Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Général Sidi Alassane Touré, Gouverneur de la région de Mopti « Nous allons sécuriser toutes les localités de la région de Mopti et permettre le retour de l’administration, l’ouverture des écoles, etc. »
Publié le dimanche 14 janvier 2018  |  Le Canard de la Venise
La
© aBamako.com par FS
La visite du candidat Sahala Baby à Mopti
Le candidat à l`élection du président de la FEMAFOOT Sahala Baby a rendu visite aux autorités et à la ligue de football de Mopti le Jeudi 28 Septembre 2017. Photo: Sidy Allassane TOURE
Comment


Sidi Alassane Touré est le Gouverneur de la région de Mopti. C’est un général de l’armée de terre, formé exclusivement en Renseignements militaires. En tournée à Bamako pour la Biennale Artistique et Culturelle qui a pris fin le 31 Décembre 2017 et pour concerter les plus hautes autorités dans le cadre de la gestion de la crise dans la 5ème région, nous lui avons rapproché pour qu’il nous livre, en exclusivité sa vision sur la crise qui secoue actuellement la principale région du Centre du Mali. Le Général Sidi Alassane Touré est optimiste quant à la gestion rapide ce cette crise. Il nous a aussi donné son avis sur la crise économique, le retour de l’ancien Président ATT et les échéances électorales à venir. Nous vous proposons, in extenso, l’interview du Général Sidi Alassane Touré.

Le Canard de la Venise : Quelles appréciations aviez-vous de la 5ème région au moment où vous preniez fonction en tant que gouverneur ?

Général Sidi Alassane Touré : Il faut reconnaitre que le Mali a eu des difficultés depuis 2012. Ainsi, la région de Mopti n’est pas épargnée. C’est ce qui fait qu’au niveau de la 5ème région, nous avons des problèmes de sécurité et cela englobe aussi l’aspect développement. Mopti est sans doute dans une situation difficile, mais nous avons des solutions pour pouvoir sortir notre région de la crise.

Quelles sont vos ambitions, dans le cadre du bien-être des populations de Mopti ?

Notre priorité est la restauration de la sécurité. Il faut qu’on puisse retrouver rapidement la paix, la stabilité et la sécurité dans la région de Mopti. Après cette étape, tout le reste viendra. Notre ambition est de faire du développement, une réalité. Cela passe forcément par la stabilisation de la zone. Par rapport à la réconciliation nationale, il faut dire que cet aspect concerne tout le monde. Donc, j’ai pour ambition aussi de réconcilier les populations à travers les mécanismes décidées par les plus hautes autorités.

Quelle description faites-vous de la situation sécuritaire dans la Venise malienne ?

Nous sommes dans une situation de lutte contre le terrorisme. Ainsi, il faut reconnaitre qu’on a eu à traverser des périodes difficiles avec des attaques dans beaucoup de localités. Mais il y a une certaine amélioration concernant cette situation aujourd’hui, même s’il y a des cas d’attaques isolés comme les assassinats ciblés, des cas de braquages et d’enlèvements. Le plus important, c’est le fait que les plus hautes autorités du pays ont compris déjà la dynamique dans la région et ont décidé de ce qu’il faut faire pour qu’on puisse recouvrer la sécurité. Et aujourd’hui, nous sommes en train de travailler sur cette voie. Nous pensons que, dans les mois à venir, Mopti va revenir à une situation normale.

Peut-on traverser le fleuve actuellement à Mopti ?

Les gens disent souvent qu’on ne peut pas traverser le fleuve à Mopti, mais je vous assure qu’on peut bien aller au-delà du fleuve. Je pense que certains le disent parce que nous avons passé un bon moment où, du fait de l’insécurité, la circulation était au ralenti vers cette partie de la région. Mais aujourd’hui, les donnes ont changé. Et nos forces armées et de sécurité occupent le terrain dans beaucoup de localités, au-delà du fleuve.

Quelles solutions proposez-vous pour sortir la région de Mopti de la crise sécuritaire ?

Le plus important, c’est qu’on a compris la dynamique dans la région. Aujourd’hui, nous avons compris qu’on a à faire à des terroristes, des bandits ; donc, les plus hautes autorités ont développé une stratégie de lutte contre le terrorisme. Et cette stratégie contient un plan de sécurisation intégré des régions du centre qu’on appelle PSIRC. Aujourd’hui, nous sommes dans la phase de mise en œuvre de ce plan. Et nous pensons qu’avec cette stratégie qui est basé sur quatre axes : la sécurité, la gouvernance, le développement social et économique et la communication (qui est en rapport avec la réconciliation, pour éviter que les conflits intercommunautaires persistent), nous allons atteindre nos objectifs.

