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Hamadoun Ibrahim Touré, Joker de «l’Alliance Kayira» pour 2018 : Un périlleux galop d’essai dans l’arène politique
Publié le mercredi 17 janvier 2018  |  Le Matin
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Qui choisir pour relever les nombreux défis du Mali ? La question est d’actualité ces derniers temps. Et à presque sept mois du premier tour de la présidentielle, ils sont nombreux à vouloir proposer leurs solutions aux Maliens. Et parmi les potentiels candidats figure Dr Hamadoun Ibrahim Larab Touré, ancien Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications (UIT) et responsable de Smart Africa. Si l’homme n’est plus à présenter sur la scène internationale, il est accueilli comme un «néophyte» dans l’arène politique. Ce qui fait qu’il a autant d’atouts que de handicaps.

C’est au cours du dîner de lancement du mouvement politique Alliance Kayira, le 30 décembre 2017 que le Dr Hamadou Ibrahim Touré a annoncé sa candidature à l’élection présidentielle de 2018. Il sera donc le Joker de l’étalon de cette nouvelle alliance dans la course à la présidentielle dont le premier tour, a assuré Ibrahim Boubacar Kéita, aura lieu en juillet prochain.



Et l’Alliance Kayira de Bocar Moussa Diarra (ancien ministre et transfuge de l’US RDA) ne tari pas naturellement d’éloges sur son porte-drapeau. «Notre pays a besoin d’une reprise en mains et d’un leadership de type nouveau, compétent, patriote, et vertueux», a décrit M. Diarra. Et ces valeurs, personne ne les incarne mieux à ses yeux que Dr Hamadoun Ibrahim Touré. Un carde «compétent, propre» et possédant «une virginité politique».

Et ce dernier a aussitôt donné le ton sans trop se démarquer de la ligne de conduite de cette classe politique que les Maliens ne veulent plus voir : adopter une politique de tolérance zéro dans la lutte contre la corruption au Mali ! N’est-ce pas qu’un certain Ibrahim Boubacar Kéita avait pris le même engagement devant ses compatriotes avant que les deux premières années de son mandat soient embourbées dans des scandales de surfacturations, de pots de vins… ?

N’empêche que M. Touré peut incarner ce rayon de soleil que les Maliens attendent tant pour les réchauffer et sortir le pays de la torpeur de la classe politique qui se partage le gâteau du pouvoir depuis l’avènement de la démocratie. Le Mali a plus que jamais besoin d’un Vladimir Poutine ou, panafricanisme oblige, d’un Paul Kagamé pour se relever pour de bon.

Justement Hamadoun est le conseiller spécial du président Rwandais Paul Kagamé. Et comme le dit l’adage, qui s’assemble, se ressemble. Est-il donc cet homme de poigne tant souhaité par ses compatriotes pour donner un coup de pied dans la fourmilière de la mauvaise gouvernance ? A-t-il la trempe d’un Kagamé pour résister à la pression de la communauté internationale, notamment de la France, pour ne privilégier que les intérêts de son pays ?

Du cran et un précieux carnet d’adresses

Un pari difficile car, même si le Mali a en commun avec le Rwanda d’être convoité par des voisins qui ne cessent de le déstabiliser, notre pays (1 241 814 km) serait presque 47 fois plus grand que le Rwanda (26 338 km). Donc plus facile à déstabiliser avec notamment une vaste partie occupée par le Sahara et des frontières poreuses.

Hamadoun Touré n’est plus à présenter notamment sur la scène internationale. Il va donc briguer la magistrature suprême de son pays riche de son expérience de huit ans à la tête de l’UIT. Une responsabilité qui lui a ouvert beaucoup de portes de salons feutrés lui permettant du coup d’enrichir son carnet d’adresses.

«Il est le porte drapeau d’une élite de cadres internationaux qui font de la réussite leur mission un sacerdoce», commentait un confrère au lendemain de sa manifestation de volonté de s’aligner dans la course présidentielle. Et il peut être fier du travail accompli à la tête de l’UIT et ne s’en prive pas. «C’est un sentiment de fierté. J’ai eu l’honneur de représenter mon pays et le continent africain au sein des Nations unies et je rentre après huit années pleines de succès à la tête de l’UIT», disait-il en décembre 2014.

