Le 19 novembre 1968, le lieutenant Moussa Traoré renversait le président Modibo Keïta. Le Mali venait de connaître son premier coup d’Etat. L’événement fut différemment perçu. Il ne saurait en être autrement si l’on retient que l’homme qui venait de perdre le pouvoir avait ses inconditionnels dont certains militants de son parti.
Leur point de vue peut être mis en parallèle avec celui, des économistes et des historiens. Un recoupement, à partir d’appréciations divergentes, permettra de se faire une idée de la manière dont, en définitive, l’événement fut accueilli par le peuple malien.
D’après un militant venu tard à l’US-RDA, ce que beaucoup ignorent qui en ont fait, à tort, un proche collaborateur de Modibo Keïta : Le 19 Novembre 1968, un groupe de quatorze officiers subalternes perpétrait un Coup d’Etat militaire au Mali.
Ce groupe d’officiers subalternes avait ainsi choisi de renverser le régime démocratique et populaire, mis en place par l’Union Soudanaise RDA et animé par toutes les forces vives de la nation, le régime dirigé par le Président Modibo Kéïta, guide bien aimé du peuple Malien, homme d’Etat et patriote africain, respecté et admiré du monde, ennemi irréductible du colonialisme et du néo-colonialisme, défenseur internationalement reconnu de la Paix, de la Liberté et du Progrès des Peuples.
Ce groupe d’officiers subalternes avait choisi de tenter d’implanter un régime de dictature militaire néocolonialiste. Il avait donc choisi de se dresser tout seul contre le Peuple ; il avait choisi de tenter d’arrêter et même de faire reculer la « Roue de l’Histoire. (Défense et illustration de l’action de l’USRDA, Bamako, Editions Populaires du Mali, 1996, page 17.)
Une telle perception est-elle conforme à la réalité ? L’économiste Amadou Tiégoué Ouattara ne répond pas à la question, mais porte sur le même événement un autre regard : Le régime mis en place par l’Union Soudanaise RDA (…) dirigé par le président Modibo Kéïta, n’avait plus d’assises populaires, plus de prise sur les faits. Face à ce qui se passe en cette « journée du 19 novembre 1968, (…) personne ne se sent vraiment habilité à prendre une position au nom du Parti et du régime. Les nouvelles structures (CNDR, Délégation législative) reposent sur un centralisme sans démocratie. Et chacun attend les instructions du sommet, mais celui-ci n’est plus en mesure de s’exprimer (…) En tout cas, (l’) action (de l’armée) qui n’est pas dépourvue de courage parce qu’elle pouvait échouer et conduire ses auteurs à une disparition certaine reçoit l’approbation populaire. La preuve de la fragilité des institutions est faite. (Le Destin du socialisme malien, Editions Imprimerie du Mali, Bamako, 1978, page 257)
Telles sont, entre autres, deux appréciations portées sur les événements du 19 novembre 1968. L’événement en a surpris plus d’un, y compris ses auteurs. A la surprise succède la liesse populaire ; l’historienne Bintou Sanankoua témoigne : Les clameurs, qui s’élèvent jusqu’aux hauteurs des collines qui entourent la capitale, les messages de félicitations qui viennent déjà à 15 h 30 des Régions les plus reculées du pays pour approuver les promoteurs du coup d’Etat traduit la profondeur du ressentiment du peuple. (La Chute de Modibo Keïta. Editions Chaka, Paris, page 257)
Et son collègue Modibo Diagouraga de conclure : « Tout s’est donc bien passé pas de résistance, pas d’effusion de sang. Et la vie continue ». (Modibo Keïta. Un destin. Editions Kartahala, Paris, 1992, page 136).
C’était, il y a quarante-neuf ans, presque un demi-siècle. L’événement est historique et l’histoire n’est pas une science exacte ; d’où les divergences d’interprétations.