Tous les regards sont rivés vers l’année 2018 qui arrive dans trois semaines. Et pour cause, le gouvernement doit organiser deux scrutins dont le plus important est sans aucun doute l’élection présidentielle. La majorité présidentielle travaille pour conserver le pouvoir avec à la clé un second mandat pour Ibrahim Boubacar Kéïta. De son côté, l’opposition manœuvre pour l’alternance. Il y a une autre catégorie d’hommes et de femmes nantis de leurs fortunes ou de leurs parcours professionnels, qui ont comme dénominateur commun leur non appartenance à la classe politique. Ils vont à la conquête du pouvoir suprême à travers des clubs de soutien et autres mouvements à caractère politique et se dévoilent les uns après les autres dans un contexte précaire.
L’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger peine à être appliqué. Des zones entières du pays échappent au contrôle de l’Etat central. Des centaines d’écoles sont fermées au nord et au centre. Des attaques quotidiennes contre les Forces armées de défense et de sécurité du Mali et les forces étrangères avec leur lot de morts. Le Président de la République IBK a montré ces derniers temps des signes inquiétants de faiblesse dans la gouvernance du pays. En dépit de la fragilité du contexte actuel, l’Etat a besoin de s’affirmer surtout que l’une des raisons du choix massif de l’électorat en 2013 était le fait qu’une partie du peuple malien avait foi en la capacité de l’ancien Premier ministre d’Alpha Oumar Konaré à restaurer l’autorité de l’Etat. Aujourd’hui, le sentiment général est qu’il n’y a pas d’Etat. Certains diront que « la République est dans la rue ». Avec les calculs et autres petits jeux autour des préparatifs du second mandat devenu une obsession chez le Président Kéïta et son entourage, il ne faut pas s’attendre à la prise de décisions impopulaires mais vitales pour la survie de la République. De l’échec du projet de révision de la constitution en passant par la suspension des effets de la loi portant prévention et répression de l’enrichissement illicite sous la pression du Syndicat national de l’administration publique (Syntade) sans oublier l’affaire Ras Bath, les décisions prises au sommet prouvent le manque d’assises du Chef de l’Etat lui permettant de résister à certains vents violents.
L’élection présidentielle de 2018 sera l’une des plus discutées du Mali démocratique. Le pire des choses qui peut arriver à la République en 2018 est la non-tenue de cette élection aux enjeux multiples. Tout peut arriver dans ce cas. La classe politique, la société civile et les autres composantes de la nation peuvent difficilement se mettre d’accord sur une transition consensuelle, réclamée par des voix comme celle de Seydou Bandian ou d’Ousmane Sy. Chacun tire la couverture sur soi et personne ne songe véritablement au Mali qui est menacé dans son existence. Pour éviter tout vide constitutionnel qui en ajoutera à une situation à la fois fragile et confuse, la présidentielle de juillet 2018 doit être la priorité des priorités du gouvernement. Il faut surseoir à l’organisation des élections locales et régionales annoncées pour avril 2018 au profit de l’élection du Président de la République. Cela permettra au gouvernement et à la classe politique de se mettre d’accord sur la question du fichier électoral dont la fiabilité est déterminante pour l’acceptation des résultats. Aussi, les partis politiques et la société civile doivent obliger les groupes armés et le gouvernement à avancer dans la mise en œuvre de l’Accord issu du processus d’Alger afin d’amorcer le retour de l’administration dans les zones désertées par les représentants de l’Etat. Le temps n’est ni à l’hésitation, ni à l’inaction.
Par Chiaka Doumbia