«Il a un carnet d’adresses assez fourni qui peut être utile pour le pays. Il est aussi un libéral qui croit dur au secteur privé comme moteur du développement. Ce sont là des atouts. Sans compter ses qualités managériales», analyse un observateur de la classe politique qui n’a pas souhaité être nommé. Et de préciser, «c’est un cadre qui a du cran et très pratique. C’est ce qui me plait en lui». Le Cran ! C’est en effet une valeur rare chez nos hommes politiques.

Mais, la majorité de nos interlocuteurs trouvent qu’il doit surmonter beaucoup trop de handicaps pour transformer son galop d’essai en victoire électorale. D’abord l’Alliance Kayira 2018 est une nouvelle création totalement inconnue dans l’arène.

Une notoriété internationale qui risque de ne pas peser lourd dans les urnes

Et même si c’est un Mouvement politique qui compte fédérer les différentes sensibilités (partis politiques, associations…), il n’est pas évident qu’il puisse focaliser les attentions d’ici juillet pour pouvoir rivaliser avec les partis politiques classiques comme le RPM, l’Adéma, l’URD, la Codem, les FARE, le CNID, le Parena, le MPR… Cette alliance a donc peu de chance de rééditer l’exploit du Mouvement Citoyen en 2002 et 2007.

Et comme nous le rappelait un interlocuteur, l’élection présidentielle est aux antipodes de celle d’un secrétaire général de l’UIT. «Le Mali n’est pas le Rwanda et Hamadoun n’est pas forcément Paul Kagame même s’ils partagent beaucoup de convictions et valeurs politiques et morales. Il ne s’en rendra compte, malheureusement, que quand le monde va s’effondrer sous ses pieds», craint-il.

En effet, poursuit-il, «quelle que soit la faiblesse de nos traditionnelles formations politiques, elles constituent incontestablement les appareils appropriés pour mobiliser et faire élire. Tu conviens avec moi que l’ADEMA, le RPM, la CODEM, le CNID, le MPR… sont quand même implantés dans le pays le plus profond. Sans compter que ces partis se sont constitués dans les communautés de grands électeurs».

Et il est peu évident que la «valeur intrinsèque» du Dr Hamadoun Touré puisse inverser cette donne tant que l’Alliance qui le soutien n’a pas une réelle et solide assise nationale.

Sans compter que son parcours international n’est pas satisfaisant pour tout le monde en termes d’impact pour le pays. «En 20 ans durant à l’UIT, qu’a fait Hamadoun de concret pour le pays ? Qu’est-ce que de lisible on peut lui attribuer à ce niveau ? Combien de Maliens a-t-il pu pousser sur la scène internationale alors que le pays a investi en lui ? Et comment comprendre que juste 2 à 3 mois après son élection, il draine au Rwanda, au détriment de Bamako, le sommet Connect Africa qui aboutit aujourd’hui à SMART Africa qu’il dirige et qui est basé à Kigali», s’interroge un professionnel du secteur des télécommunications et des nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Des questions qui ne manqueront pas de surgir le débat politique au gré de questions pas du tout anodines de certains confrères. Mais, sans doute que Dr Touré y est préparé car il n’est pas un homme à se jeter dans la mare aux crocodiles sans prendre ses précautions. Et comme le dit aussi un proverbe du Sénégal, «celui qui veut du miel doit avoir le courage d’affronter des abeilles».

Des étapes décisives brûlées ?

Pour beaucoup d’interlocuteurs, le «Kagamé Malien» va vite en besogne et prend d’énormes risques à vouloir bruler les étapes d’une véritable ascension politique. Certains pensent ainsi qu’il aurait dû d’abord «rentrer au pays, essayer de prendre la température et négocier avec un parti de la place et travailler à se forger une identité politique».

Et pour d’autres, à l’heure actuelle, il peut être un bon ministre pendant 3 à 4 ans et viser le poste de Premier ministre avant de rêver de Koulouba. Mais, craignent-ils, «être d’emblée Président de la République est une mission, même si elle n’est pas impossible, très compliquée» !

Et même si Nicolas Machiavel disait que «l’audace et la précipitation emportent souvent ce que l’on n’obtiendrait point par des moyens ordinaires», un autre adage nous apprend que «la précipitation est la plus grande ennemie de la véritable activité». Ou, pour paraphraser Louis-Ferdinand Destouches, «les plus fructueuses entreprises sont celles qui murissent lentement».

