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Impacts et séquelles de la crise selon afrobarometre: 94% des Maliens pensent que les FAMA sont utiles au recouvrement de l’intégrité territoriale
Publié le vendredi 2 fevrier 2018  |  Infosept
Soldats
© RFI par David Baché
Soldats de la force française Barkhane, casques bleus de la Minusma, et soldats de l`armée malienne, lors d`une mission conjointe dans la région de Gao. Partout au Mali, la situation sécuritaire reste préoccupante.
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Entre le 8 et le 25 février 2017, sur toute l’étendue du territoire national, il a été mené une enquête Afrobaromètre au titre du round 7 pour obtenir les perceptions populaires des Maliens sur la qualité de la démocratie et de la gouvernance au Mali. L'enquête a touché au total 1200 individus âgés de 18 ans et plus dans les huit régions du Mali ainsi que dans le district de Bamako, dont 50% de femmes. Le document traite des perceptions pondérées proportionnellement à leurs tailles respectives dans l'échantillon des 1200 répondants. Ces perceptions ont plus précisément trait à la manière dont les ménages ont été affectés par la crise et le conflit du Nord, aux séquelles du conflit et à l'utilité des forces en présence pour le recouvrement de l'intégrité territoriale du pays. Les résultats de ce rapport ont été disséminés le mercredi 31 janvier 2018 par les responsables du Groupe de recherche en économie appliquée et théorique (GREAT). C’était à l’hôtel Olympe de Bamako.

Il ressort de ce document que 32% des Maliens interrogés ont affirmé avoir été affecté d'une manière ou d'une autre par la crise et le conflit. Les formes d'affectation vont de l'abandon de domicile à la prise en charge de personnes déplacées internes en passant par la perte d'emploi ou le changement d'occupation ou encore l'intimidation voire la menace de mort et le fait d'être témoin de blessures ou tueries. Ainsi, s’agissant du fait d'avoir été affecté d'une manière ou d'une autre par la crise et le conflit du Nord, le pourcentage varie d'une région à l'autre et dépend du milieu de résidence, du niveau d'éducation, de l'âge et de la religion. Les trois régions du nord en sont les plus affectés. Il est de 100% pour la population de Kidal, 94% pour celle de Gao et 77% à Tombouctou.

Pour ce rapport, à l'opposé des régions du nord, la région de Koulikoro semble avoir été la région où les populations auront été les moins affectées directement ou à travers des membres de leurs familles par la crise et le conflit du Nord, avec seulement 5%. Et cela quelle que soit la forme d'affectation y compris la prise en charge des déplacés. C’est la région de Kayes qui est la plus affectée des régions qui n'avaient pas été, en 2012, le théâtre immédiat de conflit. Elle est suivie de la région de Sikasso, à l'extrême sud du pays, où 22% des personnes en ont été affectées d'une manière ou d'une autre. La région de Mopti, au centre du pays, a été moyennement affectée, avec 32% équivalent à la moyenne nationale.
Globalement, selon les résultats de cette enquête, le conflit a touché proportionnellement plus d'individus en milieu urbain qu'en milieu rural, avec 10 points de pourcentage d'écart. Cela est particulièrement induit par les régions de Mopti avec 56 points de pourcentage d'écart, Ségou 23 points, sans compter que Bamako y contribue également en étant le plus important centre urbain du pays avec 33 points.

Aussi, il apparaît clairement dans ce rapport que les personnes de niveau d'éducation secondaire et plus ont été plus affectées par la crise et le conflit du Nord que les autres, plus de 10 points de pourcentage de plus que la moyenne. Soit 43% pour le secondaire contre 32% en moyenne ou 29% pour les analphabètes et 35% le niveau primaire. Par religion, les plus affectés auront été les musulmans, 34% d'entre eux contre 13% pour les chrétiens mais 24% les animistes.

Expulsion ou abandon de maison pour d'autres lieux
Plus d'une personne sur dix, soit 13% des sondés, a été affectée d'abandon de maison lors de la crise et du conflit du Nord, qu'il s'agisse d'abandon pour d'autres lieux dans le pays pour 12% ou hors du pays 6%. Ce sont bien entendu encore les régions du Nord qui en sont les plus concernées, 52% à Gao, 50% à Kidal et 49% à Tombouctou, beaucoup plus du fait des villes que de la campagne. Toutes les autres régions sont beaucoup moins affectées par cette forme d'affectation, l'abandon de maison pour d'autres lieux du Mali ou pour d'autres pays, seulement 3% à Sikasso, 5% à Koulikoro et 10% à Ségou.

