Faible affluence des citoyens, manque de motivation des membres de la commission, faible implication des autorités politiques et administratives, c’est le triste constat qui se dégageait, mercredi et jeudi, à notre passage dans certains centres de révision des listes électorales, plus de deux semaines après le démarrage de ces opérations, le 1er octobre dernier.
Depuis le premier octobre dernier, les opérations de révision électorales sont en cours dans notre pays, et ce, jusqu’à la fin du mois, le 31 octobre.
Qu’est-ce qu’une révision des listes électorales ?
Selon le Code électoral, les listes électorales font l’objet d’une révision annuelle du 1er octobre au 31 décembre de chaque année. Les travaux d’établissement et de révision des listes électorales sont conduits par une Commission administrative placée sous l’autorité du représentant de l’État au sein de la collectivité.
Cette révision comporte trois temps forts. Ainsi, le mois d’octobre est consacré à des opérations de radiation, de transfert des électeurs d’une commune à une autre et les ajouts des nouveaux majeurs par les commissions administratives.
Au cours du mois de novembre, la commission procède à l’établissement des procès-verbaux, aux dépôts des tableaux rectificatifs ; à la transmission des copies des tableaux rectificatifs aux préfets et au gouverneur du District de Bamako.
En troisième lieux, ces derniers lancent un avis à la population de ce dépôt par affichage des listes provisoires aux lieux habituels. Les citoyens ont un délai de 24 heures pour faire leur réclamation (erreur sur les noms, dates et lieux de naissance, omissions…).
À la suite de ces affichages, les réclamations sont réceptionner, examiner et la notification des décisions de rejet des réclamations est faite aux citoyens.
En cas de litige, l’affaire est transmise au juge administratif sur les recours des citoyens contre les décisions des commissions administratives qui en notifie une décision à l’autorité administrative.
En dernier lieu, c’est à l’issue de ces différentes étapes, généralement au cours du mois décembre, à l’acheminement des tableaux rectificatifs définitifs en prenant en charge les décisions de justice d’établissement des procès-verbaux de clôture des opérations.
Ces tableaux rectificatifs sont ensuite transmis au ministère de l’Administration territoriale après la clôture des opérations pour l’établissement définitif des listes électorales.
Précisons que les commissions administratives chargées de la révision annuelle des listes électorales ont pour mandat de procéder à des opérations de radiation, de transfert des électeurs ainsi que la validation de l’inscription des nouveaux majeurs.
Les commissions siègent au niveau des communes. Après plus de deux semaines de travaux, nous sommes intéressés à cette opération qui est capitale pour la confection d’une liste électorale assainie et fiable.
Notre tour d’horizon a commencé par le centre secondaire d’état civil de Médina-Coura QG de la commission locale de révision de la commune II.
Dans cette commune du centre-ville, le président de la commission, Sinaly DOUMBIA, nous a confirmé que les opérations ont effectivement démarré le 1er octobre 2017, conforment à la loi électorale.
La commission qu’il préside est composée de représentants des parties politiques et de services techniques de l’État, est à pied œuvre, même si l’on déplore les conditions de travail difficiles. À notre passage, les représentants des partis politiques étaient présents dans leur majorité. À l’exception du PRVM Faso-Ko ; de la CNAS Faso-Hèrè ; de l’ANCD-Mali ; du PDES, selon le président.
Évoquant les difficultés rencontrées, le vice-président de la commission, Foussséini OUOLOGUEM, a souligné la non-disponibilité des registres de la marie et de la justice pour identifier les cas décès concernés par la radiation et les cas d’invalidation du droit de vote en cas de condamnation.
La solitude et lassitude
Au-delà de ces difficultés d’ordre organisationnel, les membres de cette commission ont déploré également le manque d’implication des autorités administratives et surtout politiques dans la mobilisation des citoyens ainsi que la motivation des agents chargés des opérations de révision.
« À part le maire de la commune le premier jour, et le conseiller juridique du gouverneur du District, aucune autorité n’est venue nous rendre visite », a déploré Béidy KOUYATE, l’un des membres de la commission.
De même, M. KOUYATE a aussi déploré le manque de motivation financière pour les membres de la commission.
« Les représentants des partis politiques sont à la charge de leur formation politique qui n’ont pas souvent assez de moyens. Cette situation est à l’origine de beaucoup de cas d’abandon », a-t-il dénoncé avant d’ajouter : « C’est notre président qui nous paye de l’eau fraiche et souvent la nourriture pour qu’on puisse rester travailler pendant toute la journée ».