Donc, ce plan est déjà en marche car c’est dans cette dynamique que nous sommes déjà à Kouakourou. Ainsi, nous avons déployé des éléments des forces armées et de sécurité qui sécurisent actuellement cette localité. Ce qui a permis l’ouverture rapide des classes et la ténue régulière de la foire hebdomadaire, jusque-là. Cette action va se poursuivre dans les autres localités. Nous allons sécuriser toutes les localités de la région de Mopti et permettre le retour de l’administration, l’ouverture des écoles, etc.

Selon vous, la crise qu’on traverse dans la 5ème région peut-elle être qualifiée de conflits intercommunautaires ?

En fait, il y a des cas de conflits intercommunautaires, mais qui découlent souvent de la crise que nous traversons, c’est-à-dire, le terrorisme. Ainsi, les causes des conflits intercommunautaires sont à rechercher dans la crise globale. Cela est dû au fait que ce sont les terroristes qui commettent des actes de vandalisme. Ils peuvent piller les champs des bambaras en faisant croire que ces actes sont l’œuvre de la communauté peulh. Et ces bambaras aussi, sans autres formes de procès s’attaquent aux peulhs. Alors, je pense qu’il n’est pas difficile d’imaginer le type d’homme qui est capable de brûler un champ avec des céréales prêt pour la récolte ou celui qui est capable d’abattre un troupeau entier. Ces actes ne peuvent être que l’œuvre des terroristes.

C’est pour toutes ces raisons que la communication est importante entre les communautés. Il faut faire comprendre aux différentes communautés que le problème n’est pas ethnique ou religieux, mais il est lié aux terroristes qui veulent déstabiliser les villages en mettant d’autres facteurs en jeu. C’est ainsi que je lance un appel à l’ensemble des communautés vivant dans la région de Mopti : il n’existe pas de conflits intercommunautaires dans notre région. Ce sont plutôt les terroristes qui commettent des actions et entremettent les différentes communautés pour aboutir à la déstabilisation.

Faut-il négocier avec les terroristes de la région de Mopti ?

Pour dialoguer, il faut d’abord qu’il y ait des représentants crédibles dans le camp d’en face. Nous croyons en nos chances d’en-finir avec ce problème aujourd’hui. C’est ce qui fait que négocier avec des gens qui ont du sang sur les mains n’est pas envisageable. Mais on peut trouver des jeunes dans ces groupes, qui ont été enrôlé de force ou parce qu’ils n’avaient rien comme source de revenu ; c’est-à-dire, qui ne font pas partie du noyau dur ; si ces derniers ont envie de faire table rase du passé, au nom de la réconciliation nationale, il y aura des mécanismes qui leur permettront de revenir dans les villes et villages. C’est pourquoi le processus du désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) a été enclenché. Ils peuvent aller dans le processus du désarmement et réintégrer les sociétés.

Pouvez-vous nous donner une date pour la fin de la crise ?

Nous voulons en-finir avec ce problème le plutôt possible. Il y a déjà une stratégie nationale de lutte contre le terrorisme ; il y a le PSIRC et le Président de la République, dans son allocution, lors du premier conseil des ministres de l’actuelle équipe gouvernementale a fait de la gestion de cette crise une priorité absolue, à travers le PSIRC. Donc, ce sont des défis qui sont là et nous allons les relever dans un délai acceptable. On s’est fixé un objectif qui sera atteint le plutôt possible, mais je ne peux pas avancer une date pour le moment.

Quelle analyse faites-vous de la crise économique dans la région ?

La crise économique actuelle découle de la crise sécuritaire. C’est l’insécurité qui a fait que cette crise a vu le jour dans la région de Mopti. Et aujourd’hui, la ‘’route du poisson’’, qui a été inauguré par le Premier ministre, il y a quelques mois est un aspect qui peut désamorcer la crise économique. Cette route permettait le transport du poisson vers d’autres pays et d’autres contrées. Mais avec ce climat de méfiance où le paysan vague difficilement à ses affaires et/ou le commerçant ne peut plus se déplacer comme il veut, il y aura un temps d’observation avant la reprise normale des activités économiques. La solution, c’est de mettre fin d’abord à la crise sécuritaire et après, les choses rentreront dans l’ordre sur le plan économique.

Concernant l’environnement dans son ensemble, Mopti a besoin d’un meilleur cadre de vie. Quels plans préconisez-vous pour l’assainissement et la conservation du fleuve, en collaboration avec les collectivités ?

Effectivement une stratégie d’assainissement de la région de Mopti a été développée par la direction régionale de l’assainissement et la Mairie de la commune urbaine de Mopti. Ce plan existe. Et je pense qu’ils sont en train de le mettre en œuvre. Il va permettre de pouvoir agrandir certains collecteurs, construire des caniveaux, des digues en pierres, etc. Ce sont là des projets qu’il faut rapidement valoriser. Il faut aussi bannir les déchets liquides qui tuent la faune et la flore. Mais nous ne prendrons aucune mesure sans au préalable sensibiliser la population. Il y a plusieurs projets qui concernent également la conservation du fleuve Niger qui traverse la région.

Quel bilan pouvez-vous nous présenter aujourd’hui ?

