Si les campagnes électorales constituent l’occasion, pour les candidats, de décliner leur projet de société en touchant à tous les secteurs socio-économiques et culturels, cette fois-ci il existe des lignes rouges à ne pas franchir.
Il s’agira pour l’écrasante majorité des candidats à la présidentielle de se méfier de certains sujets ou du moins de les aborder avec prudence. Parmi ces sujets tabous figurent le bilan d’ATT, les questions de sécurité, l’armée, l’autorité de l’Etat…
Les candidats issus de la mouvance présidentielle comme Mountaga Tall, Ibrahim Boubacar Kéita, Dramane Dembélé, Soumaïla Cissé, Modibo Sidibé… seront tenus par un nécessaire devoir de réserve sur certaines questions susceptibles d’être le talon d’Achille du président déchu, ATT.
Chacun d’eux a participé à un degré ou à un autre au partage du gâteau consensuel de l’ex-chef de l’Etat. Par décence politique, même l’opposition radicale incarnée par Dr. Oumar Mariko ne devrait pas user de la liberté de ton pendant la campagne.
Même s’il a pu dénoncer par le passé des dysfonctionnements, des abus du régime ATT, Oumar Mariko pourrait se retrouver en porte à faux au bilan de son représentant dans le gouvernement d’ATT. Cheick Oumar Sissoko, alors ministre de la Culture, avait défrayé la chronique à cause de la gestion des fonds à lui alloués pour l’Opéra du Sahel.
Même s’il pourrait se targuer d’être de ceux qui ont dénoncé des éléments de la gestion d’ATT, IBK qui s’est souvent démarqué de cette gestion, risque de se faire prendre aux mots sur certains sujets comme la gestion efficiente des biens de l’Etat. Alors qu’il était président de l’Assemblée nationale, IBK faisait couler de l’encre et de la salive avec son train de vie princier.
Modibo Sidibé, lui, ne pourrait pas critiquer les points faibles d’ATT pour avoir été l’un de ses plus proches collaborateurs à la présidence mais aussi pour avoir été son Premier ministre.
Le débat sur l’école sera aussi une patate chaude entre les mains de plusieurs candidats. Parmi eux figure Modibo Sidibé qui a conduit le Forum sur l’éducation à des coups faramineux sans résultats probants.
L’ »Initiative riz » constituera pour lui un sujet à aborder avec prudence pour ne pas s’attirer les foudres d’adversaires comme Oumar Mariko qui fait des zones rizicoles son bastion électoral. Ce qui ne veut pas forcément dire que le programme a été un échec. Soumaïla Cissé goûtait sa présence aux côtés d’ATT lors des grandes cérémonies. Pendant ces campagnes, il aura du mal à se démarquer de l’étiquette de pro-ATT.
Le coup d’Etat du 22 mars pourrait également être une corde raide pour les candidats à la présidentielle. Les candidats pro-junte seront dans l’obligation de revoir leur copie selon la volonté des électeurs dont beaucoup commencent à dénoncer l’acte posé par Sanogo & Co.
Mountaga Tall, candidat naturel du Cnid/Fyt, part avec un handicap notable. Il a dit avoir été fier de faire le déplacement de Kati le lendemain du coup d’Etat. A trop tirer sur cette question, Mountaga risque un vote sanction et à la présidentielle et aux législatives qui reste sa chasse gardée.
Le candidat du parti majoritaire, Dramane Dembélé, aura le lourd fardeau de prouver aux électeurs que ses cinq années à la tête de la direction nationale de la géologie et des mines (DNGM) ont servi la patrie et non le parti ou sa propre personne.
Les autres candidats comme Soumana Sako, Housseyni Amion Guindo, Moussa Mara, les moins impliqués de la gestion d’ATT, pourront-ils tirer bénéfice de cette situation de leurs adversaires tenus par un devoir de réserve ?