Afin de lutter contre la malnutrition et le chômage, l’association Helvetas et des chercheurs maliens veulent créer un marché dédié à cette céréale autrefois plébiscitée contre la famine
La charrette, tirée par un âne au trot, entre dans un petit village malien près du Burkina Faso. Le vent se lève. Bientôt, il tourbillonnera et amènera un de ces orages secs qui emportent les premières couches de la terre. La pluie tant attendue tombera enfin, mais matraquera le sol sec sans s’infiltrer. Les hommes courent décharger la charrette remplie à ras bord de ce qui semble être un tas de paille ou de mauvaises herbes. Pourquoi se donner tant de mal?
Lire également: Le teff, la petite graine qui monte
Ici, tout le monde sait qu’il s’agit du fonio, une légumineuse qui permet de se nourrir et de générer un revenu. L’une des seules options, en réalité, sur ces sols épuisés par le coton ou frappés par le changement climatique. Cette graine indigène pourrait répondre à deux des problèmes principaux du Mali: le chômage et la malnutrition qui, selon l’Unicef, tuent bien plus que les balles. Pourtant, en 2016, la production de fonio était de près de 25 000 tonnes seulement, une paille comparée aux plus de 8 millions de tonnes de céréales récoltées dans le pays.
Faim invisible
Les économistes classent le fonio comme une semence «sous-utilisée», c’est-à-dire plantée par des millions d’Africains mais peu ou pas encouragée par les politiques publiques qui subventionnent en revanche «l’or blanc», le coton et les engrais chimiques qui l’accompagnent. Le fonio et autres semences sous-utilisées sont des graines de solutions ignorées, alors que la famine connaît une recrudescence sur le continent. Ignorées par tous? Non! Parmi les irréductibles, et en première ligne depuis huit ans, on trouve l’organisation suisse Helvetas.