C’est aux environs de 11 heures que la commission a reçu son troisième visiteur de la journée pendant qu’une partie des membres de la commission était sous l’arbre.
Ce dernier, Souleymane DIARRA, était venu faire son transfert de la liste de Diomi (Kati) à l’Hippodrome où il réside actuellement. Alors que la commission siège depuis déjà plus de deux semaines, M. DIARRA nous a confié qu’il n’avait pas encore eu vent de cette opération.
Manque d’entrain
Le moins qu’on puisse dire, c’est que dans cette commune qui compte 12 quartiers, et où-l-on estimé à 118 639 le nombre d’électeurs potentiels, les citoyens qui ont visiblement d’autres chats à fouetter, ces derniers temps, ne semblent pas se bousculer aux portillons pour ces opérations de révision des listes électorales.
À la date du mercredi, le nombre de radiations était seulement 15 et le nombre de transferts de 28 cas, selon le responsable de la commission. Des chiffres jugés insignifiants par les membres de la commission qui espère avoir une bonne affluence au cours du dernier virage de ce mois d’octobre.
Officiellement lancées le 1er octobre, les opérations de révision des listes électorales n’ont finalement commencé que le mardi 3 octobre 2017 en commune III du district de Bamako.
Un retard qui s’explique, selon le président de la commission locale de révision des listes, Boubacar SANGARE, par la mise en place tardive des membres de la commission, le retard accusé par le gouvernorat dans la délivrance des documents supports.
Absence des partis politiques
Sur les 28 partis politiques qui existent au niveau de cette commune, 24 ont répondu présents pendant que 4 autres, dont le PRVM Faso, le FAMA, le parti Yèlèma et le PCD, manquaient toujours à l’appel, à notre passage.
Au niveau de cette commune, fort de 21 quartiers, on indique des difficultés dans la mise en place de nouveaux centres de vote dans certains quartiers, à cause des conflits existant, notamment entre Samanko-Farako et Diakoni. Pour ce faire, les autorités préconisent la création de deux centres supplémentaires.
Le nombre d’électeurs potentiels est estimé à 91 611 citoyens dont 41 357 femmes et 50 254 hommes repartis entre 195 bureaux de vote.
Grâce à l’engagement des autorités communales, la commission a eu accès au registre de décès de la mairie, des hôpitaux pour faire l’état des lieux des cas de décès. Au total, la commission a enregistré à la date 18 octobre 593 cas décès qui ont été tous radiés de la liste, selon le président. De même, on note des 18 cas de transfert. Au-delà des registres, les membres de la commission se basent aussi sur les témoignages des représentants des quartiers pour procéder aux radiations. La présentation d’une pièce d’état civil comme l’acte de décès permet de faire cette opération.
À l’image de ce qui se passe en commune II, les membres de la commission de révision de la commune III ont déploré l’absence ou l’insuffisance de mesures d’accompagnement pour le bon déroulement des opérations.
Les services techniques boudent les travaux
Selon nos interlocuteurs sur place, les représentants des services techniques de l’État ne siègent pas au sein de la commission malgré leur statut de membre.
Autre commune, autre réalité, en commune IV du District de Bamako, les opérations ont effectivement démarré le 1er octobre selon le doyen Ibrahim Bia ZERBO, président de la commission.
Là aussi, on déplore une timide affluence des citoyens à la mairie de Lafiabougou où siège la commission communale.
Sur les 27 partis présents, six dont le PSP, la CNAS Faso Hèrè ; le RPDM ; le BMDT, l’ANCD-Mali n’avaient pas encore répondu à la sollicitation des autorités du District.
Dans cette commune, on dénombre 8 quartiers. Le nombre d’électeurs potentiels (voire déjà inscrits) est estimé à 143 757 individus. Cette année, selon le président, il est attendu, dans cette commune, l’arrivée de 5 254 jeunes qui atteignent l’âge de la majorité.
À notre passage, la situation des opérations se présentait comme suite : nombre de radiation (2) ; nombre de transfert (73) et nombre de validation (nouveaux majeurs), 3 personnes sur les 5 254 jeunes attendus.
Selon le président de cette commission, les cas de transfert et de validation sont individuels et se font sur présentation de la carte NINA ou du récépissé.
Il a insisté sur le fait que la bonne réussite des opérations de révision dépend de ce mois d’octobre consacré exclusivement à cette tâche.