C’est par le néologisme « Sinkophobie » que nous titrions notre rubrique « A la Une » du N° 10 de votre hebdomadaire préféré MALI-HORIZON du 11 décembre 2017. Ce vocable barbare insinue une peur bleue vis-à-vis du Général Moussa Sinko Coulibaly, dont l’ambition pour le fauteuil présidentiel devient évidente. Le temps nous donne-t-il raison ? Probablement.
Cet officier supérieur, qui venait de démissionner de l’Armée pour, disait-il, contribuer à relever les nombreux défis auxquels le pays fait face avait été méprisé par certains gouvernants. L’on se souvient qu’un haut responsable politique l’avait traité « d’officier félon ». Ce qui semblait traduire un certain embarras voir une peur de cette éventuelle adversité politique. Celle-ci justifie-t-elle une restriction à la liberté de l’initiative politique pacifique? L’on peut en douter.
En effet, face à la presse le jeudi dernier à son QG à Faladié, le Général Moussa Sinko Coulibaly a dénoncé ce qu’il a appelé le refus des autorités de lui louer le Stade du 26 mars pour y lancer sa « Plateforme pour le Changement ».
L’ex-Directeur général de l’Ecole de maintien de la paix a pointé un doigt accusateur sur le pouvoir comme ayant ordonné ce refus. « Le président IBK et son gouvernement… après avoir constaté qu’un demi-million de Maliens sont prêts à aller au stade pour manifester leur désir de changement, ont décidé d’annuler l’autorisation qui nous avait été au préalable accordée », a fustigé le jeune Saint-cyrien. Le motif selon lequel le stade a été rendu « inutilisable pour plusieurs mois » semble plutôt peu convaincant ! Et dire que l’opinion piaffait d’impatience pour décoder cette manif dans ce grand stade, qu’aucun leader politique ne choisit pour ses meetings !
A priori, s’il est avéré, cet empêchement peut produire l’effet contraire. Exactement comme le pouvoir a créé de toutes pièces le mythe Ras Bath en cristallisant les curiosités autour du jeune activiste.
L’expérience a montré que quand l’autorité use de ses prérogatives pour étouffer l’émergence d’un leadership quelconque, elle contribue plutôt à la favoriser. Elle incite à son rayonnement. La popularité des Abdoulaye Wade, Laurent Gbagbo, Gilchrist Olympio, Alpha Condé, … et d’un certain Ibrahim Boubacar Kéita a été ainsi favorisée par leurs dirigeants respectifs, qui voulaient les museler. L’activiste franco-béninois Kémi Séba draine foule sur le continent par sa croisade contre le franc CFA et surtout par les interdictions de séjour qui lui sont opposés par certains dirigeants du continent.
Les populations ont cette tendance naturelle à sympathiser avec la personnalité qui se plaint d’être victime d’injustice de répressions ou d’entorses diverses. C’est pourquoi les empêchements de manifestations finissent par doper l’instinct grégaire autour de ceux qui appellent à ces meetings avortés ou empêchés. C’est le phénomène de la victimisation, qui range largement les populations aux côtés de ceux sensés faibles voire persécutés.
L’on n’a certainement pas oublié que le procès d’intention faite en 2002 à Alpha Oumar Konaré pour motif qu’il aurait trahi son Premier ministre IBK, a favorisé l’ascension politique de ce dernier. L’actuel locataire de Koulouba ne devrait donc pas tomber dans un piège similaire, même si l’on veut pousser Moussa Sinko à la faute…
Par ailleurs, mêmes ceux qui sont sceptiques en les «agitations » de Moussa Sinko pourraient avoir leur curiosité aiguisée par cette tentative d’étouffement. Surtout que la soif de changement est réelle dans le pays.