Heureusement que, à l’Alliance Kayira, on est conscient d’avoir confié «une lourde responsabilité» à Dr Hamadoun I. Touré qui l’assume avec «honneur et dignité».

Et, les alliés le savent non seulement qu’il va l’assumer à hauteur de souhait, mais misent aussi sur le «sens de discernement» des Maliens pour transformer le galop d’essai du Joker de leur étalon (emblème de l’Alliance Kayira) pour remporter le Grand prix de la présidentielle de 2018.

Hamady Tamba



Une notoriété internationale à valider dans les urnes

A 64 ans, Hamadoun Touré a commencé sa carrière professionnelle au Mali en 1979, où il a acquis une solide expérience dans l’industrie des satellites en tant que Directeur Technique de la première station terrienne internationale du Mali.

Il a ensuite intégré le Programme d’assistance et de développement d’Intelsat en 1985 avant d’être nommé en 1994, Directeur du Groupe Afrique et Moyen-Orient à Intelsat. C’est à ce poste qu’il a acquis la réputation de dirigeant énergique, du fait de son engagement sans faille au service de différents projets de connectivité régionale comme RASCOM.

Directeur régional pour l’Afrique à ICO Global Communications, Dr Hamadoun Touré a été élu Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications (UIT) en 2007, réélu en 2010, il a travaillé à atteindre les objectifs a lui confiés par cette organisation internationale. Il s’agissait de connecter le monde de sorte à contribuer à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement.

Une mission qu’il a réussie avec brio. Ce qui lui a valu de nombreux décorations, mérites et titres honorifiques à travers le monde. En effet, ce cadre compétent, rigoureux et pragmatique est Chevalier de l’Ordre national du Mali, des Comores, du Tchad, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire. Il est aussi Citoyen d’honneur de la ville de Grecia (Costa Rica), de Yamassa (République Dominicaine), de Quito (Equateur), de Guadalajara (Mexique).

Proche du président Paul Kagamé du Rwanda, Hamadoun est actuellement à la tête de Smart Africa, un projet africain d’interconnexion impliquant onze pays.

Touré est co-vice-président de la Commission sur le développement du haut débit lancée en mai 2010 par l’UIT et l’Unesco sous la présidence du Rwandais Paul Kagamé et de Carlos Slim Helú, président honoraire à vie de Grupo Carso. Il est également membre du Comité consultatif international du Partenariat multilatéral contre les cyber-attaques (IMPACT).
En mai 2011, IMPACT a été nommée organe d’exécution de la cyber-sécurité de l’ONU par l’UIT, une agence spécialisée des Nations unies. Selon les observateurs Dr Touré a gagné son pari de faire de l’UIT une organisation novatrice et tournée vers l’avenir qui soit en mesure de faire face aux enjeux liés à un environnement des TIC qui évolue rapidement, et à continuer à la diriger dans l’optique de la mise en œuvre des résolutions du Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) et de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).

Il a activement promu la série d’événements ITU Connect, dont le premier, Connect Africa, s’est tenu, à Kigali (Rwanda) en 2007. Connect Africa a levé 55 milliards de dollars d’engagements d’investissement pour améliorer l’infrastructure de télécommunications en Afrique sur sept ans.

Durant les deux premières années, 2008 et 2009, 22 milliards de dollars ont été investis dans l’infrastructure des TIC, principalement pour les communications mobiles. Sa vaste expérience professionnelle englobe aussi bien le secteur public que le secteur privé.

Docteur Honoris causa de l’Université de plusieurs célèbres universités d’Afrique et du reste du monde, Dr Hamadoun Touré est titulaire d’une maîtrise d’ingénierie électrique de l’Institut technique de l’électronique et des télécommunications de Leningrad (LEIS) et d’un doctorat de l’Université électronique, de télécommunication et d’informatique de l’Université de Moscou (MTUCI, Russie).

Le Dr Touré est marié et père de quatre enfants. Vainqueur ou non, sa présence dans la course à la présidentielle risque d’être un tournant décisif de sa jeune carrière politique. Et heureusement conscient qu’une élection se gagne sur le terrain, il a déjà commencé à sillonner l’intérieur du pays, notamment la région de Mopti, avec ses nombreux clubs de soutien.

H.T

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