Les faits se sont produits à Mopti où des agents du fameux Bureau de vérificateur général (BVG), coûtant une fortune au trésor public, auraient passé plus de deux mois à contrôler certains démembrements régionaux des structures d’Etat. Cependant, aussi bizarroïde que cela puisse paraitre, les vérificateurs auraient bénéficié des gâteries qui, défiant toute logique de courtoisie et d’hospitalité certes bien propres à nos traditions, dépassent les bornes morales de ce qui est concevable. Lire le décryptage de notre correspondant.
En fait, des filles à la morphologie irrésistible allaient offrir, semble-t-il, aux agents du Bureau de vérificateur général jusqu’à leurs lieux de résidence, des mets culinaires spéciaux préparés dans les familles de ceux qui doivent être contrôlés. En outre, pour faciliter le travail à « l’appareil digestif » les menus étaient accompagnés de boissons aux goûts particulièrement raffinés et exquis. Les redoutés et très redoutables vérificateurs où enfants issus du saint sacrement bénéficieraient de ces précieux services tout au long de leur séjour à Mopti.
Il convient de signaler au passage que ces demoiselles callipyges (aux yeux et à la poitrine ensorcelants) qui n’entendent et ne voient que l’argent en vue d’améliorer au quotidien leurs conditions de vie ont droit à un double traitement. Ah oui ! Elles ont raison, on ne fait rien pour rien. Du coup, elles sont pouponnées par ceux qui sollicitent leur docilité (les contrôlés) que ceux qui reçoivent leurs services (les contrôleurs). Deux questions très pertinentes viennent alors à l’esprit. Le frais de transport (aller - retour), l’hébergement, la restauration et les primes des inspecteurs sont-ils à la charge du pauvre contribuable Malien ? Le but des contrôles consiste-t-il à assoir la bonne gouvernance et à préserver le maigre denier public ?
Si la réponse est oui, alors on ne sait plus à quel saint se vouer. Car force est de constater que les inspecteurs et les responsables inspectés qui dirigent les structures d’Etat sont tous aussi corrompus les uns que les autres. Sinon, pourquoi tant de collusions entre les deux ? Il incombe au gouvernement de revoir les textes en la matière surtout avec la naissance de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite.
Tout le monde sait que les inspecteurs se taisent sur un tas d’anomalies et d’illégalités patentes en contrepartie des gâteries dont ils bénéficient. Et c’est ce qui fait que depuis l’avènement de la démocratie au Mali, les fonctionnaires riches que jamais n’ont peur de rien. Tout s’arrange pourvu qu’on accepte de donner une partie des biens mal acquis. La probité, la piété et la crainte de Dieu sont devenus de vains mots pour une majorité écrasante de celles et de ceux qui sont assidus dans les lieux de culte. Savons-nous à quel Dieu sommes-nous en train d’adresser nos dévotions et invocations ?
Ce n’est pas le directeur régional des impôts de Mopti qui pourrait dire le contraire dont le bâtiment vétuste vient d’être réhabilité avec toutes les commodités à coup des dizaines de millions de nos francs dans des conditions qui restent encore à éclaircir. Des chantiers gigantesques sont aussi visibles dans l’enceinte de l’INPS régional de Mopti.
Il est temps que l’Etat affiche sa fermeté pour que le bien commun soit judicieusement utilisé et équitablement réparti pour le développement de ce pays, n’en déplaisent, aux syndicats corrompus qui ne pensent qu’à leurs conforts personnels. À preuve, au moment où les enfants de pauvres Maliens sont renvoyés de l’école à cause d’une simple tenue, ceux de nos fonctionnaires étudient dans les grandes capitales du monde. L’inédit c’est aussi le débrayage de plusieurs semaines observé, il y a quelques mois, par les secteurs de la justice, de la santé et de l’éducation demandant de meilleures conditions de travail dont l’augmentation des salaires.
Ce bilan tristement réel assombrit le cœur de bon nombre de nos concitoyens. Mais une lueur d’espoir est désormais perceptible à l’horizon grâce à la mise en place de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite. Ce benjamin qui, enfin, entend planter et fleurir l’arbre de la gestion saine des ressources publiques au Mali va certainement se singulariser d’autres structures de contrôle, de prévention et de répression à travers ses approches novatrices.
Le magistrat chevronné Moumouni Guindo qui chapeaute ce service avec maestria bénéficie, pour le moment, d’un écho favorable auprès des Maliens qui espèrent que les milliards ne seront plus volés par qui que ce soit. Et dans le cas contraire, que la saine justice puisse pleinement jouer son rôle afin que les auteurs de détournements, de malversations, de surfacturations et de marchés fictifs vomissent le sang des Maliens qu’ils ont bu avec allégresse. Vivement qu’il en soit ainsi !
Dougoufana Kéita