L’année 2017 a vécu, avec son lot de victimes militaires et civiles. Et la traversée s’annonce encore plus périlleuse en 2018 pour le Mali qui doit faire face à l’organisation de plusieurs élections, en plus des lancinantes problématiques de lutte contre l’insécurité sous toutes ses formes et la réconciliation nationale. Aussi complexes les uns que les autres, ces défis imposent un sursaut collectif mais surtout un leadership clairvoyant au sommet de l’Etat, à 7 mois de la fin du mandat d’Ibrahim Boubacar Keïta.
2017 aura été la plus meurtrière des quatre dernière années. Au moins, 716 personnes ont perdu la vie au Mali et 1157 autres ont été blessées. Ces chiffres sont indicatifs de l’aggravation de la situation sécuritaire, plus que jamais préoccupante sur toute l’étendue du territoire nationale. La nouvelle année s’ouvre donc dans l’incertitude. Il y a déjà eu des faits marquants d’insécurité.
La menace terroriste est omniprésente, les combattants des groupes armés signataires de l’accord de paix ont encore les armes à la bandoulière, et le centre du pays échappe progressivement au contrôle de l’État central. En plus de devoir mener une lutte militaire de longue haleine contre les groupes jihadistes, les forces de sécurité maliennes sont maintenant confrontées à une hausse des actes de banditisme, en particulier dans les zones rurales, où le vol de bétail, les affrontements entre communautés et les règlements de comptes sont devenus monnaie courante.
Sur ce même chapitre et derrière cet immense chantier sécuritaire, un autre défi pourrait vite se transformer en bourbier pour le Mali dans les mois à venir : la mise en œuvre du processus de paix dans le Nord. Les débuts encourageants entrevus après la signature de l’accord d’Alger par les groupes rebelles, le 20 juin 2015, semblent aujourd’hui lointains, alors que le cantonnement des groupes armés est dans l’impasse. Et le Comité de suivi dudit accord vacille, à cause des divergences entre groupes armés, des difficultés au niveau gouvernemental, des différents entre gouvernement et groupes rebelles. Au-delà, le problème de la mise en œuvre de l’Accord de paix se situe dans la difficulté même de l’application de plusieurs dispositions contenues dans le texte.
Au même moment, Kidal est toujours sous l’administration de la CMA.
A cela s’ajoutent les menaces de Iyad Ag Ghaly de tirer sur tout ce qui bouge dans le pays au motif que l’Accord de paix est une trahison…A ce propos, les mouvements des éléments fidèles à Amadou Koufa doivent être surveillés de très près. Sans oublier les djihadistes et terroristes alliés à Aqmi et qui ont créé la terreur dans le pays l’année dernière.
Après avoir longuement donné l’impression de tâtonner, le chef de l’État a désormais moins de six mois pour dissiper les nombreux nuages qui s’amoncellent.
S’il y a une promesse qui tenait à cœur aux Maliens à la veille de l’élection présidentielle de juillet 2013 jusqu’à l’investiture du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, c’est sans doute le règlement de la crise sécuritaire dans les régions du nord.
Certes le chef de l’État, conscient qu’il sera d’abord jugé sur son bilan sécuritaire, a consentis plusieurs efforts dans ce domaine. Mais, ces efforts demeurent en deçà des attentes.
Le temps file et Soumeylou Boubèye Maïga, le désormais Premier ministre, a la lourde tâche de tenter de renverser la tendance, d’ici à la prochaine présidentielle. Laquelle élection, comme celles qui devront intervenir en avril prochain, se posent également en défis à relever durant l’année 2018. En effet, l’organisation de ces échéances électorales, dans le délai constitutionnel et dans les meilleures conditions, est impérative dans le maintien du dynamisme démocratique. Mais, la grande majorité des Maliens est sceptique quant à la tenue desdites élections, à temps.
Apparemment, seuls le président de la République et les membres de son gouvernement croient à la possibilité d’organiser les futures élections communales partielles et régionales, la présidentielle et les législatives dans ce contexte sécuritaire. Du coup, des observateurs politiques voient en l’optimisme affichée par le régime, une farce orchestrée par l’administration pour cacher son incapacité à faire régner l’ordre et la sécurité sur le territoire national.
Selon ces observateurs, faire retourner les administrateurs à leur poste respectif au nord et au centre du pays, semble plus facile qu’organiser des élections dans une période d’insécurité. Le report des élections de novembre 2017 soutient la crainte de plusieurs de nos compatriotes, pour lesquels la réconciliation nationale est le plus pressant des défis à relever en cette année 2018. Celle-ci (réconciliation) sera déterminante dans l’organisation d’élections apaisées.
Une préoccupation d’autant plus légitime que ces dernières années, le peuple se trouve noyé dans une atmosphère sociopolitique délétère doublée d’une situation sécuritaire précaire aussi bien au nord qu’au centre et à Bamako. Le vivre ensemble a été sérieusement entamé par les épreuves de l’insécurité, du terrorisme, et de crises de tous genres. Il faut surtout s’unir face à la menace de partition du pays par des forces extérieures cachées derrière des rebelles aux idéaux indépendantistes maquillés en revendications de développement. La même valeur s’impose face à la guéguerre politicienne qui mine la vie nationale, déstabilise le fonctionnement normal des institutions, désoriente le peuple et détourne le pays de ses priorités.
Le doute n’est plus permis, il y a péril en la demeure. Et l’union sacrée des Maliens de tous bords est une obligation. La jeunesse avait montré la voie, lors d’un « Rassemblement pour la paix et la réconciliation nationale : An ka ben » tenu en mai dernier. A l’occasion, des jeunes, des membres du gouvernement), des représentants des partis politiques de la majorité et de l’opposition, des membres des groupes armés (Cma et plateforme), de la société civile se malienne, sont montés au créneau pour demander le retour au pays du président Amadou Toumani Touré. L’appel a été entendu : ATT est, depuis le 24 décembre 2017, parmi nous.
En accompagnant ce retour, les autorités actuelles ont posé un acte de grande dimension. A travers les commentaires, l’unanimité se dégage que les Maliens, du Nord au Sud et d’Est en Ouest, doivent se réconcilier. La réalisation de ce rêve est l’apanage du président Ibrahim Boubacar Kéïta qui doit en être à la fois le concepteur des jalons et l’exécutant. En effet, la réconciliation attendue aujourd’hui par le peuple malien, devrait être une réconciliation globale. C’est à ce prix que le peuple du Mali pourrait cicatriser ses blessures, surmonter toutes ses dissensions et poursuivre sa marche vers le progrès social, économique et culturel.
Au-delà de ces défis majeurs, il est aussi impérieux d’affronter la corruption, un fléau profondément ancré dans les mœurs. Tous les problèmes que les Maliens vivent aujourd’hui sont intimement liés à la mal gouvernance engendrée par une corruption à grande échelle.
Le régime doit aussi lutter contre l’inflation galopante des produits de grande consommation (céréales, lait, sucre, huile…) pour amortir les coups subis par les Maliens du fait que l’argent a complètement disparu. Et engager des travaux d’envergures, car les Maliens ont toujours besoin de routes, de barrages, de ponts et chaussées, de terres aménagées, de terres irriguées, de centres de santé, de salles de classes, d’écoles et d’infrastructures diverses. C’est dire que 2018 constitue un tournant décisif pour le régime. Une année déterminante où le chef de l’Etat devra s’attaquer à tous ces défis que traine le Mali depuis 2013. Il y va de l’embelli de son bilan qui sera son arme, face à des adversaires déterminés, pour être reconduit à la tête de la magistrature suprême du Mali.