Les faits que notre rédaction raconte, aujourd’hui, peuvent servir de source d’inspiration pour Pierre Bellemare qui présente la chronique judiciaire « Les enquêtes impossibles » diffusées sur la chaîne de télévision RTL 9. Sauf qu’ici heureusement, on ne parle pas de meurtre mais bien de Hamet Niane et de son compère Ousmane Coulibaly tous deux, semble-t-il, escrocs de classe exceptionnelle. La simple évocation des noms de ces deux hommes dans le milieu judiciaire malien irrite un bon nombre de gens. De quoi s’agit-il ?
Ce récit qu’on vous relate n’est point étonnant au vu du record battu, ces dernières années, par les deux protagonistes car « Ceux qui se ressemblent s’assemblent bien ». Ainsi, tout a commencé le 1er novembre 2014, quand Guetema SARL dont le siège se trouve à Bamako Coura a livré des matériels informatiques et bureautiques à « Initiative Sotobajo » une agonisante structure de microfinance sise à Sotuba ACI pour un coût total de 49 955 000 f CFA. Ce fut, Alla hou Akbar, le début d’un imbroglio. Ce micmac se dénouera, sans doute, par la résignation de celui qui s’avouera vaincu à l’issue d’un long duel où la vérité et le mensonge subissent avec ironie des fluctuations comme le cours du Brent à la bourse de Wall Street.
En fait, à la réception des équipements, le bonimenteur Ousmane Coulibaly directeur général de Sotobajo mettant en œuvre son plan A s’était engagé avec assurance et affabilité qui confirment ses habitudes pernicieuses, à payer la facture de Hamet Niane le gérant de Guetema SARL le 13 novembre 2014 puis le 20 janvier 2015. Aucune de ces deux échéances n’ayant pu être honorée, Hamet a entamé une démarche tendant à trouver une solution dite « à l’amiable ». Mais, échec et mat puisque ses efforts n’ont abouti à rien.
En conséquence, Hamet courroucé s’est vu obligé d’offrir à Ousmane un séjour à la Maison d’arrêt centrale de Bamako pour ‘’escroquerie et abus de confiance’’. Quel beau mot ! Le visa d’entrée au territoire carcéral du directeur général de Sotobajo fut signé par le juge Goïta procureur du Tribunal de première instance de la Commune I. Il convient ici de rappeler au passage, qu’à l’époque, cet homme aussi a fasciné le Mali en devenant subitement et tristement célèbre par la flopée de gens dont il a envoyée en prison pour des raisons souvent controversées par sa propre corporation.
Détestant au plus haut point la justice, le talentueux Ousmane adopte au fond de sa geôle une attitude motus et bouche cousue le temps de mûrir ses stratégies. Mais, une fois, déterminé à mettre un terme à son oisiveté de plusieurs mois en taule qui lui fait engraisser (en témoigne sa masse corporelle imposante) le redouté directeur de Sotobajo jamais en panne d’idées, a mis en application son plan B.
Comment procédera-t-il ? Eh bien tout en prenant soin en se mettant à l’abri de toute pression ultérieure, il a réussi à berner Hamet le gérant de Guetema qui se fait passer pour un crédule. Car, n’est aveugle que celle ou celui qui ne veut pas voir et c’est bien le cas le plus intrigant de Hamet.
À preuve, le 30 janvier 2015, le directeur de Sotobajo usant de ses ruses a signé une procuration et un protocole d’accord dont les termes entraînent Hamet dans un dédale judiciaire. Ipso facto, Ousmane bénéficie d’une bouffée d’oxygène inouïe. Et comme il fallait s’y attendre, quelques mois après, il est relaxé à la faveur d’une demande d’une mise en liberté provisoire. Ousmane est-il doté d’un pouvoir mystique ?
En effet, dans la procuration disséquée le 13 février 2015 à l’étude de maître Mohamed Lamine Ag Hamid notaire à Sikasso Ouayéréma I, Ousmane donne tout le pouvoir à Hamet de recouvrer la créance de 46 000 000 de CFA que lui doit la Coopérative agricole des producteurs de Doumanaba. Même là aussi, le directeur de Sotobajo avait laissé très visible sa fameuse et authentique marque d’arnaqueur impénitent pour avoir déjà reçu à titre d’acompte 5 350 000 f à déduire des 46 000 000 précédemment mentionnés.
