« Dialogue et diversité culturelle » étaient au coeur d’une causerie-débat organisée jeudi le Réseau des acteurs culturels du Mali dénommé KYA. La rencontre s’est déroulée au palais de la culture Amadou Hampaté Ba en présence d’un public important dont de nombreux étudiants. Le modérateur, Mamou Daffé, le président du réseau, a introduit les principaux animateurs : l’écrivain Doumbi Fakoly, l’ethnologue Salia Malé, l’écrivain et sociologue, Fodé Moussa Sidibé, l’éditeur et président de l’Association Mali-Valeurs, Ismaël Samba Traoré, et le président de l’Association Acte 7, Adama Traoré.
Dans la crise institutionnelle et sécuritaire sans précédent que vit notre pays depuis un peu plus d’un an, certaines de nos valeurs culturelles apparaissent comme des échelles pour sortir du gouffre. Les Maliens ont besoin de se retrouver autour de ce qui les unit et le dialogue reste le meilleur chemin vers la paix, dit-on. Pour Mamou Daffé, ce dialogue permettra de définir ensemble les éléments fondamentaux, au premier rang desquels notre diversité culturelle, qui constitueront le socle du nouveau Mali. Notre pays se caractérise par la richesse de ses expressions artistiques et culturelles. De Kidal à Kayes, chaque peuple a sa particularité. Et c’est cette mosaïque qui a toujours fait le charme de ce pays.
Les Maliens doivent garder à l’esprit d’appartenir à une seule nation : une histoire, une civilisation, une communauté. Selon Martin Lutter King, « nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons tous mourir ensemble comme des idiots ».
Il s’agit de répondre à ces questions : Comment vivre ensemble dans la complémentarité ? Comment passer d’un « choc des cultures » à un véritable dialogue interculturel ? Comment amorcer le changement, pour l’émergence d’un nouveau Mali ?
Dans ce contexte, le monde des arts et de la culture doit se mettre au premier plan et assumer sa mission historique en ralliant tous les fils du pays autour de la préservation et de la sauvegarde du patrimoine culturel du Mali.
Les acteurs culturels du Réseau KYA sont conscients que par une bonne compréhension des notions de « dialogue » et de « diversité culturelle », la jeunesse saisira les enjeux de la construction d’un nouveau Mali, et évitera de reconduire les erreurs du passé. Ainsi conformément à son programme : « Une action et une vision pour bâtir l’avenir », le réseau propose une série de causeries-débats à Bamako, Ségou et Mopti, avec la jeunesse et les intellectuels de notre pays, pour contribuer à la recherche d’une paix durable, accompagner le changement, la réconciliation nationale et aider à la renaissance du Mali. Ces échanges se feront en français et bambara avec la participation de toutes les couches sociales du Mali. Les recommandations des différentes rencontres seront largement diffusées et transmises aux institutions de la République.
Le projet causerie-débat du Réseau KYA est réalisé en partenariat avec le ministère de la Culture, la Jeune chambre internationale du Mali et soutenu par le centre norvégien Mimeta pour la culture et le développement.
Pour nombre d’animateurs, la crise malienne est d’abord et avant tout une crise de gouvernance. C’est la mauvaise gestion des affaires de l’Etat qui nous a conduit à cette situation. Ismaël Samba Traoré estime que la culture malienne est une culture apaisée, et qu’elle dispose en son sein de nombreux éléments qui favorisent l’entente et la cohésion des différents groupes. Il ne s’agit donc pas d’une crise identitaire ou d’une crise entre les différentes composantes de la population malienne.
L’écrivain Doumbi Fakoly estime la création par le gouvernement d’une Commission Dialogue Réconciliation n’est pas du tout approprié car elle conforte la thèse d’un conflit entre les populations maliennes, alors que ce n’est pas le cas.
Quant à Fodé Moussa Sidibé, il estime que l’Africain en général se prend pour ce qu’il n’est pas. Pour lui nous avons abandonné nos traditions pour nous attacher des religions et croyances qui sont venues d’ailleurs, ce qui explique selon lui, toutes les difficultés que nous connaissons. Il semble qu’au Mali, on avait oublié nos traditions. On nous avait dit que les Africains n’avaient pas de religion alors que ce sont ces traditions qui sont à la base des religions. Et d’ailleurs, nous met-il en garde, aucun peuple ne s’est développé avec la culture et la civilisation d’autrui.