
En analysant de près la situation actuelle de notre cercle de Tenenkou, nous sommes bien tentés de dire qu'en réalité, rien n'a changé fondamentalement dans la politique de l'Etat dans cette zone. De l'indépendance à nos jours, le cercle de Tenenkou semble un cas particulier au Mali, avec son compagnon d’infortune le cercle de Youwarou.
Voilà deux zones qui n'ont jamais été réellement intégrées dans les stratégies de gestion des différentes rébellions qui ont secoué le pays. Leurs populations ont toujours été des victimes réelles à l'instar de celles des régions du nord, mais elles ont toujours été survolées quand il s'agit des solutions et des aides à apporter.
Le développement des infrastructures routières y est encore une chimère, abstraction faite du projet en cours de construction de la route Ke-Macina Diafarabe-Tenenkou. Le Massina est resté longtemps une zone délaissée et la nature ayant horreur du vide, les djihado-terroristes se sentent en terrain conquis. Pendant que le gouvernement ne cesse de faire de la fixation sur le cas Kidal, le centre se meurt à petit feu.
Pour redonner l'espoir d'une nouvelle vie aux populations de cette zone du Massina (Tenenkou, Youwarou, etc.), seule la présence de l'Etat est la solution qui vaille. Les Fama ont certes fait quelques interventions que nous saluons au passage, mais seule une présence permanente permettra de mettre fin à cette situation de désolation. Les endroits où ces djihado-terroristes se trouvent sont presque connus de tous. Aux FAMA de s'organiser en conséquence et de faire le nécessaire.
Ce qui est encore choquant, malgré cette situation de détresse à Diafarabe, Toguere koumbe et partout dans le centre, on nous donne l'impression à Bamako que tout va bien au pays. Attention à la myopie de gouvernance !