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A Bamako, les derniers cybercafés font de la résistance
Publié le vendredi 8 decembre 2017  |  Le monde.fr
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La fourniture de connexion Internet, vocation première des cybercafés de la capitale malienne, a laissé la place à d’autres services. Le temps est à la diversification.

A Magnambougou Faso Kanu, en commune VI du district de Bamako, Ousmane pousse la porte du cybercafé Tabanet en ce vendredi de fin novembre. Il est 20 heures. « Je suis sûr que tu viens imprimer quelque chose sinon tu n’as rien à faire ici », lance Drissa, le gérant. « Je dois imprimer des documents pour ma maman », s’excuse Ousmane en esquissant un sourire qui en dit long sur le temps qui a passé depuis sa dernière venue. « Cela faisait deux mois que je l’avais pas vu. Avant il venait ici chaque jour pour la connexion Internet », précise le gérant, assis derrière son comptoir. Les yeux accrochés à l’écran, il tente de répondre à trois étudiants qui sont là pour imprimer des documents pour leurs cours.

Lorsque Drissa a ouvert son « cyber » en 2012, il avait huit ordinateurs et les clients se succédaient devant les postes. Aujourd’hui, seuls trois ordinateurs sont connectés, qui restent parfois inactifs des jours durant, à l’énorme déception de ce diplômé en lettres. Le coût de la connexion Internet prépayée, commercialisée à 36 000 francs CFA (54,72 euros) pour 512 Ko par Orange Mali, reste chère pour lui et le débit est affaibli par la saturation du réseau 3G.

« Les vieux viennent encore consulter leur boîte mail »

Ici, à Tabanet, depuis bientôt deux ans, « fournir de la connexion, qui coûte 300 francs (0,46 euro) l’heure, n’est plus notre activité », ajoute le gérant. Cinq ordinateurs ont été réaffectés à la formation en informatique à 25 000 francs CFA par mois. Drissa offre d’autres services tels le traitement de textes, l’impression et la photocopie, la maintenance des ordinateurs, les opérations financières (Orange Money, Mobicash) qui lui permettent de gagner 150 000 francs (228 euros) par mois. Deux fois moins qu’il y a deux ans.

Une décennie après le « boom », les cybercafés maliens connaissent une période de vaches maigres. « En 1998, il n’y avait pas plus de quatre cybercafés à Bamako. Sur la colline de Badalabougou, le siège de l’université, il y avait un cyber où l’heure coûtait 2 000 francs », se souvient encore Baba, 40 ans. Pour Renaud Gaudin, qui a fait son mémoire de master en 2006 à Lyon sur la fréquentation des cybercafés à Bamako, « à l’époque, les gens étaient dans la découverte, venaient pour des loisirs, des tchats. Le nombre de personnes qui venaient pour faire de la recherche était marginal. Mais, aujourd’hui, Internet n’existe plus pour les gens. Avec les smartphones, Facebook et WhatsApp sont devenus l’eldorado. »

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A Kalabancoro, au sud-est du district de Bamako, Gassiré vient d’acheter trente minutes de connexion à raison de 150 francs CFA. Il a oublié de scanner et d’envoyer un document avant de quitter le bureau. Sinon, il ne se serait pas arrêté au « cyber » : « Je peux tout faire à partir de mon téléphone, dit-il. C’est l’air du temps. On ne peut rien contre le changement. »

En 2015, une étude de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications (AMRTP) avait estimé à 3 millions le nombre des abonnés à l’Internet mobile, dans un pays qui compte 17 millions d’habitants. Ici aussi, au cybercafé Chez Wesh, à Kalabancoro, faute de clients, le gérant utilise la connexion pour télécharger des films, des séries, des musiques ainsi que des jeux vidéo qu’il vend entre 50 et 100 francs CFA. « Les vieux viennent encore consulter leur boîte mail », dit-il un peu dépité.

« C’est autre chose »

Les smartphones, dont la connexion est facilitée par les forfaits et le développement des clés des clés 3G +, auront-ils la peau des cybercafés ?

Le gérant du Wesh, lui, a fini par diversifier ses services. Il confectionne, sur commande, des cartes d’invitation, des factures, des calendriers qu’il fait ensuite imprimer ailleurs. « Je fais aussi des photos d’identité. Ce n’est plus un cyber, c’est autre chose. Mais c’est le seul moyen de s’en sortir », confie celui dont le voisin, Bakary, le premier à avoir ouvert un cybercafé dans le quartier en 2005, a mis la clé sous la porte il y a un an avant de partir en France.

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Pourtant, à en croire Wesh, les vraies raisons de la désaffection des cybercafés sont ailleurs : « Le mauvais débit de la connexion est à l’origine de la baisse de fréquentation, explique-t-il. Les ordinateurs sont lents, sans compter les interminables coupures d’électricité. » L’amélioration du débit et du coût de la connexion est, depuis 2015, le cheval de bataille des militants de #Mali100Méga. « C’est un constat d’échec pour nous, explique Renaud Gaundin, leader du mouvement. Ça n’a rien donné. C’est une perte de qualité, avec un débit aléatoire qui rend le travail impossible. »

Il y a quelques mois, la commercialisation de la fréquence 4G d’Orange Mali a été lancée, suscitant beaucoup d’engouement. Mais les offres d’Internet ne concernent pour le moment que les téléphones. En attendant, Drissa reste tout de même optimiste : « Il y a des activités qu’on ne peut faire que dans un cyber. Ils ne devraient donc pas disparaître. » Renaud Gaudin estime que pour une connexion Internet performante, « c’est trop tard ».
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