Quant au protocole d’accord dont les dispositions crèvent l’œil par leur évidence, il met à nu la connexion neuronale à bas débit du cortex cérébral de Hamet et démontre l’ingéniosité manifeste de Ousmane. En fait, dès l’article 1er Ousmane reconnait être redevable à Guetema SARL la somme de 49 955 000 f. Mais, il va vite tout foutre en l’air en administrant un uppercut à Hamet à travers l’article 2 qui dit ceci : « La créancière représentée par Monsieur Hamet Niane accepte les engagements de la société Initiative Sotobajo. Elle (Guetema SARL) s’engage, à son tour, à n’entreprendre aucune ou à arrêter toute poursuite judiciaire à l’encontre de l’Initiative Sotobajo et son directeur général Ousmane Coulibaly ». Cette pilule est certes amère mais Hamet va l’avaler sans une gorgée d’eau. C’est le prix de son comportement inqualifiable dont il n’a cessé d’étaler tout au long de cette saga. Autrement dit, comment et pourquoi s’est-il fait ligoter mains et pieds en signant un compromis qui le compromet à jamais ?
Comme si cela ne suffit pas, l’article 3 scelle le sort tragique de Hamet : « Le non-respect d’un seul terme de ce protocole entraînera sa caducité… » Le plus amphigourique c’est que plus loin on tombe sur ce passage tout aussi étourdissant : « La société Guetema SARL sera dès lors libre d’entreprendre toute poursuite judiciaire à l’encontre de la société Initiative Sotobajo et son directeur général Monsieur Ousmane Coulibaly. Que veut-on insinuer par-là ? Ousmane n’en dit rien ! Des mois ont passé il ne s’est jamais acquitté de quoi que ce soit.
Hamet exténué d’attendre a alors commencé à perturber son sommeil par des convocations bien déplaisantes. Ousmane s’est enorgueilli de remettre en cause le contenu du protocole d’accord avec une facilité déconcertante grâce à un procès-verbal de dénonciation dressé, le 04 mai 2015, par maître Kaba Kéita huissier de justice à Hamdallaye.
Ce qui a suscité des questions les plus saugrenues. En signant le protocole, le gérant de Guetema Hamet Niane avait-il les yeux bandés ? Est-il le complice parfait d’Ousmane Coulibaly au point d’incarner le rôle d’un personnage sot tel qu’on le voit dans les fictions ? Sa naïveté indescriptible cache-t-elle son intention de dilapider une partie du capital de sa société ? Si oui, quelles en sont les motivations ? À tous les égards, les responsables de Guetema SARL doivent traduire Hamet en conseil de discipline pour le contraindre de s’expliquer sur cette affaire qui fut un gâchis pour la société.
Car, aucune hypothèse n’est à balayer du revers de la main au regard des péripéties et combines qui, lors des procès, font le bonheur des uns et le malheur des autres. À preuve, le 02 novembre 2017, ce dossier a été tranché assorti d’un mandat d’arrêt émis contre Ousmane un sacré familier du cachot. « Mais jusque-là, un kopeck n’est tombé dans le compte de l’entreprise Guetema », soutient notre source. « Quelle est l’utilité de sa condamnation ? », s’interroge-t-elle.
En somme, ces intrigues dignes d’une série policière permettent au directeur général de Sotobajo de recouvrer sa liberté et de redorer sa peau où il continue d’appâter une kyrielle de victimes. Celles-ci se consolent au mieux en s’en remettant à Dieu et au pire en essuyant leurs chaudes larmes avec le linge de la résignation. Pouvait-il en être autrement dans un pays où la quête de la fortune est plus qu’une religion ?
Qu’on soit victime ou non, la morale c’est que de façon générale un bien mal acquis ne sert à rien. Les gens fortunés en savent beaucoup. La somme de 49 955 000 f va-t-elle atterrir d’une autre manière dans un compte secret de Hamet Niane ? Sera-t-elle considérée comme une perte par Guetema SARL ?