Emploi et occupation
Ici, plus d'un répondant sur dix, soit aussi 13%, déclare avoir été, personnellement ou à travers des membres de sa famille, victime de destruction ou de fermeture des affaires, proportionnellement plus d'urbains que de ruraux. Les plus importantes destructions d'affaires auront été commises à Kidal avec 88%. Ils sont de 78% à Gao et 55% à Tombouctou. Ce phénomène a aussi été signalé, dans de moindres proportions certes, dans toutes les régions du pays. Kayes vient en tête de ces régions hors du nord du pays avec 16%, suivie de Bamako 13%, Ségou 11% et Mopti 10%. Les régions les moins affectées sont Koulikoro avec 3% et Sikasso 1%. En lien avec la destruction de leurs affaires, certaines personnes ont été affectées par la crise et le conflit du nord sous forme de perte d'emploi ou de changement d'occupation. Ainsi, près d'un répondant sur cinq, soit 17%, en a ainsi été affecté.
Les régions du nord en ont davantage souffert avec 62% à Tombouctou et 88% à Kidal en passant par Gao avec 82%.

Intégrité territoriale et séquelles de la crise et du conflit
Il ressort dans ce rapport que la crise et le conflit du nord ont sans doute laissé de nombreuses séquelles allant jusqu'à une certaine remise en cause de l'intégrité territoriale du pays dont des forces militaires sont diversement utiles à son recouvrement. Parmi celles-ci, les forces armées du Mali, FAMA. Ils peuvent être perçues du point de vue de leurs capacités à protéger le territoire des menaces sécuritaires internes et externes au regard des perceptions de leurs formations et équipements ainsi que de leur professionnalisme et respect des droits humains.
S’agissant des séquelles, 38% des répondants avoue que le Mali sera amputé d'une partie de son territoire. Pour 25%, le pays connaîtra davantage de conflits interethniques. Ils sont 20% à penser que le Mali perdra son unité nationale à cause de cette crise.

Si on analyse ces résultats, par région, ce sont celles du nord qui se dégagent avec une majorité absolue pour au moins une option de réponses sinon pour deux. Ainsi, ils sont 77% les répondants de Gao à craindre l'amputation du pays d'une partie de son territoire, contre 51% à Tombouctou et 50% à Kidal. A Kidal, ils sont 63% à pointer la perte de l'unité nationale, contre 55% à Gao et seulement 18% à Tombouctou. L'amputation est donc partagée par la majorité des répondants des trois régions du nord. Elle l'est aussi par ceux de Kayes avec 50%. La perte de l'unité nationale est majoritaire à Gao et Kidal. Les conflits interethniques sont les plus redoutés à Ségou avec 51% et Kidal 38%.

A contrario, 4% d'entre eux pense que le Mali sera un Etat fédéral et qu’il perdra de son poids dans le concert des Nations.
De même, les répondants des régions du nord ne redoutent ni des séquelles économiques ni des séquelles sociales, plutôt redoutées à Koulikoro et Ségou. Les régions du nord ne craignent pas non plus davantage de conflits interconfessionnels, contrairement d'ailleurs à Ségou avec 11% et Mopti 9%. A une exception près, celle de l'amputation du pays d'une partie de son territoire, Tombouctou se distingue des autres régions du nord quant aux séquelles de la crise et du conflit du Nord, ni la perte de l'unité nationale, ni la perte significative de l'indépendance du pays. C'est encore à Tombouctou qu'on enregistre le plus de réponses en faveur d'aucune séquelle avec 29%, 6% à Gao et 0% à Kidal pour une moyenne nationale de 6%.

94% des Maliens pensent que les FAMA sont utiles au recouvrement de l'intégrité territoriale
Interrogés sur l'utilité de certaines forces armées existantes sur le terrain à aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale et son unité nationale, les maliens plébiscitent à 94% les forces armées du Mali (FAMA). La MINUSMA vient en seconde position avec 58% d’opinion favorable, suivie des groupes d'autodéfense 56% et de la force armée française ou opération Barkhane avec 55%. Les mouvements armés comptent pour 23% des répondants et les groupes djihadistes pour 2%.