Il m’est très difficile de dresser un bilan à quelques mois seulement de travail. Je peux simplement vous dire que nous avons déjà commencé l’application du Plan intégré de sécurisation des régions du centre (PSIRC). Toutes les zones seront sécurisées dans les semaines à venir. Nous allons aussi permettre le retour de l’administration, dans son ensemble. Nous allons entreprendre les actions pour le développement. Nous avons commencé un travail et nous sommes actuellement à mi-chemin. C’est pourquoi, je préfère attendre encore quelques mois pour vous présenter un bilan.

Mais nous sommes dans un certain optimisme qui nous fait penser que demain sera meilleur qu’aujourd’hui. Nous allons de l’avant. Nous avons remarqué que les affrontements intercommunautaires ont beaucoup diminué ces derniers temps. Cela est dû au fait que nous avons mis un mécanisme de gestion en place pour agir en amont des problèmes. Cela consiste à restaurer le dialogue entre les communautés et les ramener à la raison, afin d’éviter les conflits. On peut dire que les choses commencent à bouger dans le bon sens. Mettons-nous ensemble pour combattre le terrorisme et l’insécurité alimentaire, nous y arriverons.

Que pensez-vous de la création du mouvement d’autodéfense au Pays Dogon dénommé « Dan Na Ambassagou » ?

En la matière, il faut faire très attention parce que partout où les Forces armées et de sécurité peuvent assurer leur mission, je pense qu’il est important que l’on se retienne par rapport à des mouvements d’autodéfense. La sécurité des personnes et de leurs Biens revient aux forces armées et de sécurité. Ainsi, nous devons guider les forces militaires vers le travail. Aujourd’hui, nous ne pouvons ni encourager ni faire la promotion des mouvements d’autodéfense. Nous dévons plutôt renforcer l’armée en lui donnant les moyens et la capacité pour pouvoir défendre les populations.

Selon vous, quels sont les enjeux du retour de l’ancien Président ATT ?

Il faut saluer l’initiative du Président de la République Ibrahim Boubacar Kéïta. Aujourd’hui, on est à la recherche de la paix et de la réconciliation des Maliens. Donc, je pense que le retour de l’ancien Président Amadou Toumani Touré amorce déjà une vraie réconciliation dans notre pays. D’ailleurs, il faut apprécier ce que le Président ATT, lui-même, à son retour a dit quand il est arrivé à Mopti, je le cite : « Il faut que les cœurs s’ouvrent ». Cela veut dire qu’il faut pardonner sans oublier. Et il faut que la réconciliation entamée nous mène vers le vrai pardon. Aujourd’hui, les Maliens doivent se retrouver, se pardonner et s’accepter. Cela nous permettra d’avancer. Et nous allons tirer les enseignements de ce qui s’est passé. Les plus grandes nations du monde ont avancé parce que leurs peuples ont tiré les enseignements de ce qu’ils ont vécu : les échecs, les conflits, et tout ce qu’ils ont connu comme difficultés. Ils ont pu construire leurs nations à travers ceux-là. C’est ce que nous devons faire, en tant que Maliens.

2018 est une année électorale. Dans le contexte que nous vivons dans la région de Mopti, croyez-vous à la ténu des élections comme l’a si bien affirmé le Président de la République lors de son discours de l’an ?

Effectivement, dans ses vœux de nouvel an, le Président de la République a été on ne peut plus clair concernant la tenue des élections et à date. Cela est très important car ça signifie que nous tous, dans nos régions respectives, devons nous atteler au travail pour pouvoir faire en sorte que les élections puissent se tenir. Dans la région de Mopti, nous sommes optimistes car nous pensons que nous allons pouvoir relever ces défis de sécurité en le ramenant à un niveau acceptable pour pouvoir organiser ses élections.

Je ne suis pas politique. Les enjeux pour moi, c’est de pouvoir organiser des élections transparentes et crédibles.

Quel appel avez-vous à l’adresse de la population de la région de Mopti ?

Ce qui nous arrive n’est pas une fatalité. Ce qui nous arrive est arrivé ailleurs et ils ont pu relever les défis. Nous aussi, en tant que Maliens et Mopticiens, nous allons relever les défis, mais ensemble. Il faut qu’on se donne la main et in cha-Allah, nous allons surmonter cette crise.

A la population de Mopti, aidez les forces armées et de sécurité dans leur mission en collaborant. Il faut donner les renseignements aux forces armées et de sécurités pour les aider dans votre sécurisation. Aujourd’hui, c’est la résilience qu’on demande à la population. Cela est très important. Il y a des gens qui se taisent par peur ; je sais que cela va cesser parce dans le PSIRC, quand nous allons envoyer les forces armées et de sécurité dans les zones, ils resteront avec les populations. Donc, il n’y aura plus de peur. Cela va entrainer une certaine domination de la peur.

Entretien réalisé par Alfousseini Togo et Abdramane Samaké
Commentaires