Le Conseil de sécurité des Nations Unies, avec la résolution 2364 du 29 juin 2017, a sollicité, du Secrétaire Général de l’instance internationale, Antonio Guterres, un rapport trimestriel sur l’état d’exécution de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Conformément à cette disposition, un rapport a été produit et distribué le 28 septembre 2017. Sa lecture a suscité, à Bamako, la surprise de la part du gouvernement.
Pourtant, par sa structure et son ton, le texte possède la première qualité d’un rapport de ce genre : l’objectivité. Circonstancié, autour des dix points suivants : principaux faits politiques, principaux faits nouveaux en matière de sécurité, situation sur le plan des droits de l’homme, situation humanitaire, développement économique et sauvegarde du patrimoine culturel, exécution du mandat et planification de la transition, capacités de la mission, sûreté et sécurité du personnel des Nations unies, déontologie et discipline, Observations.
Sur ces dix points, les cinq premiers sont relatifs à l’état d’exécution de l’Accord, les quatre suivants à la MINUSMA.
La surprise, pour ne pas dire le désaveu du gouvernement malien, peut avoir, pour source, la remarque suivante, extraite des « observations » : « Je suis profondément préoccupé par les récents événements qui ont secoué le Mali, en particulier la reprise des affrontements violents entre groupes armés signataires de l’accord ainsi que l’agitation politique entourant le referendum sur la Constitution. Ces événements sont symptomatiques des clivages profonds divisant la société malienne, qu’il convient de transcender pour donner un nouvel élan au processus de paix. Malheureusement, presque aucun progrès n’a été fait dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. »
Le gouvernement malien ne saurait être satisfait de telles remarques. Il ne cesse de souligner que d’importantes avancées ont été faites dans la mise en œuvre des dispositions de l’Accord. Sur ce point, il se prévaut d’un bilan : un nouveau découpage territorial a eu lieu avec la création des régions de Ménaka et Taoudéni, les autorités intérimaires ont été installées, une conférence d’entente nationale a été organisée, la Charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale a été produite.
Le rapport du Secrétaire Général de l’ONU n’ignore nullement ces avancées. Il les juge insuffisantes et menacées de caducité si rien n’est entrepris pour les renforcer. Une leçon est à retenir de la publication de ce rapport. Il s’agit d’un rapport d’étape rédigé au bout de trois mois d’observation depuis la résolution 2364 prorogeant jusqu’au 30 juin le mandat de la MINUSMA. Au cours de ce trimestre, le rapport constate ce que l’on ne saurait contester : « La situation politique et les conditions de sécurité se sont considérablement dégradées depuis mon précédent rapport » ; et l’auteur d’étayer son affirmation : « La reprise des combats entre les groupes signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, dans le nord du pays, l’insécurité croissante dans le centre du pays, la montée de l’agitation politique entourant la révision de la Constitution ont retardé sa mise en œuvre. »
Concrètement, l’auteur du rapport attire l’attention sur une série d’insuffisances relevées dans la mise en œuvre des « mesures politiques et institutionnelles ». Certes, les autorités intermédiaires sont installées ; cependant, elles « ne sont pas encore pleinement opérationnelles du fait des rivalités internes et de l’insuffisance des moyens administratifs et budgétaires et des capacités de planification. » Se prononçant sur « le redéploiement de l’administration civile dans le nord et le centre du Mali », M. Gutteres constate : « Au 11 septembre, dans les régions septentrionales et dans la région de Mopti, seuls 30% des agents de l’Etat étaient à leur poste, contre 38% au mois de janvier. » L’Accord a prévu la rédaction d’une Charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale. La Charte a été rédigée et « présentée le 20 juin au Président Keïta (…) La CMA l’a immédiatement rejetée, à la suite de la décision prise par le Gouvernement de ne pas y mentionner en tant qu’entité politique et institutionnelle. »
Le rapport du Secrétaire Général de l’ONU à une prise de conscience : l’Etat joue sa partition, les rebelles jouent la montre. La solution : que l’Etat s’assume, assume les fonctions qui sont les siennes.