Il faut signaler qu'il n'y a pas de différence significative entre les réponses que selon la région, sinon il n'y a ni effet genre, ni effet éducationnel ou de milieu de résidence ni d'âge ou de religion. Quelle que soit la région, les FAMA viennent en tête. A Kidal, elles enregistrent leur plus faible score, 75%, toutefois devant toutes les autres forces dont la MINUSMA et Barkhane accréditées ici de 63% chacune. Ces deux forces armées étrangères sont plébiscitées à Gao, 83% chacune, curieusement plus à Mopti qu'à Kidal, 77% contre 63%. Ici encore Tombouctou se distingue des autres régions du Mali avec peu d'enthousiasme pour les forces armées étrangères, surclassées par les groupes d'autodéfense. La MINUSMA serait la moins bien jugée utile à l'intégrité territoriale et à l'unité nationale, à Sikasso avec 44% des répondants et Bamako 49%. Pour l'opération Barkhane, cela serait à Sikasso de 43% et à Ségou 46%. Ces deux forces sont toutes surclassées par les groupes d'autodéfense à Ségou, Tombouctou et Bamako. Partout, ces groupes surclassent les mouvements armés comme le MNLA sauf à Kidal, 50% contre 25%.

Protection du pays des menaces sécuritaires internes et externes
Il ressort de cette enquête que 81% des sondés estiment que les FAMA protègent toujours le pays contre les menaces sécuritaires internes et externes, presque autant chez les hommes que chez les femmes, légèrement moins en milieu urbain, 75% et selon les chrétiens, 72 et 70% selon qu'ils sont confrériques ou non. Les plus forts scores sont enregistrés à Koulikoro avec 95% et les plus faibles à Kidal avec 15% et Gao 37%.

A l'autre extrémité, ils sont 10% des sondés à trouver que les FAMA protègent peu contre l'insécurité. Mais ce taux est de 63% à Kidal et de 43% à Gao, deux régions qui croient beaucoup moins à la capacité des FAMA à protéger le pays de menaces sécuritaires internes et externes. De façon générale, les ruraux estiment plus que les urbains que les FAMA protègent toujours le pays des menaces sécuritaires;

Formation et équipement des FAMA
Les maliens sont quelque peu plus nombreux à penser que les FAMA reçoivent rarement la formation et le matériel nécessaire pour être efficaces avec 39% contre 20% pour quelque fois et 32% pour toujours. Les jugements les plus sévères proviennent de Ségou avec 59% des sondés suivie de Gao et de Kayes avec 45% chacune. Sur la question, les sondés de Tombouctou se sont très peu exprimés, avec 41% de sans réponse contre seulement 9% en moyenne.

Professionnalisme et respect des droits des citoyens
Près de sept sondés sur dix, soit 69% trouvent que les FAMA traitent avec beaucoup de professionnalisme et respectent aussi beaucoup les droits de tous les citoyens. Cette opinion favorable est largement partagée à Mopti, Koulikoro, et Kayes, 72% et plus. Elle diminue clairement avec le niveau d'éducation, de 72% pour aucun niveau ainsi que pour le primaire à 52% pour le niveau supérieur avec 66% pour le niveau secondaire.

Les régions du nord ont des opinions beaucoup moins favorables aux FAMA sur ce sujet de traitement professionnel et de respect des droits de tous les citoyens. Seulement 25% des sondés de Kidal pensent qu'elles le font toujours contre une moyenne nationale de 69%. A Gao, ils sont seulement 24% contre 51% à Tombouctou, région qui a le plus fort taux avec 26% contre 6% en moyenne toute région confondue. A l'opposé donc, c'est dans ces régions du nord, excepté Tombouctou, qui le pense moins que Ségou et Bamako, 13% contre 24% et 16%, que les sondés pensent que les FAMA traitent rarement avec professionnalisme et respectent rarement les droits humains avec 63% à Kidal et 33% à Gao. Ce jugement négatif est autant induit par le niveau secondaire et plus d'éducation que par les chrétiens confrériques.

Il faut enfin rappeler qu’Afrobaromètre est un réseau de recherche africain en sciences sociales. Il mesure l'opinion publique sur les questions clés politiques, sociales et économiques. Les données sont obtenues par entretiens en face-à-face dans les langues officielles et nationales, avec des échantillons représentatifs des citoyens africains âgés de 18 ans et plus. Dans son round 7, plus de 50 mille citoyens ont été enquêtés dans 34 pays africains. Le présent rapport est basé sur le traitement de données de certaines questions portant dans son ensemble sur «la qualité de la démocratie et de la gouvernance au Mali». Les résultats sont fiables avec une marge d'erreur de 2% à un niveau de confiance d'au moins 95%.

Dieudonné Tembely
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