Au Mali, dans un rapport qu’elles ont établi conjointement, des organisations de défense des droits de l’homme dénoncent le statu quo dans les enquêtes sur la mutinerie qui a éclaté dans le camp Soundjata Keïta de Kati en 2013.
« Plus de quatre ans après les événements de Kati, les familles des victimes et nos organisations regrettent que ce dossier n’ait pas avancé et exhortent le juge d’instruction récemment nominé pour reprendre le dossier à prendre toutes les mesures nécessaires pour clôturer cette instruction dans un délai raisonnable. », indique un rapport établi par l’AMDH et la FIDH. Le vendredi dernier, ces deux organisations de défense des droits de l’homme ont présenté le rapport Mali : face à la crise, faire le choix de la justice, dans lequel elles reviennent sur ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire de la mutinerie de Kati ».
En septembre 2013, une mutinerie a éclaté au sein du camp Soudjata Keïta de Kati, à l’époque fief de l’ex-junte militaire dirigée par le capitaine Amadou Haya Sanogo, qui venait d’être promu général par Dioncounda Traoré, alors président de la Transition. Les revendications et les jalousies des camarades « bérets verts » de Sanogo ont entraîné des altercations sérieuses à Kati. Amadou Haya Sanogo avait fait des promesses de promotion et d’augmentation des soldes des soldats de ce camp.
Certains mutins ont disparu, tandis que d’autres ont été enlevés. Le gouvernement a ainsi lancé l’opération « Saniya » pour remettre de l’ordre dans le camp : une trentaine de militaires ont été arrêtés et les militaires du camp désarmés. Les familles des mutins disparus n’ont eu aucune nouvelle de leurs proches, amenant ainsi l’AMDH-FIDH a porté plainte auprès du tribunal de grande instance de la commune III, avec constitution de partie civile, contre l’adjudant-chef Fousseyni Diarra, le capitaine Christophe Dembélé et le général Amadou Haya Sanogo.
« (…) Le 23 février 2014 sont découvertes deux fosses communes situées dans la commune rurale de Kambila, à moins de 10 km de la ville de Kati, et comprenant cinq corps de militaires bérets verts. Puis le 1er mars 2014 un corps portant un insigne de colonel est découvert dans un puits à Malibougou, aux environs de Kati, dans une villa qui appartiendrait à un militaire proche du général Sanogo », déclare le rapport de l’AMDH-FIDH.
En mai 2014, des expertises ont été réalisées sur les corps retrouvés, et les parties civiles auditionnées par le juge d’instruction. « Sept personnes sont ainsi inculpées puis libérées provisoirement, et une quarantaine de militaires sont mis à la disposition de la justice », ajoute le document. Depuis, plus rien. Quatre ans après, cette affaire est toujours au stade de l’instruction, à la grande déception des familles des victimes.