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Sécurité et défense nationale : L’armée malienne transmuée en souffre-douleur
Publié le mercredi 24 janvier 2018  |  Delta News
Célébration
© aBamako.com par A S
Célébration du 57 anniversaire du 22 septembre 2018 à Kati
le Président de la République, Chef Suprême des Armées, Ibrahim Boubacar Kéïta a fait la revue de la troupe à Kati
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Dans un État, l’Armée est une institution et ses objectifs sont soumis aux objectifs politiques de cet État. C’est donc tout naturellement que la naissance de l’armée malienne intervienne le 1er octobre 1960 moins de dix jours après le22 septembre 1960, date de naissance de la république du Mali.

L’armée malienne devrait, de prime abord, remplacer les forces coloniales françaises présentes à l’époque sur le territoire national. Afin que la jeune armée puisse pleinement jouer son rôle, les dirigeants de l’époque ont jugé indispensable l’évacuation des bases militaires de l’ancienne puissance coloniale, dès janvier 1961. A l’occasion de cette évacuation le 20 janvier 1961, le Président Modibo Keïta a reçu les diplomates accrédités dans le pays pour leur annoncer la décision de son gouvernement et aussi leur expliquer le sens de cette décision souveraine. A ce sujet, Amadou Seydou Traoré dit Amadou Djikoroni, dans son ouvrage « A l’adresse des diplomates, le 20 janvier 1961 cf. Modibo Keïta, Discours et interventions, page 58, Edition La Ruche 2015 », rapporte ce suit ; Modibo KEITA : « A l’heure qu’il est, l’Ambassade de France en République du Mali est informée par mes soins de la décision de mon parti et de mon gouvernement de voir la France évacuer les bases militaires de Bamako, de Kati, de Gao et de Tessalit, qu’elle occupait du fait des accords franco-maliens, signés à Paris le 22 juin 1960, entre elle et la Fédération du Mali et qui deviennent caducs après les évènements du 19 au 20 août de 1960 et l’acte de reconnaissance par la France du gouvernement du Sénégal, acte qui consacre la dislocation de la Fédération du Mali. »



A chacune des dates anniversaires du 20 janvier, consacrée fête de l’Armée malienne, le Président Modibo Keïta précisera le sens de l’évacuation des bases de l’ancienne puissance coloniale et les nouveaux objectifs que son parti et son gouvernement fixent à l’Armée. Ainsi, à l’occasion du 4ème anniversaire de la fête de l’armée, le 20 janvier 194, Modibo KEITA a déclaré (page 344) :

«Mais pour nous, le départ de ces bases était la consécration effective de notre indépendance nationale, car si nous avons constitué une Armée Nationale, nous ne pouvions pas raisonnablement, tout en disant que nous faisons confiance à notre armée, tout en disant que nous sommes convaincus qu’elle est en mesure d’assurer la défense de notre indépendance, qu’elle est capable d’assurer la sécurité et sauvegarder notre intégrité territoriale, lui faire l’injure de vouloir maintenir à côté du drapeau qu’elle défend, des forces étrangères. »»

Et, une année après, le 20 janvier 1965, le président KEITA a souligné l’importance d’une bonne formation chez les militaires (page 411) :

« C’est pourquoi, il faut à nos officiers et à nos cadres militaires, en ce qui les concerne, des connaissances scientifiques, culturelles, et techniques, de toutes sortes en plus de leur connaissance sur les lois de la guerre moderne. »

Cette clarté de vision dans la formation et le rôle de l’armée dans la nation avait fait de l’armée malienne une des armées les plus performantes d’Afrique. Pour preuve ses différentes missions au service des Nations Unies ainsi qu’au service des mouvements de libération des pays qui se battaient encore contre le colonialisme portugais et contre l’apartheid en Afrique du Sud.

De même à l’intérieur du pays, elle n’a pas eu besoin d’une armada venue de l’extérieur pour venir à bout de la première rébellion de 1963. Dans le domaine du développement, on peut affirmer sans risque de se tromper que la plupart des cadres Kel Tamasheq de la région de Kidal, aujourd’hui quinquagénaire ou sexagénaire, sont les fruits de la politique de scolarisation menée avec l’aide de l’armée nationale. Nous avions à cette époque le soldat combattant, expert et patriote.

Malheureusement, cette expérience a été de courte durée car elle a été interrompue par la rupture intervenue en 1968 ; rupture opérée par la frange la plus médiocre de l’armé. Alors il s’en est suivi une chasse aux sorcières d’abord au sein de l’armée puis dans la société civile. Ainsi, la plupart des valeureux soldats, sous-officiers et officiers, ont été occis dans le mouroir de Taoudenit érigé à cet effet. Une bonne partie de la crème de l’armée nationale a été ainsi anéantie. De plus, de valeureux cadres civils ont été humiliés, embastillés ou forcés à l’exil.

A partir de ce moment, on a assisté à une mue de notre armée nationale. Les gradés ont troqué leurs treillis kaki vert-olive ou sable, bérets ou casques, rangers et guêtres, jeep, contre les grands boubous en bazin riche et richement brodés, les costumes trois pièces des plus grands couturiers de Milan, Paris, Londres, les chéchias marocaines, les souliers en cuir italiens, les 4X4 rutilantes de dernière génération. C’est aussi à cette époque, qu’on a observé la boulimie des officiers pour le domaine foncier. On a vu apparaître le « million nki » le quartier des millionnaires et des dizaines de domaines agricoles, et ce, au moment des grandes sécheresses des années 1970 et 1980.

Dans l’administration militaire, le recrutement qui se faisait au niveau national, a été transformé en recrutement choisi. Les passations de grades, mutations, devinrent de plus en plus iniques. Le soldat, est ainsi devenu un affairiste à l’image de son chef hiérarchique. On soudoie le chef pour se faire muter où on veut. On soudoie le chef pour monter en grade, etc. Les tests de combativité qui ont été opérés à l’occasion des guerres fratricides et stupides en 1972 et en 1984 contre notre voisin Burkina, auparavant appelé Haute Volta, ont bien dévoilé nos faiblesses militaires. Heureusement que le pays avait encore une force aérienne et que le voisin n’en possédait pas.

Malheureusement les ruptures intervenues au Mali, en 1968, 1991 et 2012, n’ont pas été mises à profit pour rebâtir une armée forte et disciplinée. Au contraire, on a assisté à la perfection de la gabegie, au développement de l’indiscipline, quoique les militaires aient dirigé ce pays pendant 35 ans sur les 58 ans d’indépendance. C’est donc tout naturellement que la énième rébellion a trouvé un terrain fertile pour pouvoir s’exprimer et le pays n’a eu d’autre choix que de faire appel à l’ancienne puissance coloniale pour sa survie. Belle revanche pour les forces armées de « nos ancêtres les gaulois ! » Aujourd’hui, le Mali est sous tutelle. Notre armée ne peut être que le souffre-des autres armées ; celles-là même qui sont venues nous assister. C’est dans ce contexte qu’intervient la célébration du 57ème anniversaire de sa fête.

Bonne fête les FAMAs , avec l’espoir que demain, dans un proche avenir, les maliens sauront choisir de nouveaux dirigeants, patriotes, qui sauront vous aider à reprendre dans le concert des armées des nations, une place que vous ne devriez jamais perdre !.

Hamidou Ongoïba
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