Invitée pour animer la cérémonie de remise de trophées et récompenses aux lauréats de la 4e édition du concours «Talents de presse» à la Résidence Wassoulou (le vendredi 22 septembre 2017), Mama Toumani Koné (digne héritière du regretté Toumani Koné, l’icône des ngonifô ou musique des chasseurs) a sublimement été à la hauteur du spectacle attendu. Elle a émerveillé les invités et surpris ceux qui l’avaient perdue de vue ces dernières années.
Mama Toumani Koné ! Une jeune artiste que nous avions perdue de vue ces dernières années. Pas par désintérêt pour sa musique, car nous l’avons toujours considérée comme l’un des meilleurs espoirs (avec Coumba Sira Koïta, Doussou Bagayoko…) de la musique tradi-moderne malienne, parce que nous avons pris une certaine distance avec le show business national. En étant conscient que quand les requins débarquent en eau douce, le menu fretin a intérêt à se mettre à l’abri. Elle a régalé les invités de la cérémonie de remise de trophées et récompenses de la 4e édition du concours «Talents de presse», le 22 septembre dernier.
Mieux, en live avec un groupe restreint (kamalen ngoni et djita ou calebasse). Mais avec un son digital que peuvent envier beaucoup de productions des studios du pays ces dernières années. Elle a subitement donné une âme à ce cadre (jardin) austère (ce qui n’est pas paradoxal pour un hôtel en quête de luxure) de la Résidence du Wassoulou de la Diva Oumou Sang, pardon, Oumou Sangaré. Autant être complet pour ne pas se faire taper sur les doigts par les fans du «Wélé wélé wentou» ou se faire maudire par ces braves femmes de «Kôsira» (trajet entre les villages et les marigots ou rivières où les femmes vont faire la lessive, la vaisselle et se baigner dans l’intimité des coquineries).
Au plaisir de retrouver sa beauté physique et vocale, nous avons eu droit à une autre surprise de taille : instrumentiste ! Nous avons été émerveillés de la voir caresser le kamalen ngoni et produire des mélodies suaves et envoûtantes comme tous les virtuoses de cet instrument mythique du Wassoulou, sa région naturelle. Il est vrai que nous avons été toujours séduits par sa farouche volonté de s’affranchir (sans se renier) de la traditionnelle école du bercail et de trouver sa propre voie dans le showbiz. Le résultat est tout à fait fascinant.
En effet, force est de reconnaître qu’elle a franchi des pas de géants. À travers les trois titres interprétés le 22 septembre dernier pour les invités de l’OJRM et du Club des Amis de l’Union européenne. La quarantaine bientôt à l’horizon, Mama Toumani a gagné en maturité avec une éblouissante déviation vers le blues. Nous avons particulièrement apprécié les titres «Tolon» (lier l’utile à l’agréable) et «Démisinw» (les enfants). Deux titres très acoustiques qui flirtent avec un blues très raffiné. Et la maturité de la jeune artiste est aussi perceptible dans les titres plus engagés. Dans «Démisinw», par exemple, elle, Mama Toumani, interpelle la société, les décideurs et même les artistes à jouer pleinement leur partition pour mieux protéger et éduquer les enfants en leur assurant les meilleures conditions d’épanouissement.
Une fleur qui tient ses promesses de moisson
Révélation de l’émission «Top Etoiles» (ORTM) au début de la décennie 2000 (avec Doussou Bagayogo et Coumba Sira Koïta) et originaire de Tièblena (Wassoulou), Mama a toujours baigné dans la musique dès sa naissance. Elle est en effet la fille du célèbre et regretté Toumani Koné, virtuose du Doson ngoni et précurseur de la musique des chasseurs au Mali. «La musique est un héritage dans notre famille. Ma grand-mère paternelle, dont je porte d’ailleurs le nom, était une grande cantatrice. À sa disparition, c’est mon père, Toumani Koné (Paix à son âme !) qui a pris la relève. Depuis le décès de ce dernier, j’essaye de reprendre le flambeau avec la bénédiction des parents et le soutien de vous tous», nous avait confié Mama lors d’une rencontre à Mali K7 (maison de production et de distribution) en 2008.
Elle a inauguré sa discographie avec un somptueux et naturel «Hommage à Toumani Koné» (2002), son défunt père. Le second opus date de 2004 et a été baptisé «Diangnèba». Ce bel élan se poursuit avec «Kanuniognon» (2008) et «Dunu Kassikan» (chant du coq, mai 2015). Enregistré et produit en France, ce dernier album compte huit titres avec un subtil mélange de «World music», «coupé-décalé» et des musiques traditionnelles. Ses progrès ne nous surprennent guère car Mama Toumani Koné a la modestie d’apprendre auprès de ses aînés.
«J’ai toujours bénéficié du soutien des amis de mon père», aime-t-elle revendiquer. Et sans doute aussi de son mari Souleymane Sidibé, artiste-musicien du Wassoulou, qui accompagne souvent la diva Oumou Sangaré dans ses tournées africaines et internationales.
D’une fascinante beauté vocale, virtuose de kamalen ngoni, humble, mais ambitieuse, Mama Toumani Koné est aujourd’hui bien armée pour conquérir le showbiz international. Plein succès à toi, l’héritière des stars et divas du Wassoulou !