PARIS - Avec l’intervention au Mali et le retrait d’Afghanistan, François Hollande s’est imposé dès le début de son quinquennat en chef des armées, capable de prendre des décisions difficiles et d’agir efficacement dans un domaine, la défense, où il n’était pas particulièrement
attendu.
A l’heure du bilan, c’est même l’un des rares secteurs où il emporte
l’adhésion des Français au-delà des clivages politiques. Plus de trois mois
après le début de l’intervention au Mali, 64% d’entre eux approuvent encore
l’opération, selon un récent sondage BVA.
Lundi, le chef de l’Etat a passé sans difficulté l’épreuve du Livre blanc.
Mais le véritable test sera la présentation de la Loi de programmation
militaire (LPM) qui répartira les 24.000 nouvelles suppressions de postes dans
les armées et les fermetures d’implantations qui risquent de susciter la
grogne des élus et des milieux militaires.
Candidat à la présidence, François Hollande s’était empressé de rassurer
les armées en s’engageant à maintenir la force de dissuasion nucléaire dans
ses deux composantes et à conserver la France dans le commandement intégré de
l’Otan.
Dès son élection, il confirme l’accélération du retrait des forces
françaises d’Afghanistan, déjà amorcé par son prédécesseur à l’Elysée. Lassés
de ce conflit sans fin, les Français ont approuvé le retour de leurs soldats,
qui ne devraient plus être qu’environ 500 cet été dans le pays.
Le retrait d’Afghanistan pouvait laisser croire qu’il serait moins
interventionniste dans ce domaine que Nicolas Sarkozy. Mais dès la sortie du
bourbier afghan, l’urgence s’est déplacée début 2013 au Mali où les groupes
islamistes menaçaient de déferler sur Bamako. Le chef de l’Etat donne son feu
vert à l’état-major le 11 janvier, et les forces spéciales françaises bloquent
en quelques heures l’avancée des jihadistes.
"Intervenir au Mali, ce n’est pas une rupture doctrinale, ni pour la
France, ni pour Hollande. Mais intervenir seuls, c’est un ajustement de nos
principes sous la pression des circonstances", estime Bruno Tertrais de la
Fondation pour la recherche stratégique: "L’une des vertus du Mali, c’est de
confirmer que même en période de crise économique grave, la France n’entend
pas renoncer à l’exercice de ce qu’elle considère comme ses responsabilités
internationales".
Saluée comme un succès pour sa rapidité et son efficacité, l’intervention
au Mali s’inscrit dans la longue tradition des opérations militaires de la
France dans sa zone d’influence africaine. Elle a montré que son armée pouvait conduire seule une opération d’envergure, deux ans après être intervenue en Libye au côté de la Grande-Bretagne.
Avec l’opération au Mali, François Hollande a montré une détermination qui tranche avec l’attentisme dont on l’accuse dans d’autres domaines. Début février, il s’est même offert un succès personnel lors de sa visite triomphale à Tombouctou. La mort lundi d’un sixième soldat français dans le nord du Mali montre cependant que le conflit est loin d’être terminé.
Le dispositif élyséen repose sur les bonnes relations du président avec les principaux chefs militaires, notamment avec son chef d’état-major particulier, le général Benoît Puga. Mais la présidence Hollande s’est aussi traduite par une reprise en main du pouvoir civil sur le ministère de la Défense, avec un ministre, Jean-Yves Le Drian, proche de François Hollande, qui fait le lien entre les armées et le sommet de l’Etat.
Les militaires attendaient quant à eux le chef de l’Etat sur le budget. Il peut se prévaloir d’avoir maintenus les crédits à un niveau conséquent et d’avoir refusé d’être, même en période de crise, le président qui a cassé l’outil de défense.
Selon le Livre blanc, 364 milliards d’euros doivent être consacrés à la défense d’ici 2025, dont 179,2 milliards entre 2014 et 2019. "Pour ce qu’on en sait, il a quand même arbitré de manière favorable à la défense, souligne Bruno Tertrais. A mon sens, le président dont on dit souvent qu’il est dans le compromis a plutôt fait preuve de volontarisme".
Prochaine étape, la LPM que le gouvernement devrait présenter durant l’été pour être discutée à l’automne par le Parlement.